Ils sont tous gaullistes !

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Ils vont venir, ils seront tous là, ou presque. Depuis plusieurs années, Colombey-les-Deux-Églises est devenu très tendance, tous les 9 novembre, date anniversaire de la mort du général de Gaulle. « Tout le monde a été, est ou sera gaulliste », disait Malraux, et le fondateur de la Ve République avait prédit, en ironisant, lors d’une conférence de presse en 1962, qu’après sa mort, ce qui serait à redouter, « ce n’est pas le vide politique, c’est plutôt le trop-plein ! » Le trop-plein, pas tant des idées que des ambitions. Aujourd'hui, si à 50 ans, on n’a pas été candidat à la présidence de la République, c’est qu’on a raté sa vie, pourrait-on dire.

Tout le monde, ou presque, donc, se précipite à Colombey et se revendique, à sa manière, du gaullisme. Chacun, d’ailleurs, se fabrique son de Gaulle bien à soi, comme ça l'arrange. Prenez Anne Hidalgo, fille d’immigrés espagnols ayant fui le franquisme. Jetant un voile pudique sur la visite privée que fit le général de Gaulle, le 8 juin 1970, alors qu’il avait quitté le pouvoir, au Caudillo, elle viendra à Colombey. Ce sera, selon son entourage, une manière de lutter « en creux contre Zemmour, remettre l’Histoire à sa place et le rôle que les étrangers y ont joué », rapporte le journal L’Union. Déposer des chrysanthèmes, à défaut de les inaugurer, devient un acte militant, un combat, une lutte contre la bête immonde. Un petit effort, encore, et Charles de Gaulle sera érigé en défenseur des migrants.

Arnaud Montebourg, lui aussi candidat à la magistrature suprême, ne viendra peut-être pas dans le petit cimetière haut-marnais mais, dimanche, il lançait son appel à lui : « Un appel à tous ceux, des communistes aux gaullistes, qui ont en héritage la France libre et le Conseil national de la Résistance, à aller à Colombey-les-Deux-Églises pour former un mur du silence et faire taire monsieur Zemmour. » C’est beau. Ça ressemble presque au discours du Premier ministre Michel Debré, en 1961, après le putsch des généraux à Alger : « Dès que les sirènes retentiront, allez-y à pied ou en voiture [les chansonniers de l’époque ajoutèrent « à cheval »] convaincre des soldats trompés de leur lourde erreur… » Mais, paraît-il, Zemmour n’ira pas. La cariole de Montebourg restera dans la remise et le cheval à l'écurie.

Bien évidemment, les LR viendront en masse, en meute, comme on disait jadis : les LR de toujours, comme Michel Barnier ou Éric Ciotti, candidats à la candidature, les LR par alternance, comme Valérie Pécresse et Xavier Bertrand, eux aussi candidats à la candidature. Il est vrai que leur mouvement détient un morceau de la vraie croix de Lorraine puisque héritier, par UMP, RPR, UDR interposés, du parti qui soutint, durant ses onze ans au pouvoir, celui qui voulait mettre fin au régime des partis. Que reste-t-il de l'héritage ? Même Jean Castex, ancien LR, sera présent. Lui, mais comme beaucoup d’autres, se dit « gaulliste social ». On ne sait pas vraiment ce que cela veut dire, mais ça en jette. Xavier Bertrand, paraît-il, serait lui aussi « gaulliste social », idem Pécresse. Social, faut voir ; gaulliste, on est pris d’un doute.

Car, finalement, on ne sait plus vraiment ce que veut dire « être gaulliste ». Quand on avait fait Bir Hakeim, comme Pierre Messmer, cela voulait dire quelque chose. Mais aujourd’hui ? La plupart des personnalités politiques qui iront faire leur pèlerinage dans le petit village de Haute-Marne, à l’exception d’un Dupont-Aignan, d’un Philippot (Marine Le Pen n’ira pas à Colombey mais à Bayeux, ville où le général de Gaulle fit un discours en 1946 sur sa vision des institutions), ont, depuis des années, signé des deux mains les différents abandons de souveraineté à Bruxelles. Or, le mouvement originel du gaullisme, c’est le combat pour la souveraineté de la France. Rien d’autre.

Georges Michel
Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

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