Avec Pierre Dac, causerie à bâtons rompus

Pierre Dac

Nous fêtions, le 15 août dernier, les 130 ans de la naissance de Pierre Dac. Autoproclamé roi des loufoques et communément reconnu comme tel, il a enchanté plusieurs générations, des années 1930 aux années 1960, leur donnant, par le plus innocent des rires, celui qui se joue de tout et de rien à la fois, le moyen de conjurer les fantômes de la guerre.

Pierre Dac, bien qu’il soit mort en 1975, peut encore nous parler aujourd’hui, car s’il tire son nom de ce qui fit le cœur de son métier, se saisir de l’actualité, vivre au jour le jour des jours qui étaient hier, notre époque ne lui est pas pour autant étrangère. Car Sa Sérénité incarne le génie de l’intemporel. On en trouve la preuve la plus éclatante dans l’invention du Schmilblick, qui « ne sert absolument à rien et peut donc servir à tout. Il est rigoureusement intégral ! »

Tenez, sur le temps qu’il fait. Dac vous dit tout, vous donne les « prévisions pour le week-end du 15 août, les fêtes de fin d'année et les prochaines fêtes foraines » avec, en outre, « en premier lieu géométrique, et en premier chef-lieu d'arrondissement des angles, le bulletin de la météorologie nationale et privée », par-dessus le marché ! De façon générale, nous pouvons donc envisager ceci : « De nuageux à pas très beau, de pas très beau à plutôt moche, et de plutôt moche à franchement tarte ! » Ce qui permet d’entrevoir en particulier un « ciel généralement couvert, avec éclaircies lui permettant de se découvrir respectueusement devant les cortèges et les défilés de cumulus, de cumulo-nimbus, de cirrus et de sept huit neuf dix onze douze et la suite russe ». Enfin, mais c’est anecdotique, notons les « températures probables, valables pour les régions Nord, Nord-Ouest, Centre indépendant, Sud Aviation, Est républicain et pour l'ensemble des régions plus ou moins limitrophes et périphériques : sous le bras : 37,5 ; sous la langue : 37,6 ; sous-cutané : 37,8 ; sous le paillasson : 39,95 ; ailleurs : suivant le cas ! » Attention, elles ne sont pas de saison !

Voilà pour le bulletin météorologique. En matière de politique, il est clair que nous perdons notre temps. Il passe sans rien changer. Pour Pierre Dac, le problème n’est pas nouveau, puisque « en politique, parler pour ne rien dire et ne rien dire pour parler sont les deux principes majeurs de tous ceux qui feraient mieux de la fermer avant de l'ouvrir ». Il y a donc tout lieu d’écouter ceux qui ont quelque chose à dire, ceux qui savent, car « si un bon averti en vaut deux, deux mauvais averti valent pas grand-chose ».

Pour se dépêtrer de l’embrouillamini faramineux qui assombrit notre quotidien, rien ne vaut la rigueur et la clarté de vue d’un esprit logicien. Écoutez donc Pierre Dac, car il n’a « pas besoin de vous dire que la situation est plus que sérieuse ». Ou plutôt ne l’écoutez pas, puisqu’il est inutile qu’il vous le dise. Contentez-vous de rejoindre « le parti de ceux qui n’ont pas de parti », le Mouvement ondulatoire unifié. « Les temps sont durs, votez MOU ! »

Mais il est bon, parfois, de revenir à l'essentiel, en prenant de la hauteur, et pas l’inverse, car « quand on va au fond des choses… on y reste ! » Montons donc ensemble, voulez-vous, guidés par le sage Sar Rabindranath Duval : « À l’éternelle question qui sommes-nous ? D’où venons-nous ? Où allons-nous ? » le merveilleux génie, qui ne prend pas sa vessie pour une lampe, répond, en toute simplicité : « Je suis moi, je viens de chez moi, et j’y retourne. »

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 19/08/2023 à 11:20.
Jean de Lacoste
Jean de Lacoste
Journaliste stagiaire à BV, étudiant en master d'histoire du droit.

Vos commentaires

18 commentaires

  1. Ne pas oublier les indépassables « Parti de rien et pas arrivé à grand chose, je ne dois de merci à personne », et « Tout est dans tout et réciproquement ».

  2. Pierre Dac et Francis Blanche réunis nous auraient fait quelques sketchs sur le wokisme qui auraient descendu en flèche tous ces malades du bulbe. C’est là qu’ils nous manquent !

  3. Clair que c’était une autre époque. Quelqu’un qui avait dit « Si ma tante en avait, on l’appellerait mon oncle et si mon oncle en était, on l’appellerait ma tante » n’est pas tout à fait dans le wokisme actuel.

  4. On doit beaucoup à ce « diplômé de la faculté de se mouvoir dans l’obscurité de Tel-Aviv », après avoir été « vendeur d’enclumes à la sauvette au marché de Saint-Ouin »!

  5. Souvenirs, souvenirs…
    Même ma chère grand-mère qui n’était pas du genre à s’esclaffer, même en famille, n’aurait pour rien au monde manqué « ce cher Pierre Dac ! »

  6. Merci pour ce panégyrique de Pierre Dac, mon maître cinquante à penser ! Je vais de ce pas, me replonger dans L’Os à moëlle pour vérifier si la pharmacie Lopez est toujours de garde dimanche à Santiago du Chili.

  7. Le livre de Pierre Dac « L’os à moelle » s’il contient des sujets aujourd’hui passé de mode, n’est reste pas moins un monument de la dérision, de l’absurde mais aussi un condensé d’un humour décalé que la génération présente ne peut totalement saisir. Merci de lui avoir consacré votre article et que vive le « Parti d’en Rire ! »

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