Louise : un jour, les mères (et grand-mères) françaises descendront dans la rue

Plus encore que de la peur, il y a la colère.
©JeanBexonBV
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Peur sur la ville, c’est le titre d’un Belmondo célèbre. La séquence que nous vivons depuis samedi - depuis qu’une fillette de 11 ans a été tuée dans un bois de l’Essonne, sauvagement massacrée par des dizaines de coups de couteau - pourrait s’appeler « Peur sur le pays ». Trop, c'est trop. Sauf que, contrairement au film, ce n’est pas un criminel qui sème la terreur mais tout un système.

Quand l’Histoire, dans quelques dizaines d’années, peut-être quelques siècles, écrira sur l’Occident en plein déclin, c’est sur l’abandon de ses enfants que le jugement sera le plus sévère. Le refus inexplicable de les protéger. L’idéologie qui nous gouverne est une nouvelle religion, avec ses dogmes contre lesquels il ne faut pas blasphémer, ses grands prêtres, ses anathèmes, ses bûchers de sorcières. Et comme dans les temps antiques, on offre des victimes propitiatoires : on préfère sacrifier nos enfants que mettre en colère la déesse idéologie.

Le Dragon

Frontières ouvertes, antiracisme justice laxiste… c’est un peu le dragon à trois têtes de la pièce russe d'Evgueni Schwarz, interdite en son temps par Staline : une ville est tyrannisée par un dragon qui réclame tous les ans une jeune fille, et la population s’est habituée à cette idée. Chaque année, les habitants sont très angoissés - l'enfant de qui sera choisi ? - mais ils l’acceptent tristement comme une fatalité : comment faire autrement ? La population pourrait reprendre son destin en main, mais elle préfère sacrifier des jeunes filles au dragon. Il faut qu’un chevalier vienne de l’extérieur terrasser la bête et leur faire honte : vous vous êtes regardés ? Comment pouvez-vous laisser faire ça ?

Ce n'est pas toujours la même tête du dragon qui dévore : celle des frontières pour Lola, Philippine, Thimoty ou encore Laura et Maurane, celle de la justice laxiste pour Anne-Lorraine, Céleste et Agnès. La liste n’est pas exhaustive.

Le collège, c’est le moment où l’enfant que l’on tenait par la main jusque-là prend son envol, acquiert un peu de liberté, de responsabilité. Il l'attend souvent avec impatience. C’est très limité, c’est le chemin de l’école, court et balisé. les parents pensent maîtriser le risque. Ou le pensaient, en tout cas.

Petit à petit, les Français changent leurs habitudes. Ce lundi, près de l’école de Louise, les policiers ont sécurisé le chemin. Les parents se sont débrouillés pour accompagner leurs enfants, mais s’ils doivent faire à l’avenir tous les trajets comme quand ceux-ci étaient tout petits, ils vont devoir s’organiser sur le plan professionnel. Le mode de vie des familles ordinaires est en train de basculer. Et ce n’est pas neutre. Dans La Dynamique de l’Occident, de Norbert Elias, on comprend que nos sociétés sont devenues prospères parce qu’elles se sont pacifiées, la défense et la justice étaient déléguées à l’État, chacun, débarrassé de ce souci, pouvait vaquer à ses occupations : le commerçant faisait du commerce, l’artisan de l’artisanat, etc. C’est, du reste, ce qui manque encore à d’autres sociétés, à l’autre bout du monde, dominées par la violence dans les rapports sociaux. Comment construire quoi que ce soit de durable quand on est tout occupé par sa survie et celle de sa famille ?

Les Français, pour travailler correctement, ont besoin de savoir leurs enfants à l’abri. Les conséquences d’une insécurité omniprésente sont lourdes. La civilisation a entraîné la dynamique de l’Occident, la décivilisation porte son délitement. Y compris économique.

Colère

Mais plus encore que de la peur, il y a la colère.

Pour preuve le témoignage, ce lundi, dans les médias, d’une mère de famille dont le fils est dans la classe de Louise et qui témoigne, les larmes aux yeux. Elle parle de sidération, d’incompréhension, de peur, et de « colère ». Elle voudrait « que l’État français prenne ses responsabilités, car son premier devoir, dit-elle, est de faire en sorte que sa population soit en sécurité. Or, force est de constater que ces derniers temps, ça ne marche pas. »

L’État français, au plus haut sommet, en la personne d’Emmanuel Macron, qui avait si fortement réagi pour Nahel, n’a pas bronché pour Louise. Il passait pourtant, dimanche soir, à la télévision. C’était l’occasion. Sa mort, à elle, ne serait donc pas « inexplicable » et « inexcusable » ? Quelques heures plus tôt, dans un catapultage de calendrier malheureux, il publiait, sur son compte Instagram - pour parler d'intelligence artificielle, puisqu'un sommet sur le sujet se tient actuellement -, un florilège de « deep fakes » autour de sa personne, comme s’il se complaisait dans ces pitreries. « J'ai fait cette petite vidéo pour essayer de vous remonter le moral » - c’est ainsi qu’il introduit l'affaire. Se rend-il compte de l’effet produit ? Pense-t-il qu’il suffise de se montrer avec un nez rouge et la perruque de Bozo le clown pour consoler les Français de l’effondrement de leur pays et du massacre de leurs enfants ? Pour l'intelligence artificielle, on ne sait pas, mais s'agissant de la bêtise naturelle, on peut en exporter des quintaux.

Ce matin, sur X, une certaine Yolande, grand-mère du Quercy ne postant habituellement sur son compte que des recettes de cuisine, est sortie de ses gonds : « Je suis prête à descendre dans la rue pour la première fois de ma vie en tant que mamie pour crier ma colère et ma peine pour tous ces enfants massacrés, il faut que cela cesse. Je veux protéger mes cinq petits-enfants. » Ce sont peut-être, à la réflexion, les mères et les grands-mères qui vont finir par terrasser le dragon !

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Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

111 commentaires

  1. Il est possible que des femmes commencent à descendre dans la rue mais n’oublions pas que cette situation est essentiellement causée par les femmes aussi: laxisme dans l’éducation des enfants en repoussant le patriarcat, assistantes sociales qui poursuivent les pères qui veulent éduquer leur gosse, députés qui s’autorisent à penser que la fessé, c’est pas bien, magistrature excessivement féminisée et qui pratique maintenant l’empathie plutôt que la justice,…etc…. Les pays du BRICS+, qui pratiquent toujours le patriarcat pur et dur (voir la table ronde de leur récente réunion) n’ont pas nos problèmes.

  2. Qu’elles commencent à descendre dans les bureaux de vote pour mettre le bon bulletin ces braves citoyennes moutonnières !

  3. Notre petit Ange LOUISE n’a pas retenu l’attention de Macron….. elle ne s’appelle pas NAHEL !
    R A P P E L E Z -vous lorsque ce petit voyou est décédé…. Macron a pris la parole tout de suite, a demandé à l’Assemblée Nationale de faire une « minute de silence ». Concernant le policier a dit : faute inexplicable, inesxcusable et le policier auteur du tir mortel est resté QUATRE mois en prison !!!

  4. Tant que Macron ne sera pas sorti de l’équation politique RIEN ne changera dans ce qui reste de ce « pays » . Nous sommes gouvernés par des incompétents , des pleutres et des tartufes coutumiers de la forfaitures et de la perfidie . Ce pays ne changera pas tant que cette politique dévastatrice sera en action ; il faut littéralement changer de politique et également changer celle de « l’europe » ; MAIS avant tout changer les gougnafiers à la tête de cet état déliquescent .

  5. Si cela peut servir à lutter contre cette violence prédatrice, les grand’pères descendront également dans la rue mais au risque de me répéter, la seule chose à faire pour que cesse cette barbarie, c’est de rétablir d’urgence la peine capitale ou d’appliquer sérieusement la perpétuité, celle qui vous laisse derrière les barreaux jusqu’à la fin de la vie. Par rapport à ce que font ces assassins, j’estime que c’est une douce sanction. Comme déjà dit également, pour civiliser le genre humain et quelle que soit la couleur de peau, cette sanction est la seule qui convienne.

  6. Mais quelles mères ou grand mères dans ce pays où la mode est de refuser les naissances « parce que ça déforme » ? Illusion selon moi , vœu pieux . Yolande n’y est pour rien sans doute mais combien en connaissez vous et combien de petits enfants leur doit-on ? Nous attendons notre dixième arrière-petit des douze petits enfants dont je m’honore mais nous sommes des octogénaires rares et heureux parents de quatre familles qui paient notre retraite et celle de nombre de membres de notre génération. La France est en perte de vitesse : elle va décrocher !

  7. Madame si vous descendez dans la rue, je suis prêt à vous emboiter le pas, comme bien d’autres je suppose, car j’ai des petits enfants qui peuvent être victimes de ces « VIOLEURS et TUEURS »./.

  8. Le chef de l’ Etat, hautain, narcissique , cabotin ne pense qu’ à se mettre en scène. Le meurtre d’ une jeune fille bien éduquée et sans souci ? Mais , hélas, comme pour d’ autres semblables innocentes victimes , il sait aussi que pas même une boite à lettres sera arrachée ! Alors, prendre la parole….Autant laisser la tâche  » à la fachosphère » C’ est bien pratique…  » Là, c’ est bien moi »….Puisqu’il le dit

    • A ce jour, alors que la France entière est sous le choc, notre petit président n’a dit mot ! PIRE ! Il s’est amusé à se mettre en scène avec l’IA ! ….PITOYABLE …aucune empathie, cet « adulescent » n’aurait jamais dû accéder à ce poste. il n’a pas la carrure d’un président ! il est tellement émerveillé par sa propre intelligence !

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