L’épargne des Français va-t-elle financer la course à l’armement ?

canon caesar

Ce mardi 5 mars 2023, le Sénat a voté en faveur d'une redirection d'une partie de l’épargne des Français vers l’industrie de l’armement. À 244 voix contre 34, la droite sénatoriale est assez unanime. Et Vanina Paoli-Gagin, du groupe Les Indépendants, de centre droit, salue l’initiative. « C'est une solution efficace à court terme pour accélérer le passage à une véritable économie de guerre. » Mais l'écologiste Thomas Dossus s'inquiète : « Vous voulez financer les marchands de canons en prenant dans le livret avec lequel les Français pensaient financer le logement ou le développement durable », dit-il.

Ce financement concernerait le livret A et le LDSS, livret de développement durable et solidaire. Sont concernés non pas les fonds dédiés à 60 % au logement social mais l'épargne non centralisée dédiée aux PME, à la transition énergétique ou encore à l'économie sociale et solidaire (ESS). Logiquement, ces investissements devraient rentrer dans la catégorie PME, ce qui exclut les quelques fleurons industriels de défense qu’il nous reste : Safran et Thalès.

Mais la perspective garde des contours encore flous : « Le calendrier parlementaire reste à être fixé », selon Victor Fouquet, chargé de mission au Sénat sur les questions de budget et de finances au groupe centriste. « De même pour le niveau d’encours, déterminé par le ministère des Armées et de l’Économie. » La part de l’épargne fléchée sur l’industrie de la Défense est donc incertaine.

L'argent, nerf de la guerre

Il faut reconnaître que l’État a des progrès à faire pour doter son armée afin de garantir sa souveraineté en cas d’attaque ou pour asseoir nos capacités si le président de la République se décide à traduire en actes ses déclarations va-t-en-guerre. « Il n’y a pas de consensus aujourd’hui pour envoyer de manière officielle, assumée et endossée des troupes au sol. Mais en dynamique, rien ne doit être exclu », avait lancé Emmanuel Macron.

Déjà, la France a beaucoup fait profiter l’Ukraine de son armement. Il s’agit de véhicules de l’avant blindés, de canons tractés, de chars légers. Ce sont aussi de petits équipements tels que des radars, les jumelles de vision nocturne, des munitions ou du carburant. Ce sont, surtout, 18 canons CAESAR (camions équipés d’un système d’artillerie) sur 76, deux lance-roquettes unitaires livrés sur 13, ce qui représente une ponction conséquente dans le stock français. Le député Thomas Gassilloud, président de la commission de la Défense, prévient : « Il faut qu’on analyse la capacité à assumer ce soutien dans la durée et les impacts que ce soutien peut avoir sur nos propres forces armées. »

Les députés inquiets eux aussi

Les députés Natalia Pouzyreff et Jean-Louis Thiériot l'ont fait : ils tirent la sonnette d’alarme sur le niveau résiduel de l’emblématique défense sol-air de la France. Ils s’appuient sur un rapport mission flash en date du 15 février 2024 sur les stocks de munitions et la défense sol-air, rédigé par les députés Vincent Bru et Julien Rancoule. « Il est probable que la France souffre d’un véritable manque d’épaisseur, potentiellement critique face à un adversaire riche en munitions et déterminé. En réalité, intercepter l’ensemble des missiles ciblant des objectifs critiques pourrait s’avérer difficile après quelques salves », déplorent les députés. Selon ces quatre élus, la France serait incapable de tenir un conflit de haute intensité en l’état actuel des choses. Avec des munitions déjà réduites à une portion congrue du fait de coupes budgétaires datant de nombreuses années, l’aide à l’Ukraine n’a rien arrangé.

Le budget alloué à l’armée doit donc être dopé. L’État l’a déjà fait passer de 43,9 à 47,2 milliards d'euros hors pensions en 2024. Mais cela sera-t-il suffisant pour non seulement combler son retard, compenser ses dons généreux mais aussi pour s’engager un peu plus ou à corps perdu dans la guerre contre la Russie ? Quoi de mieux, alors, que de puiser à la source chez les particuliers pour rattraper son inconséquence ou nourrir son appétit belliqueux à travers les entreprises de l’armement et de la défense ?

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Gabriel Decroix
Étudiant journaliste

Vos commentaires

47 commentaires

  1. « L’UE c’est la paix » qu’ils avaient dit, en réalité l’UE c’est la guerre assurée par une poignée de mafieux !

  2. Après une gestion calamiteuse du Covid où le mensonge a pris le pas sur la raison, nous voilà dans la suite de l’aventure où l’on mène les français, et les européens, par la peur.
    A les entendre c’est chose acquise, nous allons entrer en guerre contre la Russie. Tous nos dirigeants et leur cour de pleutres des deux Chambres, hormis qques rares mohicans, nous préparent à l’économie de guerre… et à la guerre.
    On annihile totalement les causes de l’opération militaire russe allant défendre les deux régions autonomes du Donbass suite à la non application des traités de Minsk en 2014.
    La saga du mensonge poursuit son triste et mortifère chemin.
    Où es tu peuple de France ? Eteins ta télé et ouvre grand les yeux et ton cerveau sur les réseaux alternatifs !

  3. Stop aux délires ! Je n’ai jamais donné mon accord pour ça ; je vais tout retirer pour mettre sous mon matelas et le poids de mon corps,ma laborieuse épargne de 40/10 ans mise de coté et exclusivement destinée à mes enfants/ petits-enfants ( logement, meubles, vacances)…

  4. Quand on voit la nullité de tous ces gouvernants depuis 7 ans, on peut s’attendre à tout.
    Mais attention qu’ils ne touchent pas à notre épargne à nos enfants.

  5. Dans les années 1950/1970, quand l’Etat avait besoin de fonds, il lançait un Emprunt Garanti pa lui-même, à un taux supérieur de 4 à 5 points à l’inflation ( qui n’existait quasiment pas, ) et qui avait des sous pouvait y souscrire… j’ai connu beaucoup d’ouvriers qui prenaient sur le livret Caisse d’Epargne pour prendre ces Bons émis par l’Etat et qui rapportaient beaucoup plus. Échéances à 8 ans si j’ai bonne mémoire… mais maintenant, plus personne n’a confiance en l’Etat

  6. L’épargne des français, me semble-t-il, a été sollicitée lors de la guerre de 14-18 lorsque la France a été attaquée et partiellement envahi par l’Allemagne. Un conflit avec des forces en présence extrêmement importantes sur notre propre sol.
    On n’est absolument pas dans la même situation, et même si les caisses de l’état sont vides, il serait certainement possible de trouver des fonds ailleurs.

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