Cette phénoménale abstention sera le talon d’Achille de Macron
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Il est des projections trompeuses. On nous promet - et on a toutes les raisons de le croire - un tsunami En Marche ! dans l’hémicycle de l’Assemblée. Mais la réalité du vote est bien différente. Comme le titrait, dès dimanche soir, le site de L'Obs : "Non, ce n’est pas un raz-de-marée en faveur de Macron" : "Jamais un président n’avait obtenu aussi peu de voix lors des élections législatives." Et France Info d’enfoncer le clou, de façon imagée : "Si la France était une commune de 100 habitants, moins de 11 auraient voté pour En Marche !"
Même en ne comptant que les inscrits, avec une abstention historique de 51,29 %, En Marche ! n’engrange que 13,43 %. Moins de la moitié des électeurs participent : il est des assemblées, dans la vie civile, où l’on jugerait ce quorum trop faible pour prendre des décisions. C’est pourtant bien ce qui va se passer dans « l’Assemblée suprême ». Et, mode de scrutin oblige, Emmanuel Macron va, in fine, très probablement rafler 75 % des sièges… avec moins de 14 % des voix. Tout est normal. La France est un exemple démocratique.
En même temps - comme on dit maintenant -, les abstentionnistes sont majeurs et vaccinés, ils n’avaient qu’à se bouger. S’ils se retrouvent pendant cinq ans en marche forcée sous le joug souriant d’un Emmanuel Macron auquel on aura laissé la bride sur le cou, ils n’auront qu’à s’en prendre à eux-mêmes et à leur passivité indolente (il faisait si beau, hier). Non plus la servitude volontaire, mais la servitude velléitaire.
Sauf que l’image d’Épinal du pêcheur à la ligne - qui n’a pu résister à l’irrésistible envie d’aller se mettre au vert, attendu que le lundi au soleil étant une chose que l’on ne verra jamais, on en profite le dimanche ! - est un peu réductrice.
À cette abstention, il y a une raison évidente : si l’électeur ne vote pas, c’est qu’il juge cet acte inutile.
Confusément, inconsciemment, à tort ou à raison, qu’il soit de gauche ou de droite, il pense que "le système" est si fort, si lourd, doté d’une si puissante inertie qu’il n’y a rien à faire. Il y a la droite et la gauche qui alternent depuis des années avec une régularité de métronome sans que la politique menée ne change substantiellement, comme si la France était un paquebot sourd et aveugle lancé à pleine vitesse dans lequel le capitaine ne sert qu’à animer la soirée de Gala... L’appel de la droite à voter pour Macron après le 1er tour de la présidentielle a été le point d’orgue. Il y a le Front national, fortement handicapé par l’absence de proportionnelle et par le quartier d’isolement dans lequel on le tient - où il finit, confort mortifère, par se sentir bien -, qui a montré à la présidentielle, au grand désespoir de ses électeurs, que Marine Le Pen ne serait sans doute jamais Arthur tirant du roc Excalibur. Il y a La France insoumise, dont des figures emblématiques comme Alexis Corbière, d’un pied sur l’autre, se tortillant les doigts, avouent avoir voté au 2e tour pour "le banquier de Rothschild"…
Pour le dire avec moins de circonlocutions, cette abstention est liée à l’intime conviction que l’élection revient à pisser dans un violon. S’autocensurant pour ce moyen d’expression qu’ils jugent sans effet, ils risquent - c’est assez naturel - d’en chercher un autre plus propice. Par exemple, le pavé. Cette abstention ne présage sans doute rien de bon pour le quinquennat d’Emmanuel Macron.
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