L’Assemblée face à l’Élysée

assemblée nationale
Entre les deux palais, une place de la Concorde qui n’a jamais aussi mal porté son nom. Entre l’Élysée et l’Assemblée nationale, la place qui a vu la tête de Louis XVI tomber. En France, on aime la contestation mais on est surtout avide de symboles, et ceux-ci foisonnent.
Dans une ambiance de fin de règne, Élisabeth Borne a activé, visiblement à contrecœur, l’article 49.3 permettant au gouvernement de valider un texte de loi sans passer par l’assentiment d’une majorité absolue qu’ils n’ont jamais vraiment eue. Quelques jours auparavant, en conférence de presse, Marine Le Pen répondait à BV qui lui avait demandé si elle était favorable à l’abrogation de cet article, comme le souhaitait la NUPES : « Le 49.3 est un outil permettant de passer outre une majorité indisciplinée, il est aujourd’hui détourné pour piétiner les oppositions. » Ce fut visiblement le cas, jeudi : malgré le souhait affiché du Premier ministre, d’Olivier Véran et d’Emmanuel Macron, la majorité était trop ténue pour prendre un tel risque. « Certains députés LR ont joué une carte personnelle », a déploré Mme Borne sur TF1, jeudi soir. Ces députés, citons par exemple Ian Boucard, Fabien Di Filippo, que BV interviewait jeudi, ou encore Pierre-Henri Dumont, élus dans des territoires de la France périphérique, derniers bastions à résister à la pression électorale de la gauche extrême et du RN, ont préféré rentrer vaincus que complices du vote d’une loi massivement rejetée par l’opinion.

Jeudi, donc, comme le prévoit la loi, l’Assemblée a entériné le principe d’une motion de censure qui, si elle est votée, entraînera la chute du gouvernement Borne et, si Emmanuel Macron tient ses engagements (pour ne pas dire menaces), provoquera la dissolution de l’Assemblée nationale. Une énième utilisation du 49.3 qui a entraîné une énième motion de censure, qui sera énièmement rejetée, serait-on tenté de croire. La donne pourrait toutefois changer, cette fois : déposée ce vendredi par le groupe Liberté et Territoires (réputé non partisan), cette motion pourrait être cosignée par la NUPES, le RN et une part non négligeable de députés LR.

Les comptes

Pour obtenir la majorité absolue à l’Assemblée nationale, il faut 287 députés. Les voix cumulées de la NUPES et du RN atteignent 237 voix. Rajoutons les 20 voix du groupe LIOT, nous atteignons 257 voix. Sur les cinq députés non inscrits, trois voteront probablement la motion, Adrien Quatennens, Véronique Besse et Nicolas Dupont-Aignan. Cela fait 260 voix. Cela, évidemment, dans l’hypothèse où il n’y aurait aucun accident de vote et aucun empêchement. Il faudrait donc, pour l’opposition, convaincre une trentaine de députés LR. L’hypothèse de voir les frondeurs de la majorité voter la fin de leur propre gouvernement est, à l’heure où nous écrivons, très peu probable. Mais combien de députés LR seraient prêts à voter la fin de ce gouvernement en allant même contre la volonté du président du parti Éric Ciotti et du président de leur groupe Olivier Marleix ?

Quelle marge pour Emmanuel Macron ?

Motion ou non, Emmanuel Macron va-t-il dissoudre l’Assemblée nationale ? L’utilisation du 49.3 a froissé une partie de sa majorité et les troupes renâclent. Signe de fébrilité, le député Renaissance Aurore Bergé a même demandé des protections supplémentaires concernant les parlementaires. Élisabeth Borne avait, récemment, déclaré qu’elle acceptait de servir de fusible,  mais « un remaniement ne suffirait pas », croit savoir un membre de la majorité. Reste l’hypothèse d’une dissolution qui serait un pari hautement risqué. Du côté du RN, on attend ce scénario avec impatience. « Les députés du RN le clament haut et fort depuis des jours, ils n’attendent que cela », précise un collaborateur de député non inscrit. En effet, dès la rentrée de septembre, Jordan Bardella avait affirmé que le parti avait préparé un « Plan Matignon » activable dès l’annonce de la dissolution. Cette dernière pourrait, en effet, s’avérer très favorable pour le Rassemblement national.

Et surtout catastrophique pour Les Républicains. Si aucun scénario de dissolution ne prévoit sérieusement de renversement de majorité, si le RN se renforce au détriment de LR, c’est la marge de manœuvre de l’exécutif qui se réduira encore. Le Mozart de la finance n’est définitivement pas un Berlioz de la politique.

Marc Eynaud
Marc Eynaud
Journaliste à BV

Vos commentaires

19 commentaires

  1. Pour les manifestations à Paris, ce n’est pas à la Préfecture de dicter si les français ont le droit ou pas et d’imposer l’endroit. A ma connaissance s’est le peuple français qui payent les fonctionnaires des préfectures en France et pas nos politiques racailles. Alors chers manifestants si les champs Elysée ou l’Elysée sont appropriés alors il n’y a pas à discuter.
    Les gendarmes et la police devront également admettre que c’est le peuple français qui les rémunèrent. Nos politiques corrompus profitent de nos deniers pour payer leur protection alors qu’ils devraient payer la note avec leur argent.

  2. Je savais bien depuis 2008 que la France n’était plus vraiment à Droite. Donc Macron restera à l’Elysée….qu’est ce que la Droite ? C’est le Parti qui privilégie la France d’abord même si elle est dans l’U.E., sauve son Régalien, applique les résultats de Référendum, ne fait pas des Dettes au niveau de nul autre pays, donc rendu soumis….Fait tout pour le travail, la sécurité, ne met pas son Armée et son Nucléaire entre des mains étrangères, et d’abord ne prend pas ses ordres d’ailleurs….

    • Si Pompidou n’a pas fait « grand chose » c’est parce qu’il n’en a pas eu le temps ! … Par contre, ses suivants ont largement favoriser tout ce que vous décrivez et macron l’a fait de façon exponentielle ! …
      La FRANCE est vraiment mal « barrée » car il suffit d’entendre les commentaires des députés de tous bords prouvent une énième fois qu’ils ne sont pas là POUR LA FRANCE mais bien pour leurs intérêts personnel et/ou familial ! …
      Cet auto proclamé « premier de cordée » s’est gaussé de nommer son parti « En Marche » avec ses initiales et hurler « c’est mon projet » à son meeting de lancement … La FRANCE n’a jamais été si en arrêt ! … et si fracassé dans tous ses pans régaliens … macron a l’infamie de la corde qui dit à son pendu:  » je suis ton seul soutient ! … »
      macron coûte un pognon de dingue et il va devoir payer pour tout ce qu’il a fait depuis qu’il est dans le « sérail politique », auprès de sarkozy en 2005…

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