Le système énergétique français est revenu à la normale : l’hiver sera paisible

Ampoule électricité

Il y a un an, l’hiver s’annonçait sous de funestes auspices. Alors que la moitié des réacteurs nucléaires français étaient à l’arrêt pour diverses raisons techniques, la réduction des importations en gaz russe (représentant 40 % de l’approvisionnement européen avant le conflit russo-ukrainien) faisait craindre une pénurie de gaz en Europe. Aussi, fin 2021, les prix de l’électricité principalement indexés sur ceux du gaz atteignaient des sommets avec un MWh dépassant les 400 €.

Imprévoyance de l’exécutif, incompétence d’EDF, égoïsme de l’Allemagne ou incohérence de l’Europe, chacun chercha alors une explication compatible avec son agenda idéologique. La crainte d’un hiver rigoureux et de black-out électriques récurrents était dans toutes les bouches. Les annonces chocs se multiplièrent avec, en filigrane, un mot clé : sobriété énergétique ! Certains conseils, comme le célèbre col roulé de Bruno Le Maire ou le sèche-linge de Gilles Le Gendre, frisèrent le ridicule. Pourtant, l’hiver se déroula finalement sans le moindre black-out électrique. Comment est-on passé en un clic de l’enfer au paradis ?

Un hiver 2023 clément, quelques importations et des faillites industrielles

Les Français ont, certes, répondu aux vœux de l’exécutif en baissant leur consommation d’électricité de 9 %. Mais cette baisse est d’abord et avant tout le résultat d’un hiver particulièrement clément durant lequel le pic de puissance électrique a rarement dépassé les 70 GW, soit 30 % de moins que le pic historique de 100 GW atteint lors de la période de grands froids de février 2012. Parfois, le réchauffement climatique représente aussi une chance !

Historiquement exportatrice, la France a abondamment importé de l’électricité de ses voisins allemand, italien, espagnol, belge et suisse. Quant au déficit de gaz russe, il a été en grande partie compensé par du gaz naturel liquéfié américain importé à grands frais. Rappelons, au passage, que l’Oncle Sam nous fournit du GNL principalement fabriqué à partir de ce gaz de schiste pourtant considéré jusqu’il y a peu comme le diable absolu en Europe. Comme le système électrique européen abondamment vilipendé, le diable a aussi des vertus dans certaines circonstances. Enfin, cette baisse de consommation correspond à un net ralentissement de l’activité économique associé à un nombre record de faillites d’entreprises en 2023 : selon le cabinet Altares, le nombre de faillites d’entreprises en 2023 devrait atteindre 55.000, soit le double de 2021 !

2024 : sérénité et retour des exportations d'électricité

Les funestes auspices 2023 ont aujourd’hui disparu et les Français peuvent entrevoir l’hiver énergétique 2024 avec sérénité. Les stocks de gaz sont remplis à 100 % et le GNL américain continue de couler à flots au point que les terminaux ne peuvent plus suivre et que les méthaniers doivent parfois attendre plusieurs semaines en mer avant de livrer leurs cargaisons. Quant à la disponibilité du parc nucléaire, elle est pratiquement revenue à la normale, avec des perspectives de production comprises entre 300 et 330 TWh en 2023, contre 279 TWh en 2022.

Enfin, malgré la sécheresse qui a touché la France, début 2023, le niveau de remplissage des lacs de retenue hydraulique se situe, aujourd’hui, au-dessus des moyennes historiques ce qui permettra une forte disponibilité de cette électricité à la fois décarbonée et bon marché pour cet hiver. Enfin, en cas de coup de froid, les centrales au charbon de Cordemais et Saint-Avold pourront être appelées en renfort.

En conséquence, d’importatrice l’hiver dernier, le France est redevenue largement exportatrice d’électricité avec des volumes d’exports journaliers régulièrement compris entre 5 GW et 10 GW et pouvant atteindre, certains jours de faible demande, 15 GW, notamment en cas de fortes périodes de vent comme ce fut le cas au cours du mois de décembre. Cela fait l’affaire d’EDF mais aussi de nos voisins allemands qui, après avoir fermé leur dernière centrale nucléaire, importent l’électricité décarbonée française pour éviter de brûler du lignite. Ce qui démontre, une fois encore, l’absurdité de l’Energiewende (transition énergétique allemande) !

Les prix du gaz ayant fortement baissé au cours de l’année 2023 (le MWh était coté, début janvier 2024, à 32 € alors qu’il avait atteint 150 € en novembre 2022), les prix de gros de l’électricité indexés sur ceux du gaz se sont également fortement réduits. Ainsi, fin 2023, le prix du MWh électrique oscillait entre 50 € et 100 €/MWh, une valeur huit fois inférieure à celle d’il y a un an.

La facture énergétique ne baissera pas pour autant

Les nouvelles sont donc rassurantes, aussi bien sur le plan de l’approvisionnement que sur le plan économique, et il n’y a pas inquiétude quant à la possibilité de pénuries de gaz ou de black-out électriques au cours de cet hiver. À ces bonnes nouvelles vient s’ajouter celle des gaz à effet de serre : sur les neuf premiers mois 2023, ils ont baissé de 4,5 % par rapport à 2022. Et pourtant la France, championne du monde toutes catégories, continue d’être attaquée sur sa politique énergétique par des ONG fondamentalistes.

Ombre au tableau : le Français ne verra pas, pour autant, sa facture énergétique baisser dans la mesure où les hausses vertigineuses de 2022 avaient été en grande partie amorties par les boucliers tarifaires. Conformément aux annonces de l’exécutif, ces derniers ont été logiquement supprimés début 2024.

Philippe Charlez
Philippe Charlez
Chroniqueur à BV, ingénieur des Mines de l'École polytechnique de Mons (Belgique), docteur en physique de l'Institut de physique du globe de Paris, enseignant, expert énergies à l’institut Sapiens

Vos commentaires

16 commentaires

  1. Ces O.N.G dites fondamentalistes n’ont plus de crédit auprès du grand public. Nous avons frôlé la catastrophe, mais notre appareil de production est resté, certes en sommeil et proche de l’extinction, mais en l’état pour repartir. Maintenant en avant pour les nouvelles technologies nucléaires avec « ITER ».

  2. Dans ses vœux le président se félicitait – entre autres – de la mise en place du tarif unique de l’électricité en Europe. Les Français, particuliers, artisans, industriels qui ont vu avec cette pure merveille administrativo-européenne bondir leur facture apprécieront le décalage entre le discours et la réalité. Oui l’Europe est un objectif souhaité par la majorité du peuple européen mais pas cette Europe technocratique et hypertrophiée qui a totalement oublié de travailler à sa mission fondamentale : l’harmonisation fiscale et l’harmonisation sociale. Depuis la création de l’Euro, le bilan est vite fait sur des deux points : NADA.

  3. Vive le Réchauffement climatique ! Contrairement à ce qu’on veut nous faire croire, celui-ci est une chance (à condition de ne pas compenser avec une trop grande climatisation l’été)

  4. Bizarrement l’affaire des explosions du gazoduc de la Baltique est à présent lettre morte, pourtant a tous les niveaux c’est grave. Même l’accusation que la Russie se serait sabordé n’a pas tenus la route alors a qui le crime profite, bonne question et le prix de l’énergie rien que chez nous ne serait pas si élevé qu’actuellement. Pourtant le pétrole Russe trouve toujours ses clients.

  5. Avec la guerre en Ukraine, les américains sxe gavent et sont en train de détruire l’économie européenne, ce qui est leur but suprême.

  6. Normal, la plupart des gens ne se chauffent quasiment plus vu les prix. L’hiver est plus que doux et ça c’est aussi à prendre en compte Perso j’habite dans les haux de France, j’ai une température de 12 environ et je ne chauffe pas, je me couvre et puis c’est tout. Beaucoup autour de moi, font pareil, il faut faire un choix, se chauffer ou se nourrir, Merci macron.

  7. Le prix de l’énergie s’effondre mais en février l’électricité doit augmenter de 10 %, donc par une pirouette notre bon Bruno va continuer à empocher notre argent !
    Peut-être même songe t-il à augmenter les taxes sur le carburant pour compenser la baisse importante du prix du baril ?
    Nous avons un ministre très efficace pour remplir les caisses de l’état avec la TVA, y compris la TVA sur la TVA…

  8. Incompétence du président incapable de gérer quoi que ce soit et qui a fermé notre meilleure centrale nucléaire sous la pression de l’Allemagne . Faire peur , en profiter pour augmenter les tarifs et surtout le nombre de faillites par la faute de ce gouvernement .

    • Ce n’est nullement de l’incompétence ! Il est le vassal de l’Allemagne et des américains, qui ont réussi à obtenir que nos ports acceptent leurs méthaniers et leur gaz de schiste (mesure glissée dans une loi fourre-tout il y a deux ans) ! Nous continuons à payer l’électricité plus chère alors que nous en exportons, et l’Allemagne, avec la complicité de Macron, veut la peau d’EDF !

      • Si ce n’était encore que la peau d’EDF qu’elle voulait, non elle veut tout et notre président obnubilé par son avenir européen s’en accommode fort bien.

  9. « Historiquement exportatrice, la France a abondamment importé de l’électricité de ses voisins allemand, italien, espagnol, belge et suisse ».
    Quand on pense que pour ses vœux Narcisse 1er a osé dire que la France avait 10 ans de retard et qu’elle aurait bientôt 10 ans d’avance… Notre Génie des Carpettes a simplement omis de mentionner que ces 10 ans de retard (en réalité plus de 30 ans de retard) résultaient de la politique énergétique de Jospin, puis de celle de Hollande et enfin de celle de notre actuel souverain.
    Il est grand temps de renvoyer ce pouvoir de dangereux idéologues incompétents à Pole Emploi.

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