On dit que la justice est trop lente, en France, parce qu'il n'y aurait pas assez de magistrats. Pourtant, dès qu'il y a un fait divers mettant en cause une personnalité, je constate qu'une génération spontanée d’accusateurs sort du bois pour nous faire part des conclusions de leur enquête et de leurs réquisitions. Le plus étonnant étant que ces procureurs du dimanche sont les mêmes qui, d'habitude, se méfient, à juste titre, de ce qu'ils entendent toute la semaine à la télévision. Cependant, lorsqu’il s’agit d’un notable, d’une vedette, d’un politique, il n’y a plus aucune précaution oratoire de la part du public pour évoquer le litige par lequel la personnalité serait en délicatesse. On l’a souvent remarqué pour des affaires de mœurs, ces derniers temps. C’est un phénomène courant, qui s’est déclenché une nouvelle fois lors du grave accident automobile mettant en cause l’humoriste Pierre Palmade.

Loin de moi l’idée d’excuser une conduite sous l’empire de drogues dangereuses, et encore moins de minimiser les conséquences du drame sur la vie des victimes. Malheureusement, de tels faits divers ont lieu tous les jours mais ne font pas la une des journaux. En revanche, quand une vedette est mise en cause, un torrent de commentaires, le plus souvent haineux, se déverse sur la Toile. Les réseaux sociaux ne sont que des vecteurs amplificateurs, la haine est préexistante. Pierre Palmade incarnerait-il toutes les turpitudes imaginées par le bon peuple auxquelles se livre une nomenklatura dégénérée ?

Depuis toujours, la presse se repaît de scandales plus ou moins grossis à la loupe afin d’exciter la curiosité des voyeurs pour vendre des journaux. On se souvient des libelles outranciers dont a été victime la reine Marie-Antoinette. Et voilà que l’opinion publique, dont chacun sait combien elle est vertueuse, se dresse comme un seul homme, ou plutôt comme un procureur, pour condamner sans appel un homme sur la foi d’articles à scandales. Il est, hélas, habituel que la presse, stimulée par les réseaux sociaux, devienne le pilori contemporain. Il faut être le premier à faire des révélations croustillantes, et voici que la meute s’emballe. Oui, Pierre Palmade, s’il a délibérément conduit sous l’empire de la cocaïne, a commis une faute très grave. A-t-il voulu commettre un accident mortel ? Sûrement pas. Et pourtant, à lire et entendre certains, il est devenu en l’espace de vingt-quatre heures le pire des monstres ! Cocaïnomane, gigolo sur le retour, homosexuel, voire bisexuel, amateur de jeunes escort-boys, fêtard dévoyé… Pierre Palmade est coupable, forcément coupable ! La justice populaire a rendu son verdict ! Pourquoi faire une enquête ? Pourquoi attendre de connaître les circonstances du drame ? Puisque l’on vous dit que c’est un monstre et qu’il est coupable !

Et voilà comment l’on en arrive au lynchage dans les règles de l’art. Aucune circonspection, aucune retenue, aucun temps de réflexion. La prétendue époque de l’indulgence pour les people est bien révolue, mais si une vedette ne peut s’exempter du droit, elle n’a pas non plus à être traitée avec moins d’égards que n’importe quel délinquant. Ce déversement de haine participe au climat délétère qui règne en France contre les riches, les politiques, les vedettes et tous ceux qui jouissent d’une notoriété. N’en déplaise aux procureurs improvisés du dimanche, la justice ne se fait pas au comptoir du café du commerce et le traitement doit être le même pour tous.

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14 février 2023 à 17:06

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77 commentaires

  1. Le cas de cet individu n’a qu’un intérêt : celui de mettre l’accent sur le fléau de la drogue. Au volant et partout dans toute la société. On a fait sortir les fumeurs des cafés et des restaurants et en même temps on a laissé la drogue infuser partout. On a fait des campagnes contre l’alcool et le tabac. Contre la drogue : rien. Contre toutes les drogues : rien. Mieux on installe des salles de shoot. Que se cache t il (qui se cache devrais-je plutôt dire) derrière ce « laxisme » cette « tolérance » l’acceptation de cette « fatalité » ? Qui vous livre à domicile ? Chuuut ! Il est interdit d’interdire. Il en va de la drogue comme de la pédophilie. Il y a quelques années ça « passait » on en parlait sur les plateaux de télévision et même les plus prestigieux, on écrivait des bouquins. Et puis on a découvert les réalités, les langues se sont déliées. Il en ira de même avec la drogue. La gauche « pétard » aura des réveils douloureux.

  2. C’est toujours pareil quand il s’agit des gens de la gauche bien pensante ! est-ce lyncher quand on parle de la réalité ? et la présomption d’innocence ? dans le cas de Mr Palmade il n’y en a pas car c’est lui qui était au volant de sa voiture et c’est bien lui qui a provoqué l’accident , c’est irréfutable .

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