Attaque islamiste contre deux policiers à Colombes : le coronavirus n’est pas le seul danger en France, l’aurait-on oublié ?

Il paraît que le symptôme pathognomonique du Covid-19 est la perte du goût et de l’odorat. On constate, de toute évidence, que cet étrange virus fait perdre aussi l’ouïe et la vue. Comme si tous les Français avaient la tête plongée dans un bain de liquide hydroalcoolique. Aucune autre actualité ne les atteint. La tuerie de Romans-sur-Isère est passée, pour ainsi dire, inaperçue. Les émeutes en banlieues n’ont fait l’objet que de quelques entrefilets dans les journaux. Il est donc peu probable que les deux motards de la police nationale intentionnellement renversés, à l'arrêt, à Colombes, lundi après-midi — l’un d’eux est gravement blessé et en coma artificiel -, émeuvent les foules.

Pourtant, il en va de la sécurité des Français comme de leur santé : le coronavirus semble faire le ménage, plus rien d’autre ne semble exister, les urgentistes s’étonnent de voir leurs salles d’attente vides, comme si toute autre pathologie avait disparu. Mais ceux-ci savent bien que ce n’est qu’une illusion : les infarctus n’ont pas obligeamment tiré leur révérence pour céder le pas à la pandémie, ils sont simplement passés à l’arrière-plan, écrasés, occultés. À trop se palper, s’ausculter, s’étudier pour traquer les symptômes du coronavirus, on minimise les autres. Mais ils sont bien là, pourtant, et, continuant de progresser dans l’ombre sans être inquiétés, se vengeront. Les médecins craignent ce rebond.

Les pathologies sociales sont comme les autres : terrorisme et islamisme ne se sont pas évaporés. Voire ont gentiment et surtout tranquillement prospéré.

Youssef T., l’homme de 29 ans arrêté, a déclaré, selon les informations du Parisien, avoir agi « pour l’État islamique », et après « avoir regardé une vidéo sur la Palestine ». Une lettre et un couteau ont été retrouvés dans sa voiture. Sans doute, aussi, était-il un peu stressé par le confinement ? Personne n’a encore osé, mais il ne faut jamais dire jamais.

Qui a suivi l’actualité sent monter, depuis quelques jours, une hostilité « anti-flics » palpable. Envoyés au carton comme ils sont, sans masque ni autre forme de protection, pour faire respecter ce confinement - dont l’une des insignes conséquences est de déranger les petits commerces parallèles, déclenchant l’ire de certains quartiers -, ils ne sont pas applaudis à 20 heures, comme le personnel soignant. Pour eux, c’est double peine : en danger et détestés. Et même menacés, insultés, caillassés. Bien sûr, ils ne sont pas parfaits, de récentes verbalisations point finaudes dans le cadre du confinement viennent de le rappeler. Sans doute certains d’entre eux peuvent même avoir des mots choquants ou injurieux, comme ce « bicot » que l'on peut entendre sur une vidéo postée par l’activiste Taha Bouhafs, et qui a donné lieu à une condamnation immédiate de Christophe Castaner assortie d'une saisine de l’IGPN. Aucune chance, pour eux, que quiconque tente d’avancer l’excuse du confinement mal vécu. Et pourtant, après gilets jaunes et réforme des retraites, on pourrait aisément imaginer que ce nouveau sale boulot qui leur tombe dessus les rende passablement tendus…

En attendant, personne ne s’est inquiété d’avoir vu enfler, la semaine passée, avec les événements de Villeneuve-la-Garenne, le #MortAuxPorcs - guère plus sympathique que « bicot », on en conviendra - qui leur était destiné. Et personne ne semble, aujourd’hui, se sentir responsable ni coupable d’avoir fait monter, bien visible sur les réseaux sociaux, une mayonnaise délétère qui, aujourd’hui, tourne au vinaigre.

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Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

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