Après un report d’une semaine du fait du décès d’un ancien président de la République, M. Macron est donc venu à Rodez porter la bonne parole de sa réforme des retraites.

Dès potron-minet, alors que le Président n’était attendu qu’en début d’après-midi, la préfecture de l’Aveyron était en état de siège. Université fermée, circulation interdite dans tout le centre-ville, CRS à tous les carrefours. Même les élèves du lycée à proximité de la salle des fêtes étaient contraints à un grand détour pour se rendre en cours.

Le Président venait aussi décorer de la Légion d’honneur le maire de Rodez, Christian Teyssèdre. Il paraît que leurs épouses sont copines comme cochon, elles se téléphoneraient tous les jours. Mais ce qui motive la décoration de l’édile, c’est qu’il a soutenu celui qui n’était encore que candidat à la fonction suprême, en trahissant son parti d’origine, le PS. C’est une conception paradoxale de l’honneur.

Les participants au débat, sélectionnés parmi les lecteurs des quotidiens du groupe La Dépêche (du radical Baylet, soutien de la première heure également), ont vu arriver M. Macron vers 19 h. Après une longue introduction pour expliquer que sa réforme des retraites était la réforme ultime, celle qui préservera les retraites pour les décennies à venir et au-delà, parce qu’elle institue une retraite « à points » (le pluriel est important), les participants purent poser leurs questions.

Enfin, certains. Et pas n’importe quelle question. On les avait bien prévenus : pas de questions autres que celles portant sur les retraites. La prolifération des éoliennes dans le département ? Hors sujet. La disparition des services publics, des transports en commun ? Idem. Le mépris affiché du ministre de l’Éducation nationale envers les enseignants au mois de juin ? Même motif. Et même punition : le micro sera coupé.

Et sur les 500 invités, seuls quelques-uns pourront poser leur question. Les professions libérales vont-elles y perdre ? Non, c’est une retraite à points. Quelle sera la valeur du point ? Il faut en discuter, l’important est que c’est une retraite à points. L’âge de départ ? Il faut voir, on peut imaginer un âge légal et un âge pivot, rien n’est fixé, mais de toute façon, ce sera une retraite à points. Une retraite à points, vous dis-je, une retraite à points. Pour le reste, wait and see.

Le sommet de la soirée fut atteint quand une enseignante s’inquiéta de la retraite des professeurs. M. Macron annonça qu’actuellement, un professeur retraité touchait en moyenne 1.200 € par mois. Flottement dans la salle. Jean-Paul Delevoye, à ses côtés, lui montre sur son téléphone la réalité, plutôt 2.600 bruts mensuels. Réponse du Président : « Oui, c’est à peu près ce que j’ai dit, 1.200, 2.600, ce n’est pas loin. » On n'est quand même pas à 1.400 euros près ! C’est quoi ? Un repas en tête-à-tête avec Brigitte au Fouquet’s. Ne chipotons pas. Tout le symbole d’une fracture entre le peuple et ses dirigeants.

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04 octobre 2019 à 21:21

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