Emmanuel Macron face à Bourdin et Plenel : un Président qui tient le choc

Emmanuel Macron a largement gagné aux points ce combat de boxe politique.

Les interrogations souvent comminatoires de Jean-Jacques Bourdin et les questions toujours biaisées d'Edwy Plenel qui avait, comme c'était prévisible, relégué le journaliste pour laisser toute leur place au partisan et à l'idéologue, loin d'affaiblir Emmanuel Macron et de le mettre en difficulté, ont au contraire donné du prix à ses répliques qui parvenaient à se dégager des interpellations importunes qui visaient à les empêcher.

Son argumentation sur les retraités, ses explications renouvelées - après sa rencontre avec Jean-Pierre Pernaut sur TF1 - n'ont sans doute pas convaincu non seulement les retraités eux-mêmes, mais la plupart des téléspectateurs et auditeurs parce que l'objet même de la discussion et le fond de ce sujet se prêtaient mal à une démonstration décisive de la part du Président. Le simple fait d'avoir lésé certains retraités, en dépit de compensations promises, avait une charge négative. Impossible de renverser, sur ce registre, la vapeur.

Sur l'islam, l'islamisme, les fichés S et le terrorisme, sur cette part régalienne où il est jugé, sinon mou, du moins trop précautionneux, scrupuleux, il n'a pas été sans ressort, et sur l'État de droit et les impossibilités d'interdiction ou d'expulsion globales qu'il prescrivait, le Président s'est trouvé à l'aise. Pourquoi, tout de même, ce sentiment d'une retenue presque inquiétante ? Parce que le "en même temps", sur une problématique aussi grave, aussi lourde de sens, n'est sans doute pas la meilleure approche. Lorsque Emmanuel Macron énonce - et on a été heureux de l'entendre - qu'une démocratie doit et peut être forte, sans mauvais esprit la tentation venait de lui suggérer de faire des efforts sur cette dernière exigence.

Mais, à côté de ce domaine, que de morceaux de bravoure !

Sur la justification des frappes en Syrie, même si, un court instant, il a perdu un peu la maîtrise de sa langue avant de s'ajuster au ton roide de ses interlocuteurs et de s'y habituer.

Sur le Président chef des armées et la Constitution qui l'édicte. Avec quelle maestria, offensante pour Edwy Plenel, il a renvoyé celui-ci à son statut d'opposant qui a la liberté de proposer autre chose mais non de battre en brèche ce qui relève de notre loi fondamentale.

Sur l'autorité de l'État à Notre-Dame-des-Landes, où il a réduit à néant les billevesées du même qui questionnait trop comme porte-parole de causes extrémistes, en s'imaginant que toute la France partageait sa vision infiniment fragmentaire, au lieu de s'en tenir au moins à une apparence d'objectivité !

Pour le désordre et les violences dans certaines universités, avec quelle évidence il a mis en exergue le fait qu'ils n'étaient pas le fait d'étudiants mais de groupuscules gauchistes et que la masse des premiers n'était préoccupée que par le souci d'étudier et de passer ses examens !

Sur la SNCF, il a considéré les cheminots, défendu les dirigeants en refusant les attaques personnelles, et développé un discours d'apaisement avec des engagements solennels qui devraient rassurer. Il a jeté de l'eau sur le feu.

Avec quelle patience il a insisté sur la différence entre optimisation ou évasion fiscales et tenté de justifier le maintien du verrou de Bercy !

Avec quel plaisir dévastateur il a pulvérisé le reproche de "duplicité" et le procès intenté par François Hollande !

Toutes ces séquences ont montré un Président au meilleur de sa forme, sûr de sa force et s'offrant le luxe, durant plus de deux heures, de dialoguer sans aucune note avec deux personnalités acharnées, mais en vain, à le faire trébucher !

On verra ce que donneront les sondages officiels, médiatiques. Les miens sont sans équivoque. On a un Président qui tient le choc et, quoi qu'on pense de lui sur le plan politique, c'est bon pour la France.

Philippe Bilger
Philippe Bilger
Magistrat honoraire - Magistrat honoraire et président de l'Institut de la parole

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