Le prochain 007 sera une femme noire ? Hystérie à tous les étages !
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C’est bien connu, personne ne saurait décemment arrêter le progrès. Ça progresse donc, dans l’industrie cinématographique, à l’ébaudissement général des médias qui s’empressent de claironner la bonne nouvelle : le prochain 007 sera une femme, Lashana Lynch, et pas n’importe quelle femme, cette actrice étant noire de peau. Un petit plus artistique, dira-t-on.
Pourtant, que les féministes ne s’emballent pas trop vite, s’agissant d’un CDD et non point d’un CDI, et Lashana Lynch n’étant là qu’intérimaire. En effet, dans Mourir peut attendre, film déjà deux fois repoussé, et que le spectateur n’en finit plus d’attendre, l’agent 007, connaissant un petit coup de mou le forçant à quelques semaines de repos en Jamaïque, doit être d’urgence remplacé à titre provisoire. Rien à voir, de fait, avec un quelconque grand remplacement, pour paraphraser l’ami Renaud Camus.
Au fait, qui est Lashana Lynch ? On l’a récemment vue dans le Captain Marvel, blockbuster planétaire réalisé par Anna Boden, aux côtés de Brie Larson dans le rôle-titre. Bizarrement, à sa création en 1967 par Stan Lee, Captain Marvel, personnage de bandes dessinées, était un homme. Nous sommes formels sur la question : il mettait son slip par-dessus son pantalon – un signe qui ne trompe pas –, alors que, dans la version revisitée sur grand écran, l’actrice n’enfile pas sa culotte par-dessus ses collants ; ce qui, pour une fille, ferait tout de même un peu désordre.
Revenons-en à Lashana Lynch : « Le rôle de Noire que je représente doit être authentique à 100 %. » Tiens donc, « Noire » serait devenu un rôle. « Agente secrète », oui, mais « noire »… Alors, pourquoi tant de tintouin ? Car ce n’est pas la première fois qu’une femme noire est en bonne place d’un générique bondien. Dans Vivre et laisser mourir, de Guy Hamilton, par exemple, la délicieuse Gloria Hendry, agente de la CIA, s’abandonne dans les bras de Roger Moore sans que cela ne fasse une telle histoire ; sauf en Afrique du Sud, il va sans dire. Mais nous sommes en 1973 et l’apartheid y règne encore en maître. Mais en Europe et ailleurs ? Rien.
Lashana Lynch, encore : « Je suis une femme noire. Je dois juste me rappeler que la polémique viendra et que je fais partie de quelque chose qui sera très, très révolutionnaire. » Ah bon ? Qu’elle soit une « femme noire », on le saura et le détail n’avait échappé à personne ; mais pour le reste…
Pour le reste, de 1964 à aujourd’hui, Hollywood a produit près de deux cents films, tous genres confondus, souvent réalisés par des Noirs et dans lesquels Noires et Noirs tiennent le haut de l’affiche. Cela a même un nom : la « blaxploitation ». En revanche, cette dernière était naguère pétrie de fierté assumée, à rebours de l’actuelle pleurnicherie généralisée. Ça, c’est le vrai changement.
Ainsi, dans la série des Shaft, l’immense Richard Roundtree, qui incarne un pendant noir du très blanc inspecteur Harry, a plutôt tendance à régler les problèmes de racisme à coups de flingue qu’à coups de téléphone au standard de Black Lives Matter. Tout pareil pour la sublime Pam Grier avec une autre série, Coffy, la Panthère noire de Harlem, où elle joue une infirmière qui, pour lutter contre les dealers, incline plus à la maîtrise du fusil à pompe qu’à celle de la rhétorique victimaire. Bref, suivant le mot d’ordre de la chanson de James Brown, « I’m Black and I'm Proud », les Noirs étaient alors fiers de l’être et n’en étaient pas non plus de gauche pour autant ; loin, très loin s’en fallait, car pratiquant souvent un cinéma hautement réactionnaire.
Il ne serait pas idiot que Lashana Lynch et ses fans se penchent sur un livre ou deux consacrés au septième art, au lieu de se laisser bercer par l’air du temps. Surtout en plein deuil de Sean Connery, interprète historique de James Bond, issu de cet autre peuple persécuté que furent les Écossais et qui, lorsqu’il portait le kilt, ne cherchait pas forcément sa part de féminité.
PS : À destination des prêtresses du culte féministo-antiraciste, on allait oublier la renversante Halle Berry, dont la peau caramélisée embellit Meurs un autre jour, aventure de l’agent 007 où elle partage l’affiche avec Pierce Brosnan. Devant le succès de ce film, il fut même question que son personnage, Jinx, bénéficie d’une série de films parallèle à ceux de James Bond. Une fois de plus, personne n’a attendu Lashana Lynch…
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