Le 6 septembre dernier, le Haut Comité d’évaluation de la condition militaire (HCECM) remettait son rapport annuel au président de la République, chef des armées.

Cette instance, créée en 2005 par décret, a pour mission d’"éclairer le président de la République et le Parlement sur la situation et l’évolution de la condition militaire". À travers son rapport, il est en outre habilité à formuler des avis ainsi que des recommandations qui font l’objet d’un suivi. Présidée par un conseiller d’État et composée de neuf membres, dont seulement deux militaires (généraux en deuxième section), cette instance ne peut donc être taxée d’avoir une démarche corporatiste.

Le rapport du HCECM, un document de près de 200 pages bien serrées, est une précieuse source d’information pour qui veut s’intéresser un peu à la vie de ceux qui donnent beaucoup pour défendre la nation. Ces hommes et ces femmes à qui la loi "exige en toute circonstance esprit de sacrifice pouvant aller jusqu’au sacrifice suprême [ce que la loi ne demande explicitement à aucun autre corps de l’État], discipline, disponibilité, loyalisme et neutralité". Vous le trouverez facilement sur Internet.

En 2017, le HCECM a décidé de consacrer son rapport à "La fonction militaire dans la société française". Tout d’abord y sont rappelées quelques évidences qui ne le sont peut-être pas pour tout le monde, y compris au plus haut de l’État : "Parler de la fonction militaire, c’est d’abord parler de la France, de la République et de son armée. La fonction militaire est, en effet, au premier rang des attributions régaliennes de l’État..."

C’est pourquoi, sans doute, le ministre en charge des armées est placé derrière le ministre de la Transition écologique et solidaire… Cela dit, reconnaissons qu’il y a un mieux. Souvenons-nous, dans le premier gouvernement Ayrault en 2012, Jean-Yves Le Drian était au onzième rang, derrière ses collègues des Affaires sociales, du Logement, de l’Écologie, du Redressement productif et du Travail ! "Le premier devoir de l’État", qu’il disait, le général de Gaulle !

Mais revenons à ce rapport. Il pointe du doigt un état de fait qui explique sans doute beaucoup de choses, notamment dans ce qui s’est passé l’été dernier entre le président de la République et le général de Villiers.

"On s’étonnera [...] que les futurs cadres supérieurs et dirigeants de l’État recrutés par l’École nationale d’administration (ENA) et l’École nationale supérieure de la police (ENSP) n’aient, depuis la suspension du service national et sauf exception, plus aucune expérience militaire."

Choc des planètes entre Jupiter et Mars, entre un homme qui n’avait jamais dirigé un ministère régalien et un soldat qui a commandé des hommes toute sa vie, entre un papillon qui est passé de l’Inspection des finances à la Banque et un laboureur qui a tracé patiemment son sillon d’expérience, entre celui qui croit tout savoir et celui qui sait qu’il ne sait pas tout - ce qu’apprend le métier des armes. Ce n’est pas au chef d’état-major des armées mais au ministre de défendre le budget des armées, affirmait, péremptoire, le Président ! Outre le mépris de caste sous-jacent, ces propos révélaient à l’évidence une grande ignorance des rouages de la défense.

Le Haut Comité suggère "d'instaurer dans le cursus de l’ENA et de l’ENSP une obligation militaire d’une durée significative, incluant une période de formation en qualité d’élève-officier suivie d’une période de service effectif dans une unité militaire." Histoire d’apprendre à mettre son lit et ses idées au carré, dirons-nous. Cela ne ferait pas de mal à certains.

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10 octobre 2017 à 20:04

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