Macron le Petit commémore Napoléon le Grand en s’autocélébrant
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On aime ou on n'aime pas Napoléon : ce n'est pas nouveau ! L'Élysée semblait avoir donné le la en indiquant à l'AFP qu'il s'agissait de « regarder en face » cet « être complexe », en n'étant « ni dans l'hagiographie, ni dans le déni, ni dans la repentance », autrement dit en pratiquant le « en même temps » habituel. Sur ce point, on ne fut pas déçu, mais ce qui ressort le plus de son discours, c'est sa tentative de récupérer Napoléon. Il est vrai que, lorsqu'on est un Président qui risque de ne laisser dans l'Histoire d'autre trace que son impéritie, on ne peut qu'espérer glaner un peu de la grandeur des chefs d'État dignes de ce nom.
Xavier Darcos, chancelier de l'Institut de France – et ancien ministre de l'Éducation nationale – fit un discours de circonstance, dans la forme comme dans le fond. Jean Tulard, membre de l'Académie des sciences morales et politiques, expliqua qu'entre la « légende dorée » et la « légende noire » de Napoléon, il était difficile de s'y reconnaître, mais que l'historien ne jugeait pas et qu'il fallait toujours replacer les faits dans le contexte de l'époque. La route était tracée.
Emmanuel Macron prend alors la parole en citant une phrase de Napoléon lui-même : « Les vraies conquêtes sont celles qu'on fait sur l'ignorance. » Belle entrée en matière, qui laisse présager qu'il croit et veut faire croire qu'il y a en lui quelque chose de l'Empereur. Il parle d'une « commémoration éclairée ». Il n'oublie pas de rappeler que Bonaparte a rétabli l'esclavage, « trahison de l'esprit des Lumières », et qu'il se préoccupait peu des « personnes humaines », mais cite aussitôt, pour équilibrer son propos, l'« œuvre de progrès » que constituent le Code civil, le Code pénal, la création des grandes écoles...
C'est là qu'il commence à se prendre pour Napoléon. Il prononce cette phrase, dont il a travaillé le rythme et les sonorités : « De l'Empire nous avons renoncé au pire et de l'empereur nous avons embelli le meilleur. » Le voilà parti dans une série d'éloges dont on se demande s'il les attribue à Napoléon ou à sa personne. « La vie de Napoléon est une ode à la volonté politique », « une invitation à prendre son risque ». Et de continuer : « Sa vie est une épiphanie de la liberté », il sut « incarner l'ordre », « rechercher sans cesse l'unité et la grandeur du pays ». Ce fut « l'acteur résolu d'une synthèse nationale ». Tout un programme. Est-ce l'approche de la campagne présidentielle ? Manifestement, il se rêve en Napoléon.
Finalement, il a laissé les médias et son entourage annoncer qu'il regarderait l'Histoire en face. Curieusement, il n'a guère insisté sur les côtés sombres de Napoléon mais fait preuve d'une mesure qui ne lui est pas coutumière quand il parle du passé de la France. Ce n'est pas, cette fois, Benjamin Stora qui lui a inspiré son discours. Sans doute ne voulait-il déplaire à personne, mais il voulait surtout pouvoir persuader qu'il est capable d'endosser le génie et la volonté de Napoléon. Laissons-le à ses illusions : la réalité le rattrapera vite. Il mériterait qu'on lui destine ce vers de Victor Hugo, dans Les Châtiments : « Toi, son singe, marche derrière/Petit, petit. »
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