Mixité sociale dans le privé : Pap Ndiaye se trompe d’objectif et de méthode

Pap Ndiaye
Après avoir signé un protocole d'accord sur la mixité sociale et scolaire avec le secrétaire général de l'Enseignement catholique, le ministre Pap Ndiaye, apparemment content de lui, a confié à L'Express qu'il avait été « aussi loin que possible ». On a beaucoup glosé sur cet accord, le trouvant tantôt trop sévère, tantôt trop conciliant, mais on n'a guère souligné que, paradoxalement, Pap Ndiaye reconnaît l'échec de l'enseignement public et fait la promotion de l'école privée.

Les deux parties souhaitent constituer une base d'informations partagées et lutter contre l'autocensure. L'Enseignement catholique s'engage à réduire les frais de scolarité en incitant les établissements à moduler le montant des contributions familiales en fonction des revenus. Il faudra aussi renforcer l'accueil d'élèves à besoins « éducatifs particuliers » et encourager l’implantation d'écoles dans des secteurs à forte mixité sociale et scolaire. Bref, le privé doit avoir les mêmes contraintes que le public.

Mais d'où vient le succès de ces établissements ? Si des parents veulent inscrire leurs enfants dans l'enseignement privé, dussent-ils faire un effort financier, c'est qu'ils estiment que la discipline y est mieux assurée et que les conditions d'étude y sont plus sereines. Pap Ndiaye a, d'ailleurs, lui-même inscrit ses enfants dans une école privée, qui n'est pas réputée pour accueillir les enfants des quartiers difficiles, afin qu'ils aient « une scolarité sereine ». Plutôt que de raviver de vaines querelles, puisqu'il reconnaît que l'enseignement privé est compétitif, ne devrait-il pas plutôt faire en sorte d'améliorer le climat scolaire dans les établissements publics ?

Pap Ndiaye devrait relire Molière. Dans Les Femmes savantes, il écrivait que « quand sur une personne on prétend se régler, c'est par les beaux côtés qu'il lui faut ressembler ». Pourquoi, au lieu de vouloir appliquer au privé ce qui ne fonctionne pas dans le public, ne pas appliquer au public ce qui marche dans le privé ? Certes, dans les deux secteurs, il y a de bons et de mauvais établissements et il faut garantir aux familles l'exercice concret de la liberté de choix. Le ministre lui-même n'a pas choisi un établissement médiocre pour ses enfants. Mais il devrait, au moins, avoir pour objectif que toutes les écoles, publiques ou privées, puissent donner aux élèves une instruction digne de ce nom.

Non seulement le ministre se trompe d'objectif, mais il fait preuve d'une grande hypocrisie. Il sait bien que l'élite sociale, à laquelle il appartient, aura toujours les moyens et les relations nécessaires pour inscrire ses enfants dans de bons établissements, qu'ils soient publics ou privés. Tout se passe comme si la caste au pouvoir se réservait le dessus du panier, laissant le fond pour les enfants des autres, tout cela enrobé de bons sentiments. De nouveaux privilèges ont remplacé les anciens : peut-être faudra-t-il que notre République fasse sa nuit du 4 août...

Philippe Kerlouan
Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

Vos commentaires

27 commentaires

  1. Si Pap Ndiaye et ses fonctionnaires faisaient du bon boulot, les gens ne mettraient pas leurs enfants dans le privé.
    Plutôt que d’essayer de réparer l’éducation publique sous sa direction, le ministre décide de casser le privé, afin de ne pas paraître ridicule en comparaison.
    Le problème c’est que la France ne risque pas de décoller des abysses du classement PISA avec cette méthode, du coup, même en sabotant le privé, il ne pourra pas cacher sa nullité.

  2. Il ne se trompe pas; c’est Macron qui s’est trompé en le nomment ministre de l’éducation nationale, je ne suis pas surpris, ni l’un ni l’autre n’aiment notre France.

  3. Les engagements de l’Enseignement catholique sont déjà tous pratiqués . Pap Ndiaye devrait actualiser ses références. Une des raisons du succès de ces établissements, pas des moindres, les enfants sont suivis de très prêt, les parents alertés lorsqu’il y a décrochement, voire convoqués. L’enseignant n’agit plus en fonctionnaire. L’intérêt de l’enfant est sa priorité . L’enfant est considéré quel que soit son niveau. Il y a presque un lien affectif entre enseignant et élèves. La Direction de l’Etablissement joue un grand rôle dans ce fonctionnement. Les enseignants ont des objectifs mais ils sont très soutenus, guidés, réorientés. Pour couronner le tout, un bon esprit d’équipe est entretenu par fêtes, jeux et rassemblements divers dans lesquels toute la communauté participe.

  4. C’est vrai que certains parents n’ont pas la carrure économique qui leur permettrait de sortir leurs enfants de l’enfer de l’école publique (elle ne fut pas toujours le cul-de-basse-fosse qu’elle est devenue aujourd’hui, sous les coups de boutoir d’une administration ignoble et d’enseignants poussant le rose et le rouge jusqu’à l’écarlate, et friands des théories fumeuses des pédagogistes). Pour aller vers plus d’enseignement et d’instruction de qualité, vers l’Ecole Privée, congréganiste ou non. Si cette école privée reste un symbole de qualité, c’est justement qu’elle perpétue ce qu’avait de meilleur l’école publique il y a maintenant près d’un demi-siècle (et auparavant, bien entendu, comme au temps des Hussards Noirs de la République). Or le fossoyeur actuel du système éducatif français veut imposer la mixité dans le privé. Non pas pour favoriser les gens qui n’y ont pas accès pour des raisons économiques (ce serait infiniment louable de sa part) mais pour y déverser une partie de ce qui pollue l’école publique, jusques et y compris ces millions de jeunes qui n’ont rien à faire de l’éducation et de l’instruction, ils ne sont pas venus pour ça.

  5. L’enseignement privé. Survivra grâce au courage des parents qui feront de l’éducation de leurs enfants une priorité en plus de l’instruction et de la discipline .

  6. « Pourquoi, au lieu de vouloir appliquer au privé ce qui ne fonctionne pas dans le public, ne pas appliquer au public ce qui marche dans le privé ? » Parce que c’est incompatible avec le socialisme, dont le but ultime est le nivellement par le bas. Il y est presque arrivé en France.

  7. Aucune confiance dans ce type ! il montre tout les jours sa volonté de destruction de l’enseignement public et même privé en introduisant partout ou il le peut des représentants du wokisme et des acteurs transgenres – Cet homme n’est pas à sa place ;

  8. Tout est mis en oeuvre pour mettre en place une société à deux étages: une classe dirigeante lettrée, polissée ploutocrate et la plèbe taillable et corvéable à merci, nouveaux esclaves.

Commentaires fermés.

Pour ne rien rater

Revivez le Grand oral des candidats de droite

Les plus lus du jour

L'intervention média

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois