L’incident du divan : la révélation d’un désastre
L’humiliation infligée par le dictateur islamiste turc aux représentants de l’Union européenne ne devrait pas susciter le moindre reproche envers Erdoğan. Il a été fidèle à lui-même, affichant, avec sa grossièreté coutumière, son idéologie fondée sur les retrouvailles entre le nationalisme turc et l’impérialisme musulman. Il joue son rôle, celui d’un ennemi, non d’un partenaire. Le véritable sujet de scandale, c’est l’Union européenne.
D’abord, cette visite au sultan était-elle opportune ? Il s’agissait de renouer des relations après une période de tensions. Le mot « tensions » est le type même d’euphémisme qu’emploie le faible lorsqu’il ne veut pas affronter avec lucidité le comportement inacceptable du fort. La Turquie occupe illégalement un tiers du territoire d’un membre de l’Union, la République de Chypre. Cette situation devrait suffire pour que l’Union n’ait avec le pouvoir turc que des relations strictement nécessaires et distantes, mettant clairement fin à l’hypothèse d’une intégration de la Turquie à l’Europe. Celle-ci pratique le chantage à l’immigration, a annexé de fait une partie de la Syrie, est intervenue dans les opérations militaires qui se sont déroulées en Libye et contre les Arméniens - dont elle refuse de reconnaître le génocide de 1915. Elle exerce une pression intolérable sur la Grèce et sur Chypre, tente de s’emparer des ressources énergétiques qui se situent dans le domaine maritime de ces États. Enfin, elle entretient avec la population turque immigrée en Europe un rapport de domination qui constitue une ingérence intolérable. Le retrait de la Turquie de la Convention d’Istamboul sur la prévention de la violence contre les femmes et les enfants semble, cependant, le seul sujet d’inquiétude des âmes sensibles européennes. Ce n’est qu’un détail cohérent avec le reste. Comment est-il possible que les Européens soient d’une pareille lâcheté ?
L’incident du divan est, en fait, beaucoup plus grave que l’affirmation du sexisme islamiste. C’est la révélation, à ceux qui l’ignoraient encore, que l’Union européenne est un désastre. Non seulement elle est politiquement soumise aux États-Unis, mais dans son idéologie et dans ses actes, elle affaiblit les nations européennes, surtout les plus importantes. Idéologiquement, l’Union européenne ne veut pas être une puissance et se refuse aux rapports de force ; autrement dit, elle nie sa raison d’être et la réalité de toute politique. Le spectacle offert par Mme von der Leyen, debout, interloquée et reléguée ensuite sur un divan au même niveau qu’un ministre turc, c’est l’image de l’impuissance européenne.
Quelle est la légitimité des deux « représentants » européens humiliés à Ankara ? L’une est un ancien ministre allemand proche de Mme Merkel, l’autre est un ancien Premier ministre belge qui occupa ce poste grâce à la tambouille politicienne, spécialité de ce pays qui peut se passer de gouvernement central pendant longtemps, tellement celui-ci compte peu. À la tête du parti libéral wallon, minoritaire en Wallonie, elle-même minoritaire en Belgique, il a néanmoins été Premier ministre. C’est la signature du pacte de Marrakech qui a mis fin à la coalition étrange qu’il conduisait. Pas étonnant qu’il ait voulu signer ce texte favorable à l’immigration ! Cet homme, même lorsqu’il s’assoit, il se couche ! En l’occurrence, à peine assis, le goujat a étiré ses jambes et affiché une satisfaction rayonnante.
C’est vrai que jouer un rôle de premier plan dans un tel décor devait satisfaire l’ego d’un histrion de petite envergure qui n’en espérait pas tant dans ses rêves les plus fous. Un homme bien élevé aurait cédé son siège et mis Erdoğan dans l’embarras. Lui ou elle, les deux ensemble, auraient dû transformer volontairement l’incident en crise diplomatique en mettant fin à la mise en scène turque et en quittant le théâtre. Mais que voulez-vous ? Les personnages propulsés au premier rang de l’Europe sont systématiquement des gens évincés chez eux : Barroso, Juncker, Tusk, Michel. Il n’ont aucune légitimité face à de vrais élus, mais débordent du bonheur d’avoir joué à qui perd gagne !
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