Jean-Pierre Raffarin : les humoristes ont encore de beaux jours devant eux !

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L’avantage du « dégagisme », qu’il soit macronien ou pas, c’est que cela fait au moins du ménage. Adieu, Juppé. Exit, Fillon. Bye bye, NKM. Salut, Vallaud-Belkacem. Ciao, Barouin. So long, Valls.

À ce défilé de morts-vivants politiques ne manquait plus qu’un trophée, le plus beau, le plus emblématique, le plus rigolo, aussi, même à son corps défendant : Jean-Pierre Raffarin, qui raccroche enfin les gants ; gants n’étant pas de boxe, mais juste ceux, de toilette, servant à se récurer les orteils dans un bain de pieds.

Pourtant, le bougre aura tout fait pour se raccrocher aux branches du Sénat. Manifestement, ce sursaut humaniste autant que républicain n’a pas suffi à lui faire intégrer les rangs de ces Républicains en marche, sachant que la présidence de cette vieille chambre aux tapis à la laine si épaisse et si rouge qu’ils étouffent le bruit des coups de feu et noient la couleur du sang lui échappera une fois de plus : Gérard Larcher, à qui on ne la fait pas, est déjà passé par là. Bref, Jean-Pierre Raffarin se retire, au risque de ne pas satisfaire madame.

Inépuisable, l’homme qui aura globalement tout foiré de sa vie politique – Premier ministre chiraquien aussi épais qu’une chaussette à trous – et, surtout, homme posant à l’éternel recours d’une droite en quête de valeurs, alors que tout le monde le fuyait, un peu comme ces photographes évitant d’immortaliser, sur leurs clichés, tontons farceurs à coussins péteurs et autres plaisantins pour noces et banquets.

Jean-Pierre Raffarin a pourtant de la ressource, ayant annoncé son retrait officiel de toute forme de politique "élective" – ce qui tombait assez bien en l’occurrence –, il devrait tôt se recycler, à l’instar de certains vieux écologistes, dans ces ONG humanitaires permettant de briller encore en ville ; enfin, dans les sous-préfectures, pour être plus précis. D’où la création prochaine de l’association Leaders for Peace.

Déjà, c’est en anglais et ça commence mal. Ensuite, que l’on soit plus pour la paix que la guerre ne relève en rien du concept politique inédit. Pourtant, ne boudons pas notre plaisir. Les amuseurs de music-hall ne se comptent plus par dizaines et il convient de choyer les ultimes représentants du genre.

En effet, qui d’autre que Raffarin aurait pu signer ces répliques immortelles, dont mêmes les fantômes d’Henri Jeanson et Michel Audiard devraient être jaloux ?

"Notre route est droite, mais la pente est forte…" Puis - culture oblige -, appelant aux muses poétiques d’une Lorie, chanteuse de cours de récréation du siècle dernier pour Lolita en devenir, oser prôner la "positive attitude". Oui, qui d’autre que lui ?

D’autres raffarinades, encore : "Les jeunes sont destinés à devenir des adultes" ; "L’avenir est une suite de quotidiens""Les veuves vivent plus longtemps que leurs maris". Dans un registre plus ésotérique encore, ces deux perles. "Il vaut mieux un bilatéral approfondi qu’un multilatéral confus." Certes, même si le meilleur demeure cette profonde maxime prononcée lors du référendum européen de 2005 : "The yes needs the no to win against the no!" Alors, là… même le regretté Alfred Jarry n’aurait pas osé.

Le départ de ce turlupin a évidemment provoqué les salutations de circonstance, certains regrettant le départ du grand homme voulant prendre du recul, tandis que les autres se tapaient, sous cape, les cuisses de rire.

Il est un fait que Jean-Pierre Raffarin, en nous quittant, laissera un grand vide derrière lui. Sauf que ce grand vide, c’est avec lui qu’il l’emporte.

Mais ne désespérons pas du désamour frappant certains humanistes incompris en retraite anticipée : il paraît qu’on embauche encore chez Jacques Vabre.

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Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

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