Gérald Darmanin, face aux « vérités alternatives » et aux « candidats du passé »

N’étant pas en campagne, il a donc des ministres qui la font à sa place et sont, pour cela, prêts à raconter n’importe quoi.
darmanin

Du temps où l’ex-président Donald Trump sévissait à la Maison-Blanche, il était de bon ton de railler son goût pour les « vérités alternatives ». Nul autre, à en croire intellectuels et médias, n’avait osé, dans l’Histoire, se livrer à pareille pantalonnade. Interdiction de rigoler.

L’expression – exactement alternative facts – était sortie de la bouche de la conseillère Kellyanne Conway après que le porte-parole du président eut affirmé qu’un demi-million de personnes avaient assisté à l’entrée en fonction de Donald Trump, ajoutant même que « jamais autant de monde ne s'était déplacé pour une investiture ». La moitié de l’Amérique ricana grassement et les « faits alternatifs », puis les « vérités alternatives », firent une entrée triomphale dans l’Histoire, étant entendu qu’aucun président n’avait menti avant celui-là.

On épargnera donc au lecteur la longue liste des bidonnages, mensonges, falsifications, scandales et autres coups fourrés qui ont enluminé les belles pages de nos démocraties occidentales, grandes donneuses de leçons de vertu républicaine. Le vilain Trump ayant été chassé par la grande porte (il pourrait bien revenir par la fenêtre), le monde d’en haut peut se remettre à vivre entre soi. Et là, c’est promis-juré-craché par terre, on ne ment pas, on ne ment plus, on n’a jamais menti !

Dans cet aréopage de vertueux personnages, Emmanuel Macron occupe une place de choix. C’est pourquoi il va éviter la guerre en Europe en faisant à l’Ukraine un rempart de son corps puissant. Et c’est pourquoi, ceci expliquant cela, il n’a pas le temps de se pencher sur ces broutilles qu’on appelle « campagne présidentielle ». À quoi cela servirait-il, d’ailleurs, car, comme l’a dit son aboyeuse Marlène Schiappa, « il y a unanimité sur le bilan » (« Le Grand Rendez-vous », dimanche, sur Europe 1 et CNews, le 6 février). Toutefois, devant une Sonia Mabrouk étonnée, Schiappa a précisé : « Je parle du bilan économique, chacun le loue, y compris Monsieur Ménard. » Voilà, en tout cas, une caution qu’on n’aurait pas attendue…

Emmanuel Macron est chanceux : il a manifestement un gouvernement totalement à sa botte et prêt à toutes les vérités alternatives. N’étant pas en campagne, il a donc des ministres qui la font à sa place et sont, pour cela, prêts à raconter n’importe quoi. Ainsi du ministre de l’Intérieur. Invité de « Questions politiques » (France Info, France Inter, Le Monde), ce même dimanche 6 février, Gérald Darmanin a assuré qu’« il n’y a pas un Français qui pense qu’Emmanuel Macron n’a pas été un bon Président ».

Et de tomber à bras raccourcis sur les inconscients qui osent vouloir affronter son champion dans les urnes : « Mme Pécresse, M. Zemmour et Mme Le Pen » sont « des candidats du passé. » Macron, lui, est le candidat de l’avenir, bien sûr. « Il me semble aujourd'hui qu'une grande partie de ce que pense l'électeur de droite, qui veut moins d'impôt, travailler plus, avoir une sécurité de l'emploi et une sécurité dans la rue sans trouver des boucs émissaires chez les immigrés, chez les musulmans, qui n'est pas antieuropéen, qui ne considère pas qu'il faut faire des Guantanamo, qui ne se pose pas de question sur l'IVG […], cette droite soutient le président de la République. » Et, donc, Macron forever.

On se demande, dès lors, pourquoi ledit Macron n’est qu’à 24 % dans les sondages et « les candidats du passé » à 44 % pour peu qu’on additionne les intentions de vote !

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Marie Delarue
Journaliste à BV, artiste

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