Municipales à Paris : Cédric Villani pratique la stratégie de l’araignée

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Cédric Villani, qui dénonce une procédure de désignation « viciée », va-t-il prochainement annoncer une candidature dissidente à Paris ? Bien que la commission nationale d'investiture LREM lui ait préféré Benjamin Griveaux, il pourrait se présenter tout de même. Si on ne peut suspecter le titulaire de la médaille Fields d'avoir une araignée dans le cerveau, on souhaiterait qu'il donnât une explication sur les broches araignées qu'il porte régulièrement sur son veston. Il en aurait toute une panoplie. Un fétiche ? Une mascotte ? Quoi qu'il en soit, ce spécialiste des sciences exactes semble se faire des illusions.

Bien qu'il ait présidé, en 2014, le comité de soutien d'Anne Hidalgo, le député de l'Essonne se dit « déçu par son bilan insuffisant et par sa méthode clivante ». Il a donc décidé de la combattre. Finalement, ce « progressiste » est semblable à la plupart des politiciens, qui se comportent plus en caméléons qu'en araignées. Rien ne dit que, d'ici mars 2020, il ne se rabibochera pas avec le maire actuel, si jamais elle est en passe d'être réélue. Pour le moment, il discuterait avec Mounir Mahjoubi, Pierre-Yves Bournazel, Gaspard Gantzer et même Les Verts.

Histoire, sans doute, de peaufiner son image de rassembleur. Ou de valoriser son influence. Quand on voit le parcours des intéressés, on se demande s'ils sont les plus dignes de confiance. On peut penser qu'ils cherchent tous un moyen d'exister, en espérant ne pas être oubliés par le vainqueur. Cédric Villani tisse sa toile, pour attraper quelques personnalités prêtes à tous les compromis pour avoir une place dans la prochaine équipe municipale. Récemment, il confiait aux journalistes que « les vraies araignées, il ne faut pas en avoir peur, ce sont des alliées de l'humanité ».

Il paraît que, pendant les vacances d'été, le mathématicien a lu Pour l'honneur de Paris, de Bertrand Delanoë, et Revoir Paris, de Pierre-Yves Bournazel. Rebelles et conformistes à la fois. Tel la Sibylle, il s'exprime en oracles ambigus, aux multiples interprétations. Ainsi, il a déclaré à Paris Match : « Quelle que soit la suite de la démarche, il s'agira de rassembler et de travailler sur le meilleur projet », ajoutant qu'« [il] ne considère pas le candidat officiel comme un adversaire ou un ennemi ». Le voilà assuré de trouver une toile de remplacement si, d'aventure, la sienne se déchirait.

Ce qu'il y a de réconfortant, dans ce salmigondis électoral, c'est que tous ces prétendants n'ont qu'une estime très modérée pour Benjamin Griveaux. Dans le JDD, le chouchou de Macron a répété qu'il espérait que son rival malheureux serait, comme il l'a promis, « loyal » et qu'il n'a « pas de raison de douter de sa parole ». S'il éprouve le besoin de le dire, c'est qu'il doute précisément de la loyauté de l'homme à l'araignée. L'Obs précise, de son côté, que son entourage se prépare « à un affrontement avec Villani ».

Il est dommage que Cédric Villani, dont le génie scientifique n'est pas contesté, se soit engagé dans cette voie hasardeuse. Le rapport sur l'enseignement des mathématiques en France, qu'il a rédigé, en 2018, avec un inspecteur général, était d'un haut niveau. Aujourd'hui, on se demande s'il a encore le temps de faire des mathématiques ! Il eût mieux fait d'imiter son aîné Laurent Lafforgue, lui aussi titulaire de la médaille Fields, qui ne s'est jamais laissé séduire par les sirènes électorales et s'est consacré à la science et à la promotion d'un enseignement classique dans l'École républicaine. C'est beaucoup mieux que de tisser une toile éphémère et fragile dans le milieu politicien !

Philippe Kerlouan
Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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