Législatives en Angleterre : Brexit or not Brexit ?

En politique, il n’est donc jamais rien d’écrit, même ces lois fondamentales données pour être non écrites. Ainsi, et ce, depuis plusieurs mois, la vague populiste frappant Europe et USA était donnée comme tendance lourde, élection de Donald Trump et victoire du Brexit obligent. Mais il y eut aussi échec en Autriche, aux Pays-Bas et en France, avec une Marine Le Pen qui se prend le tapis dans la dernière ligne droite, alors que donnée largement gagnante au premier tour de l’élection présidentielle. Comme quoi...

Avec les élections législatives anglaises et anticipées de ce jeudi dernier, courbes et dynamiques n’en finissent plus de s’inverser. La conservatrice Theresa May, certes Premier ministre en exercice et égérie du Brexit, totalise 42,32 % des suffrages, contre 40,29 % à son adversaire Jeremy Corbyn, incarnation de l’aile gauche des travaillistes, quoique lui aussi partisan de ce même Brexit, mais pas tout à fait pour les mêmes raisons.

Ainsi, et histoire de résumer à grands traits, on dira que, pour May, l’Europe bruxelloise n’est pas assez libérale et que, pour Corbyn, elle n’est pas assez sociale. Un peu comme en France – pour une fois que ce sont les Anglais qui nous copient –, là où l’on vit l’affrontement de deux populismes à la fois convergents et contradictoires, ceux de Jean-Luc Mélenchon et de Marine Le Pen. Ici, c’est Emmanuel Macron qui a raflé trente-six fois la mise. De l’autre côté de la Manche, c’est déjà un peu plus compliqué, faute d’éventuel plan B.

En effet, ce scrutin a causé la mort quasi clinique de deux autres forces politiques alternatives. Les indépendantistes écossais du SNP, furieusement anti-Brexit, dont les voix sont en forte baisse, mais dont l’électorat s’est mobilisé afin de faire chuter Theresa May. Et, surtout, UKIP, tête de gondole de l’euroscepticisme, mais dont le président, Nigel Farage, a cru bon d’abandonner un peu trop tôt le combat, juste après la victoire du même Brexit. C’est ballot, comme aurait pu dire Napoléon à Waterloo.

Du coup, ce bloody Brexit sera-t-il mis oui ou non en œuvre dans sa phase finale de négociations ? Il est évidemment trop tôt pour le dire, sachant qu’au pays des Rolling Stones et de la conduite à gauche, on n’a jamais vraiment rien fait comme les autres… Chez les partisans d’une sortie définitive du Vieux Continent, certains estiment qu’il faudra bien rendre, en livres sterling sonnantes et trébuchantes, à l’Europe ce que l’Europe leur a naguère donné. Puis les autres, partisans d’une politique bancaire à la Philippe le Bel, lequel ayant rasé la banque et foutu le feu au banquier, assurent qu’une telle politique permettrait que cette dette se trouve de facto effacée ; tactique bourrue mais efficace. Dans un cas comme dans l’autre, les intérêts supérieurs de la City ne devraient pas en être durablement affectés plus que ça.

En toile de fond, il y a encore une future et envisageable recomposition du paysage politique britannique : euro-compatibles de gauche comme de droite, face à des patriotes de droite comme de gauche, les premiers tentant de conserver un passé ne faisant plus envie à personne ; les seconds envisageant un avenir faisant peur à tout le monde. Nous en sommes actuellement là en Angleterre, mais ce pourrait être la même chose en France. C’est d’ailleurs un peu le cas.

Hello Goodbye, chantaient les Beatles. Cette chanson paraît être toujours d’une singulière et brûlante actualité.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 09/01/2020 à 20:02.
Nicolas Gauthier
Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

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