Budget : comment Macron dilapide les finances d’une France exsangue

macron roubaix

Qui a concocté le budget 2022, le Président Macron ou le candidat Macron ? La question se pose à peu près aussi crûment pour l’opposition, toutes tendances confondues, après la présentation, cette semaine, des chiffres du budget de l’an prochain. Pour Valérie Pécresse, Emmanuel Macron « crame la caisse ». Pour Xavier Bertrand, cette attitude est « absolument irresponsable ». Éric Woerth, le président LR de la commission des finances de l’Assemblée, dénonce, dans Le Figaro, « une euphorie dépensière ».

En 2022, la France de Macron prévoit des dépenses à hauteur de 494 milliards d’euros, au lieu de 534 milliards prévus en 2021. Mais cette baisse apparente cache en réalité une hausse. « Il faut bien comprendre que depuis le début du quinquennat de Macron, hors relance et urgences, on explose la dépense courante », explique, à Boulevard Voltaire, Agnès Verdier-Molinié, la directrice de la fondation iFRAP, spécialisée dans l’analyse des politiques publiques. Cette dépense courante a bondi à 28,8 milliards d’euros par an depuis l’arrivée de Macron, calcule l’iFRAP. Les autres quinquennats l’ont, eux aussi, augmentée, mais dans des proportions moindres (environ 17 à 21 milliards).

Le boom du budget dédié à la solidarité et l'égalité des chances

Au centre de cette gabegie, la ribambelle des dépenses supplémentaires égrenées par le gouvernement pour revaloriser les personnels enseignants, soignants ou de police, par exemple. Au lieu de jeter des tracts électoraux pro domo, l’hélicoptère de campagne de Macron éparpille quasi quotidiennement des chèques. « On relève des niveaux de dépenses qui ne redescendront jamais, s’alarme Agnès Verdier-Molinié, alors que, dans le même temps, la productivité de notre service public reste très basse. On devrait mettre en face de ces budgets des niveaux d’exigence sur le travail. » Les choix en disent long sur l’état inflammable de la France. Parmi les missions de l’État les plus favorisées depuis l’arrivée au pouvoir de la Macronie, on trouve, selon Les Échos, la défense (de 33,2 à 40,9 milliards), l’enseignement (de 50,6 à 56,5 milliards) ou la solidarité, l’insertion et l’égalité des chances (de 19,2 milliards en 2017 à... 27,5 en 2022 !).

Le gouvernement profite d’une situation exceptionnelle. Alors que la France traverse une crise très grave, il dispose de moyens colossaux, inédits. « Nous sommes dans une période ou l’argent est extrêmement facile, confirme Agnès Verdier. Surtout, le gouvernement s’est ménagé des sortes de cagnottes à dépenser. C’était déjà le cas en 2020 : il avait alors surévalué la récession à 11 % alors qu’elle s’est établie à 8 %. » Résultat : « Il a pu transférer 28 milliards de crédits sur l’année suivante (2021) avec des acrobaties incroyables. »

Macron, généreux à crédit

Le Haut Conseil des finances ne dit pas autre chose… en langue administrative : « Partant d’un niveau plus élevé en 2021, l’emploi et la masse salariale devraient également être plus élevés en 2022 que prévu par le PLF. Du fait d’un probable surcroît de recettes qui en résulterait, le déficit public pour 2021 pourrait être moins dégradé que prévu par le gouvernement (-8,4 points de PIB). Pour 2022, les recettes assises sur les salaires pourraient de même être sous-estimées. » Bref, le budget sent un peu la manœuvre de nuit et l’enfumage général. Du Macron grand cru.

Cette manœuvre et la cagnotte dégagée sont très commodes pour ventiler des budgets dans toutes les directions en année électorale. Si le déficit passera de 8,4 % du PIB, en 2021, à 4,8 % en 2022, la dette publique, colossale, ne baissera que très peu, de 116 % à 114 %, en 2022. Macron est généreux à crédit.

Le calcul politique de ce père Noël intéressé est évident. Moins d’un an avant le scrutin présidentiel, Macron arrose le pays d’un argent venu d’ailleurs et qu’il faudra, un jour, rembourser. « Cette politique coupe les marges de manœuvre du prochain quinquennat », poursuit Agnès Verdier-Molinié. Si le pouvoir doit laisser sa place, le Président suivant sera plombé dès son arrivée par les engagements de Macron. Une drôle de conception de l’intérêt général et du souci de la France.

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Marc Baudriller
Directeur adjoint de la rédaction de BV, éditorialiste

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