Haro sur les kebabs : à Marseille, la reconquête a commencé !
Je me souviens d’une conversation qui remonte à quelques années. J’expliquais à un ami que mon quartier s’acheminait lentement mais sûrement vers la « branchitude ». Il me posa alors cette question :
– Y a-t-il un restaurant japonais près de chez toi ?
– Oui, il vient justement de s’en installer deux…
– Alors c’est gagné ! me répondit-il en rigolant.
À la cuisine japonaise ont succédé les bagels, puis les bars à soupes, puis ont fleuri les petites boutiques bio, puis les supermarchés bio, puis les épiceries fines qui vous vendent 30 euros le petit flacon d’huile parfumée à la truffe… D’ailleurs, c’est simple, dans nos villes à l’économie sinistrée, il ne s’ouvre plus que des commerces de bouche ! Et le standing du commerce en question dit tout du quartier où il s’implante.
C’est pourquoi le kebab qui survivait au bout de ma rue, entre le coiffeur dont le salon est tout droit sorti des années 50 et le fleuriste dont la boutique ressemble à l’écurie de mon grand-père, a disparu. Pourquoi, aussi, le Forum des Halles nouvelle version concentre le fin du fin de la crèmerie et de l’épicerie « à l’ancienne », entre concept-stores, restaurants-librairies et boutiques de créateurs. Pourquoi, enfin, la ville de Marseille vient de lancer la chasse aux kebabs et boutiques de téléphonie mobile qui, au fil des années, ont envahi le centre historique.
Officiellement il n’y a pas, en France, d’emplois réservés, mais, de fait, nombre de commerces sont devenus franchement « ethniques », et si les épiceries fines et les crèmeries sont un indicateur de population majoritairement blanche niveau CSP+, les kebabs et les boutiques de téléphonie signent le même profil que les paraboles aux balcons des HLM : teint hâlé tourné vers l’autre rive de la Méditerranée et La Mecque.
La chose avait été annoncée, elle a été votée en conseil municipal le lundi 26 juin : la municipalité veut que le nombre de snacks, de magasins de téléphonie ou de bazars diminue dans le centre-ville afin de les remplacer par des commerces plus « haut de gamme ». Elle a donc voté un droit de préemption sur les commerces vacants. "L'hypercentre a besoin de plus de restaurants avec terrasses, de boulangeries, d'épiceries... Il faut retrouver des espaces conviviaux", dit une adjointe à L’Express. On recense déjà 15 % de commerces vacants sur le parc existant, et le droit de préemption sur les baux permettra de choisir les nouveaux commerces. La mairie l’assure : il n’y aura aucune expulsion.
Le député Mélenchon va sûrement y trouver à redire, décelant sans aucun doute dans cette démarche un vieux relent d’islamophobie… Qu’importe : à Marseille, la reconquête a commencé !
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