La campagne de Christiane Taubira ? Une affaire qui roule !

Quand, dans les siècles à venir, les ethnologues se pencheront sur ce qu’était la gauche du début de ce troisième millénaire, ils n’auront pas fini de se claquer les cuisses de rire, voire de se perdre en conjectures sur le cataclysme quasi surnaturel ayant entraîné la mort de ces dinosaures électoraux. Et c’est probablement plus que perplexes qu’ils retraceront les grandes heures de la Primaire populaire ayant donné lieu à la très résistible ascension de Christiane Taubira.

Au fait, quelles sont les nouvelles de cette dernière ? Avec un sens de l’humour qu’on ne lui connaissait pas, le quotidien 20 Minutes affirme : « Les choses ne se présentent pas bien pour Christiane Taubira. » Honnêtement, on ne voit pas pourquoi. À 3 % dans les sondages, elle poursuit son concours de lancer de nains avec Anne Hidalgo. Avec 47 parrainages, on voit bien que les fameux 500 paraphes, c’est quasiment inzepocket. Lâchée par le Parti radical de gauche, on sent qu’enfin, l’avenir se dégage pour elle et qu’elle va avoir les coudées franches pour mener sa campagne, seule et tel qu’elle l’entend.

Pour Guillaume Lacroix, président du PRG – à lui comparé, le GUD est un mouvement de masse –, le parti politique en question est allé « au bout de sa démarche ». C’est-à-dire pas très loin. Toujours à l’en croire, « il n’y a pas de cassure, pas de rupture » avec Christiane Taubira, son seul but ayant été d'« accompagner une dynamique de rassemblement à gauche ». Avec sept candidats de gauche, c’est effectivement le carton plein, côté « rassemblement ». La preuve, c’est qu’un certain Christian Paul, « chargé de projet » de la candidate, est plus optimiste que jamais, à en croire cet entretien accordé à France Info, ce 14 février : « Avant comme après la Primaire populaire, qui a été un moment où plus de 400.000 personnes ont fait le choix de Christiane Taubira, on a assisté à des campagnes de dénigrement de cette initiative citoyenne, à des tentatives d’intimidation et de verrouillage des parrainages. Les radicaux de gauche ont tiré leur conclusion. Nous en tirons avec Christiane Taubira la conclusion qu’il faut continuer cette très belle campagne. » Devant un tel exercice d’autopersuasion atteignant des proportions manifestement hallucinogènes, nul doute que les ethnologues plus haut cités se diront sûrement, et ce, non sans raison, qu’à l’état-major de notre nouvelle Jeanne d’Arc, on ne buvait pas que de l’eau minérale.

Et notre barde de poursuivre, façon chanson de geste : « Il y a aujourd’hui une candidate qui est une candidate pour la justice, qui fait le choix de ne pas être otage des partis politiques. » Là, au moins, c’est réussi, ces mêmes partis ne paraissant pas particulièrement conquis par la dimension sacrificielle de l’ancien garde des Sceaux. Dans un accès de lucidité, Christian Paul note toutefois : « Nous allons mener cette deuxième étape de la campagne avec beaucoup d’enthousiasme, parce qu’elle a ce réservoir d’enthousiasme dans le pays. » Fort bien ; quoi qu’il soit, toutefois possible que nous n’habitions pas le même « pays » que lui ; ou, hypothèse à ne pas exclure, que Christian Paul se soit tout bêtement trompé de « pays ».

Heureusement, sachant que nous sommes malgré tout en France, tout se finit, ou commence, pour Christiane Taubira, une fois encore en chansons, tel qu’en témoigne son entrée en campagne, lors du meeting de Créteil, ce 12 février, quand elle massacre en direct « Ma France », de Jean Ferrat. Un grand moment de politique et d’art brut. Elle se croit à l’Olympia, mais on a l’impression de regarder le Muppet Show. Insurpassable. Il fallait le faire, elle l’a fait. De l’humour guyanais, sans doute.

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