Emmanuel Macron a beau avoir appelé les personnels de la SNCF et de la RATP à « l'esprit de responsabilité », déclarant qu'« il est des moments dans la vie d’une nation où il est bon de savoir faire trêve pour respecter les familles et la vie des familles », le Premier ministre a beau annoncer de nouvelles concertations à la rentrée, en détaillant le calendrier d'un programme de travail, rien n'y fait ! Pendant les fêtes de Noël, le trafic est encore fortement perturbé. Et voici que la CGT, outre des coupures sauvages d'électricité, commence à s'en prendre aux raffineries.

À quoi joue le gouvernement ? D'un côté, il explique que des négociations sont possibles ; de l'autre, il confirme son intention de mettre en œuvre la réforme. Les syndicats modérés, comme la CFDT ou l'UNSA, ont bien accepté une trêve, mais la base ne suit pas. Non pas qu'elle soit exclusivement composée d'anarchistes ou de gauchistes, pour qui le désordre est du pain bénit, mais parce qu'elle traduit l'inquiétude d'une majorité de l'opinion publique. En fait, l'exécutif joue un double jeu : en prônant le dialogue, il cherche à montrer sa bonne volonté, mais sa volonté réelle est de trouver les moyens de passer en force.

Le projet de réforme sera présenté en Conseil des ministres, le 22 janvier, ce qui prouve qu'il est déjà bien avancé. Ensuite, il sera soumis au Parlement : compte tenu de la composition de l'Assemblée nationale, le résultat est prévisible. Le gouvernement veut faire croire qu'il est prêt à des compromis alors qu'il ne cherche qu'à gagner du temps. Macron sait qu'il joue gros. Aussi ne se met-il pas trop en avant. Il laisse les autres s'exposer, bien que cette réforme soit d'abord son idée : en cas de danger, les fusibles ne manqueront pas !

Jupiter règne toujours à l'Élysée. Il est persuadé que l'opinion, lassée du désordre, finira par le soutenir. Il compte aussi sur le ralliement de la droite, quand elle ne l'a pas encore rejoint. Il se berce d'illusions, certain de l'emporter à l'usure. Sans prendre conscience que c'est lui qui risque d'être emporté. Car, dans cette valse-hésitation entre le dialogue et la fermeté, il mécontente tout le monde. Ceux qui dénoncent des négociations en trompe-l'œil, portant sur des détails, ceux qui déplorent qu'il ne soit pas capable d'imposer une réforme, si juste d'après lui.

Le Premier ministre a donc proposé aux organisations syndicales et patronales un programme de travail en vue « d’avancer très rapidement sur les chantiers ouverts ». Le problème, c'est que les chantiers ouverts ne sont pas légion et que la diversité des situations risque de conduire à une usine à gaz. Que dire d'un système universel, censé être plus simple et supprimer les régimes spéciaux, quand on envisage des mesures particulières pour chaque catégorie de Français ? N'est-ce pas la preuve que, dès le début, le projet est mal ficelé ?

L'exécutif gagnerait plus à renoncer à cette réforme qu'à ne pas en démordre. Quand on constate qu'il n'a même pas le courage de s'interroger sur la mise en place d'un service minimum, ni de dénoncer le quasi-monopole exercé par la CGT, depuis des décennies, sur des entreprises stratégiques, on se demande s'il ne mérite pas simplement d'être remercié. À défaut d'une trêve, ce serait un beau cadeau de Noël pour les Français.

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24 décembre 2019 à 15:50

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