Depuis quelques jours, une nouvelle polémique s’enflamme autour de la restauration de Notre-Dame de Paris. Après le débat sur la flèche, finalement tranché par Emmanuel Macron reconnaissant le consensus national autour d’une restauration à l’identique, l’archevêché de Paris évoque l’hypothèse d’intégrer des vitraux d'art contemporain et du mobilier du XXIe siècle.

« Il faut donner des clés nouvelles de compréhension de l'édifice aux 12 millions de visiteurs qui viennent, croyants ou non. C'est notre objectif. L'art contemporain n'est que l'un des moyens », explique, au Parisien,le père Gilles Drouin, missionné par Mgr Aupetit pour diriger une commission de réflexion sur l’aménagement de la cathédrale. Se voulant rassurant, il précise que les vitraux contemporains ne concerneraient pas « des vitraux figuratifs mais des grisailles voulues par Viollet-le-Duc. Ce seraient alors des interventions à la marge. Les grands vitraux ne seraient pas touchés, naturellement. C'est une idée parmi d'autres. »

Un délire postmoderne contre lequel s’insurge Didier Rykner, directeur de La Tribune de l’art dans Le Figaro : « Le clergé français a, dans les années 1960, interprété le concile Vatican II en mettant en œuvre un vandalisme inédit depuis la Révolution française au nom d’un modernisme douteux. C’est ainsi qu’il s’est débarrassé de chaires, de maîtres-autels de tables de communions innombrables. C’est tout un patrimoine qui a disparu, et ça continue. »

Le Figaro décrit également un projet de banc « dotés de points lumineux » pour remplacer les chaises en bois et paille, donnant « une impression de piste d’aéroport, voire de parking ». Pour le père Drouin, ces bancs contemporains permettraient une « facilité de manutention. Notre objectif est de donner à voir ce grand vaisseau, moins encombré, plus accessible et plus lisible. »

La charte de Venise, signée par la France en 1964, recommande de conserver l’existant lors des restaurations de monuments historiques. Ce que n’a pas manqué de rappeler Roselyne Bachelot face à cette éventualité de déposer les vitraux pour les remplacer par des contemporains : « La chose est pour moi irrecevable et contraire aux conventions que nous avons signées. » Auditionnée, le 24 novembre, par la mission d'information de l'Assemblée nationale chargée de veiller à l'application de la loi Notre-Dame de juillet 2019, le ministre de la Culture a souligné que « le clergé est habilité à amener du mobilier culturel » mais « les vitraux ne sont pas du mobilier » et « l'État est compétent sur tous les décors intérieurs ».

Des propos rassurants pour les souscripteurs qui ont permis de collecter près d’un milliard d’euros de dons pour la restauration de la cathédrale et non pour l’innovation. Et un clivage conservateurs-progressistes pour le moins inattendu avec cette inversion des rôles des protagonistes...

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26 novembre 2020 à 14:48

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