La gauche ne sait plus où donner de l'exorcisme et de la condamnation morale. Après l'élection de Giorgia Meloni en Italie, la résistance inattendue de Bolsonaro au Brésil, après la bascule politique de la Suède, après la Pologne, la Hongrie, après les percées de Zemmour, Le Pen ou Vox en Espagne, on avait fini par oublier les Anglais. Très méchants, eux aussi, les Anglais. Surtout Suella Braverman. Cette sujette de Sa Gracieuse Majesté s’est fendue d’une sortie assez franche sous les caméras du Daily Telegraph : « J’aimerais avoir une pleine page du Telegraph avec un avion qui décolle pour le Rwanda : c’est mon rêve. C’est mon obsession. »

Hier, mardi 4 octobre, au congrès du Parti conservateur à Birmingham, la même Suella Braverman s’est fendue d’une sortie assez claire sur ses vœux en matière d’immigration, sous les applaudissements du public : « Si vous entrez illégalement au Royaume-Uni en provenance d'un pays sûr, vous devez rapidement être renvoyé dans votre pays d'origine ou relocalisé au Rwanda, où votre demande d'asile sera considérée. » En France, les bonnes consciences s’étranglent.

Non seulement le gouvernement de Liz Truss n’a pas abandonné l’idée émise sous Boris Johnson d’envoyer les migrants au Rwanda, mais Suella Braverman prend le dossier à bras-le-corps. Aucun migrant qui traverse la Manche ne pourra demander l'asile au Royaume-Uni, tranche-t-elle.

Le ministre de l'Intérieur du Royaume-Uni peaufine « une nouvelle loi interdisant à quiconque traverse la Manche de demander l'asile en Grande-Bretagne ». Elle « prévoit une action plus sévère contre les migrants qui prétendent être des victimes de l'esclavage moderne ». Car cette année, ils sont plus de 33.000 à avoir franchi la Manche vers le Royaume-Uni, bien plus que prévu.

Suella Braverman est donc le fer de lance de la bataille essentiellement judiciaire engagée par le Royaume-Uni contre les associations d’aide aux migrants et contre l’Europe, les deux moteurs de l’immigration de masse qui ont déjà fait plier Salvini en Italie. En juin dernier, la Cour européenne des droits de l’homme avait ainsi bloqué le projet de sas rwandais du gouvernement anglais. Cette décision avait fait sortir de ses gonds Suella Braverman : « Nous ne pouvons pas régler le problème de l’immigration illégale à cause de revendications en matière de droits de l’homme et à cause d’une cour étrangère à Strasbourg, politisée et interventionniste qui se mêle de notre politique intérieure. Je crains que la seule solution soit de quitter la Cour européenne des droits de l’homme », avait-elle martelé. Pour elle, « trop de demandeurs d'asile abusent du système » et se révèlent inadaptés aux « besoins de l'économie ». Et le ministre anglais, ancienne conseillère juridique du gouvernement (attorney general), n’est pas femme à se laisser faire. Elle a trois atouts principaux.

Premier atout, ses origines. Elles la mettent à l’abri des accusations de racisme. Ses parents d’origine indienne sont arrivés au Royaume-Uni dans les années 60 après avoir séjourné au Kenya et à l’île Maurice. Née près de Wembley, dans le nord-ouest de Londres, elle se veut plus anglaise que les Anglais.

Deuxième atout, cette bouddhiste de 42 ans, mère de deux enfants, formée à Cambridge et à… la Sorbonne (!), est une militante conservatrice depuis ses plus jeunes années : lors de ses études à Cambridge, elle prend la présidence de l’Association des conservateurs. Ses convictions n’ont pas varié d'une virgule.

Car, troisième atout, Suella Braverman a les idées claires. Son opposition à l’Europe est franc, massif et sans failles. Elle a fait partie des opposants acharnés à l’accord de Brexit mou concocté par Theresa May. Le ministre de l'Intérieur britannique guerroie sans relâche contre le wokisme. Elle n’avait pas hésité à fustiger les débats sur le genre dans les universités britanniques lorsqu’elle postulait à la succession de Boris Johnson. Pour elle, les écoles ne devraient pas être contraintes d’accueillir des élèves transgenres. Les coûteux rêves des Verts ne la troublent pas davantage. La neutralité carbone peut attendre la fin de la crise énergétique, estime-t-elle, voire même plus tard encore.

Evidemment, les innombrables associations et organismes de défense des migrants, nourris pour beaucoup à la petite cuillère des subventions étatiques et européennes, s’étranglent et brandissent l’écheveau des lois et des conventions patiemment tissé pour entraver la liberté des États et des peuples. Ce qui n’a pas l’air d’empêcher le ministre de l’Intérieur britannique de trouver le sommeil…

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05 octobre 2022 à 20:25

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39 commentaires

  1. C’est très bien et loin du maire de Londres. Ils sont tous les deux pourtant des représentants du grand remplacement.

  2. Je proposerais à cette courageuse femme d’envoyer en France ses immigrés dont elle ne veut pas, et d’accueillir en grande-bretagne les français, qui comme les protestants au XVIIéme et XVIIIéme siècle ont quitté ce pays infernal pour émigrer vers le pregmatisme et la liberté individuelle !

  3. De plus, comme tout le monde la comprend, on ne peut interpréter ses propos, sale coup pour ses opposants!

  4. Elle a l’air sympa, cette dame, on n’a pas l’impression d’avoir à faire avec une féministe pure et dure.

  5. Cette femme démontre qu’il faut une volonté politique de fer et la foi chevillée au corps pour ne pouvoir ne serait-ce que commencer à vouloir agir contre les méfaits du progressisme woke ou la submersion migratoire. Le triptyque lois européennes + Cours de Justice + associations droits-de-l’hommistes représentent un être protéiforme mou et étouffant contre lequel il est très dur de lutter si l’on se contente des armes émoussées que fournit l’Etat de Droit.

  6. Pourquoi ne peut-on opposer en priorité « les droits de l’homme » aux « droits des Français ? » est-il injurieux de dire … « ma famille d’abord «  ?

  7. Très bel article qui démontre que nous pouvons espérer pour l’avenir un réveil ( qui a commencé…) des populations européennes de souche !
    Au passage merci monsieur Baudriller pour l’emploi du masculin concernant le poste de ministre . L!emploi de la bonne langue française vous remercie .

  8. Résidant en Grande-Bretagne depuis 26 ans, ayant toujours des liens avec mon pays, celui de mes ancêtres (XVème siècle), et du Général de Gaulle, j’aimerais que la France possèda une Suella Braverman !
    Seulement voilà, la France s’enorgueillit de, pour rester dans le genre féminin : Sandrine Rousseau, Danièle Obono, Raquel Garrido (y’a de la rime dans l’air), etc.
    On n’a que les Stars que l’on mérite !

  9. bravo Mme Suella Braverman, vous avez un sacré courage, on rêve en France d’avoir une personne comme vous , on rêve même de FREXIT !!!!!

  10. « Je crains que la seule solution soit de quitter la Cour européenne des droits de l’homme », C’est le bon sens , on peut dénoncer un traité ou un accord international en invoquant la sécurité ,nationale et la souveraineté de son pays.
    L’UE n’est qu’une collection de traités , et les institutions de l’UE , en particuliers les juges européens , se sont attribués des pouvoirs qu’ils n’ont pas.
    Et le RU il me semble a fait le Brexit.

  11. Des Français vivant au RU depuis longtemps me racontent que les Anglais anciens et blancs , élisent des anglais nouveaux et de couleur, car ces derniers sont les seuls à pouvoir dire ce que les premiers pensent sur l’immigration .
    On en est arrivé là, les populations d’origine encore majoritaires doivent se faire défendre par les minorités venues d’ailleurs.

    1. On aimerait qu’il en soit ainsi en France . Sauf que nous avons un Pap N’ diaye qui se rend dans d’autres pays pour dire tout le mal qu’il pense du pays qui l’a fait ministre !! On marche sur la tête !

  12. Bonne chance Suella car nos systèmes judiciaires inféodés aux croyances des Droits de l’homme feront tout pour vous bloquer. Bon courage et espérons que Mme. Truss et votre majorité parlementaire ainsi que vos concitoyens vous appuieront.

    1. Enfin « Droits de l’Homme », parlons plutôt de « Droits de certaines minorités » contre ceux des majorités, ce qui est la négation de la démocratie.

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