Les affaires Polanski : entre sadisme et puritanisme

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Le cinéaste Roman Polanski ne cesse de faire les frais des différentes accusations de viol portées contre lui depuis des décennies. Le 26 novembre dernier, le cinéma TAP Castille de Poitiers, comme d’autres dans le reste de l’Hexagone, a déprogrammé la projection de son dernier film J’accuse, consacré à l’affaire Dreyfus. Et, cette dernière suscitant encore beaucoup d’émois au sein de la population française, il n’est pas surprenant de constater que ce dernier opus du réalisateur franco-polonais ait déjà attiré plus de 500.000 spectateurs. Mais, au-delà du personnage comme de ses crimes sexuels, on ne peut ignorer le basculement psychosociologique qui s’est réalisé, en France, entre l’ère du « vivre sans temps mort, jouir sans entraves » et celle de « couvrez ce sein que je ne saurais voir ». Pour de bonnes comme pour de mauvaises raisons, Polanski est la pièce rapportée de ce changement de paradigmes.

Samantha Geimer, Valentine Monnier, Charlotte Lewis et Renate Langer, tels sont les noms des accusatrices de l’idole de la gauche caviar française. La première affaire de viol le concernant est celle provoquée, en 1977, aux États-Unis, par la plainte de Samantha Gailey (aujourd’hui épouse Geimer), âgée seulement de 13 ans à l’époque. Polanski avait, dans un premier temps, plaidé coupable pour détournement de mineure, mais finit par quitter les USA, voyant la persistance du procureur à son égard. Puis la dernière accusation est venue, récemment, de la Française Valentine Monnier, le cinéaste l’ayant violée, en 1975, en Suisse, selon ses propos rapportés par Le Point.

Alors, quel est l’arrière-fond idéologique de cette « libération de la parole » ? À la faveur d'une conception partiale, voire partielle, de la sexualité, les libéraux-libertaires ont assimilé le sexe au pouvoir, voire la libido à la puissance. Dans cette perspective, les producteurs (comme Harvey Weinstein, PDG de Miramax de 1979 à 2017) ainsi que les réalisateurs des studios californiens, appartenant à une génération prompte à s'enrichir dans la jouissance, ne pouvaient que considérer qu'ils étaient devenus des seigneurs, autrement dit que tout leur était dû, si ce n'est autorisé. On oublie, cependant, que cette vision de la sexualité remonte à bien au-delà de la libération des mœurs de la fin des années 60.

Ce sont d'abord les Lumières qui ont prôné la démocratisation des pratiques sexuelles, qui étaient, jusque-là, celles de l’aristocratie, à l'instar du marquis de Sade (1740-1814) qui avait déclaré, entre autres, dans Français, encore un effort si vous voulez être républicains : « Je dis donc que les femmes, ayant reçu des penchants bien plus violents que nous aux plaisirs de la luxure, pourront s’y livrer tant qu’elles le voudront […] je veux que les lois leur permettent de se livrer à autant d’hommes que bon leur semblera […] je veux que la jouissance de tous les sexes et de toutes les parties de leur corps leur soit permise comme aux hommes… »

À vrai dire, du libertinage français à la gauche californienne, il ne devait y avoir qu’un pas. In fine, c'est la génération du « sexe, drogue et rock’n’roll » qui est en train de régler ses comptes avec elle-même. Et les idées libérales étant devenues folles, l'imaginaire hollywoodien s'en retrouve totalement déboussolé. Résultat : le cinéma occidental est désormais obligé de ne faire que dans le genré et le racisé, ou à inventer des mots pour ne plus dire les choses.

Henri Feng
Henri Feng
Docteur en histoire de la philosophie

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