Le milliard des radars 

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Nous avons appris, jeudi 24 mai, que les nouveaux radars « ont généré un milliard d’euros », soit un tiers de plus que l’an dernier. Bien sûr, cela va encore augmenter avec ces compagnies privées qui n’auront rien d’autre à faire que de sillonner en permanence les routes pour choper les malheureux qui, avec l’abaissement de la limite de vitesse à 80 kilomètres/heure, seront évidemment, eux aussi, plus nombreux.

Les présentateurs du JT annoncent ça avec une mine réjouie. La seule chose qui les choque, c’est que - d’après la Cour des comptes - cet argent va en grande partie au remboursement de la dette au lieu d’aller à l’amélioration des conditions de sécurité. 

Alors nous, ce qui nous choque, c’est que pour être allés à 96 au lieu de 90, et demain à 87 au lieu de 80, on nous enlève un point. Et que la vitesse à laquelle on perd les maigres douze points de notre permis est vertigineuse. Surtout si, inquiète, on a répondu une fois en voiture à un appel urgent de la nounou alors que bébé avait 40 de fièvre. « Prendre dans la main son iPhone » vous enlève trois points d’un coup...

Or, sans permis, vous ne pourrez plus rouler. C’est-à-dire vous déplacer, travailler, aller chez le médecin, faire vos courses... Vivre, enfin. 

Alors, cet argent, Messieurs les présentateurs du JT, nous, on préfère encore qu’il serve à rembourser la dette plutôt qu’à acheter de nouveaux radars.

Avez-vous déjà, réduits à deux points et, donc, au bord de la catastrophe, fait des stages de rattrapage de points ? Au bout de trois stages et 900 euros dépensés – 300 euros par stage -, vous aurez sans doute constaté :
1) Que ça ne sert à rien. 
2) Qu’on y rencontre les gens les plus toniques qui soient.
3) Que le 2 explique le 1. Un esprit libre reste un esprit libre, et il ne deviendra pas, du jour au lendemain, un papy Mougeot qui vit à 30 à l’heure.

Vivement une « appli » qui proposera de vous conduire partout et tout le temps en prenant pour elle amendes et retraits de permis. Illégal ? Peut-être, mais est-il légal, est-il constitutionnel même, compte tenu de la Déclaration des droits de l'homme de 1789 qui forme le préambule de la Constitution, de restreindre autant la liberté de circulation des citoyens ? D’instaurer un impôt déguisé frappant les seuls automobilistes ? La gabelle, l’impôt sur les portes et fenêtres, tous ces abus de l’Ancien Régime tant dénoncés réapparaissent. Au moins, à l’époque, ils finançaient Chambord, puis Versailles. Là, ils financent la dette mais aussi « le budget de l’État » et, donc, les dépenses somptuaires des directeurs d’Air France ou de la SNCF, entreprises qui nous font subir grève sur grève, entravant eux aussi... notre liberté de circulation ! Ainsi que les indemnités des maires de grandes villes qui laissent les nids de poule, racines d’arbre et autres avanies rendre les rues dangereuses, et autorisent les vélos à brûler les feux, rouler à contresens et monopoliser des voies de circulation qui permettaient, jusqu’ici, aux voitures de traverser leur ville à peu près normalement.

Le milliard des radars provoquera-t-il la révolte, comme la hausse du pain en 1789 ? À la légitime colère d’automobilistes pressurés, rackettés, sans emploi car sans permis répondra-t-on « S’ils n’ont plus de permis, qu’ils prennent des chauffeurs de maître » ?

Catherine Rouvier
Catherine Rouvier
Docteur d'Etat en droit public, avocat, maitre de conférences des Universités

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