L’Opinion, un journal « libéral» (selon les journalistes de ce média eux-mêmes), a publié un article détaillant le chiffrage, jusqu’en 2022, des programmes des trois principaux candidats à l’Élysée (M. Mélenchon n’appartient pas à ce panel, sans doute, car sa percée est récente).

D’abord, il faut savoir que si les équipes de M. Fillon et Macron ont accepté les règles de L'Opinion et ont donné leurs propres chiffrages, Mme Le Pen a refusé tout net l’exercice proposé. Les journalistes ont donc rempli le tableau à sa place en se basant sur son programme. Cette estimation (provenant d’adversaires déclarés du FN) n’a guère de valeur et le quotidien s’avoue incapable d’évaluer la situation qui prévaudrait en cas de victoire du Front. L’immense majorité des économistes sont, comme eux, dans le brouillard total : Mme Le Pen propose d’ouvrir les vannes, mais l’estimation du montant de ces nouvelles dépenses varie de 1 à 3. Elle laissera filer le déficit et estime qu’il se résorbera tout seul dès 2019, car la croissance sera au rendez-vous.

Elle parle aussi de lutter contre la fraude pour remplir les caisses. Certes, la France perd chaque année 75 milliards d’euros, mais comment l’éliminer ? Personne, en Europe, n’a pour l’instant de recette miracle. On ignore également l’impact d’une sortie de l’euro. Catastrophique, comme le prédisent la majorité des économistes, ou salvateur, selon d’autres, moins orthodoxes ? On lit, à ce sujet, tout et son contraire. Au final, L’Opinion n’avance qu’une seule conclusion : les prélèvements obligatoires exploseront si Mme Le Pen est élue. Le pari de cette dernière est le même que celui de M. Mitterrand en 1981, mais cette relance à contre-courant a englué la France dans une crise qui dure encore. À l'inverse, Roosevelt a sauvé, en dépensant à tout va, les États-Unis, en 1932, même si on estime que seule la Seconde Guerre mondiale a permis de surmonter la crise de 1929.

M. Fillon, dans son tableau chiffré, s’engage à faire 65 milliards d’économies (et non 100, comme il le proclame souvent). Le déficit serait terrassé en 2022. M. Macron, qui affirme vouloir baisser les prélèvements obligatoires, les augmentera au final de 35 milliards et ramènera le déficit à -1.1 %. Avec les deux candidats « centristes », la dette de la France serait au même niveau en 2022.

Le recul permet de mesurer la vanité des prédictions économiques. M. Sarkozy était, en 2007, bien parti pour ramener le chômage à 5 % en 2012. On connaît la suite ; la crise épouvantable de 2008 a tout balayé. Dans l’idéal, on élit un manager qui, suivant les conditions du moment qui sont fluctuantes et changeantes, appliquera la meilleure politique possible pour préserver son pays. Son programme donne juste une idée des moyens qu’il mettra en œuvre le moment venu mais, pour moi, un excellent dirigeant est forcément pragmatique et doit être capable de s’adapter. Et je prends le pari suivant : le futur Président n’appliquera pas à 100 % son programme.

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08 avril 2017 à 15:58

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