Alain Rousset fait un amalgame avec le nazisme : les élus RN d'Aquitaine portent plainte

Alain Rousset est le président du conseil régional d'Aquitaine, puis de Nouvelle-Aquitaine, depuis plus de vingt ans. Il est socialiste. Il est le vestige archéologique d'un temps où cette région, même quand la France votait à droite, restait invariablement rose. Sauf que cette époque bénie est révolue : désintégration du PS, irruption du macronisme, et, last but not least, implantation réussie du RN dans la région, à toutes les élections. Aux dernières régionales (2021), pour la première fois, la liste RN conduite par Edwige Diaz était arrivée 2^e, derrière celle d'Alain Rousset. Aux législatives de juin dernier, le RN réussit à faire élire cinq députés dans la région : historique. Edwige Diaz et Grégoire de Fournas dans les 11^e et 5^e circonscriptions de Gironde, Annick Cousin dans la 3^e circonscription du Lot-et-Garonne (Villeneuve-sur-Lot), Caroline Colombier en Charente, Hélène Laporte à Marmande et Serge Muller à Bergerac (Dordogne). Or, parmi ces nouveaux visages de juin, il y a justement des conseillers régionaux qui affrontent régulièrement Alain Rousset et sa majorité de gauche : Edwige Diaz, Caroline Colombier et Grégoire de Fournas. Est-ce cette évolution politique qui rend le président du conseiller régional fébrile et lui fait perdre son sang-froid ?

C'est en tout cas le moment qu'il a choisi, une semaine après la sortie outrancière de Mathilde Panot, pour déclarer dans un entretien accordé au site Aqui.fr, au sujet des élus RN au conseil régional : « Chaque session, nous avons droit à une charge d'une grande violence contre l'immigration, ce qui veut dire que ces gens d'extrême droite sont restés adeptes d'une race pure qui nous ramène au nazisme. » Edwige Diaz a immédiatement réagi sur France Bleu Périgord : « Ces propos sont inadmissibles, intolérables, c'est un dérapage ; il dépasse les bornes. Monsieur Rousset insulte les conseillers régionaux RN qui ont été élus démocratiquement, mais il insulte aussi les 1.262.000 habitants de Nouvelle-Aquitaine qui ont voté pour Marine Le Pen à la présidentielle. » Elle a également tenu à mettre les points sur les i dans un communiqué : « Le nazisme est une chose abominable, condamnable, que personne n'espère revoir un jour, et faire l'amalgame entre les élus du RN et le nazisme, c'est purement scandaleux. » Dans la foulée, les conseillers régionaux mis en cause ont décidé de porter plainte.

Alain Rousset, qui passait pour un socialiste modéré, est en voie de « pannotisation ». Anticipe-t-il que cette progression continue du RN se traduira mécaniquement par un changement lors des prochaines régionales ? Est-ce l'atmosphère de fin de règne qui le pousse à ces excès ? Outre son âge, il est visé, depuis mars 2021, par une enquête ouverte par le parquet national financier : Alain Rousset est soupçonné d'avoir financé sa campagne pour les élections régionales de 2015 avec des fonds publics et, en mai dernier, plusieurs de ses proches ont été placés en garde à vue en mai 2022 pour des soupçons de détournement de fonds publics.

Cette sortie aussi malvenue que scandaleuse ne laisse pas d'interroger les habitants de la région qui voient bien que la « grande violence », c'est d'abord celle des agressions quotidiennes et de plus en plus violentes qu'ils subissent, notamment dans la métropole bordelaise. Des habitants qui, à l'heure où tous les regards sont tournés vers les incendies de La Teste - une « forêt d'exception » aujourd'hui détruite - et de Landiras, commencent aussi à se poser des questions sur les responsabilités des élus en charge de la gestion de la forêt. Une gestion qui fait partie des compétences du conseil régional. La Nouvelle-Aquitaine étant la région la plus boisée de France, on aurait aimé entendre le président du conseil régional sur les vrais sujets de fond du moment.