Mépris de classe : Macron stigmatise celle des « laborieux » !

classes laborieuses

Emmanuel Macron est mal, très mal. Devant la jacquerie qu’on sait, il ne peut décemment reculer, ni davantage s’entêter. Seule solution ? Jouer l’entre-deux, le fameux « en même temps ». Quoique, « en même temps », cette martingale ait depuis longtemps fait le sien… "Manifestement, on a loupé quelque chose dans l’explication de la taxe carbone", affirme Gérald Darmanin. Plus clairvoyant, on ne fait pas. Ce type devrait être ministre ; de l’Action et des Comptes publics, par exemple.

À en croire l’Élysée, le Président entendrait donc créer une nouvelle instance représentative, chargée de statuer sur le problème et de fournir un rapport ; lequel devrait, n’en doutons pas, fourmiller de propositions concrètes, susceptibles d’être ensuite évaluées par les autorités compétentes, en vue d’un chiffrage éventuel. Bref, un Haut Conseil pour le climat composé de dix personnalités éminentes et issues des mondes économique, scientifique et associatif ; soit tous les peigneurs de girafes dont personne n’a voulu jusqu’à aujourd’hui, même au Conseil économique, social et environnemental. Voilà qui devrait faire rire jaune chez les gilets.

En attendant cette acmé de la vie démocratique - la prestation télévisuelle annoncée ce mardi 27 novembre -, il est murmuré dans ces milieux donnés pour « bien informés » qu’Emmanuel Macron serait prêt à « dialoguer » avec ceux que François Hollande, l’indépassable humaniste progressiste que l’on sait, surnommait les sans-dents. Comme on disait jadis, au temps du service militaire, le soldat Macron a devancé l’appel ce dernier week-end, lors d’une causerie donnée au Conseil européen, à Bruxelles.

Il serait ainsi question "d’apporter une réponse économique, sociale, mais aussi culturelle et de sens à nos classes moyennes et à nos classes laborieuses". De cette déclaration de principe, on retiendra surtout l’emploi du vocable de "classes laborieuses". Pour ceux qui avaient cru comprendre qu’Emmanuel Macron, souhaitant faire de la France de Clovis une "start-up nation", entendait clore le chapitre de notre pays d’hier, voilà qu’il renoue avec le vocabulaire de la société d’avant-hier. "Classes laborieuses" ? Et pourquoi pas "classes sociales dangereuses", tel qu’on disait alors, au siècle dernier, en plein exode rural, quand nos paysans rechignaient à la déportation vers de vastes ensembles urbains en devenir afin de servir de chair à obéir dans les usines, révolution industrielle aidant ?

En ce troisième millénaire, initialement promis à une mondialisation heureuse et manifestement loin de tenir ses promesses, un autre exode : celui de ces ouvriers qui, loin d’exiger de meilleures conditions de travail, en sont désormais tous réduits à seulement trouver un travail et qui, dès le Graal du CDI atteint, en viennent à se demander comment boucler les fins de mois, au contraire de ceux qui font semblant de s’inquiéter, à heures de RTT perdues, de la fin du monde - pour paraphraser ce pauvre Nicolas Hulot.

Qu’il soit néanmoins rendu grâce au mari de Brigitte Trogneux de se préoccuper de cette dimension "culturelle" faisant "sens". À raison, Jean Jaurès assurait que "la nation est le seul bien des pauvres", tant il est vrai que le sentiment d’appartenance à une même communauté demeure le trésor de tous. Ce legs commun, Emmanuel Macron et ses prédécesseurs n’auront eu de cesse de le dilapider tout en semant la discorde entre ses héritiers. En dressant retraités contre actifs (il fait passer les uns comme "privilégiés" aux dépens des autres, et inversement), hommes contre femmes (post-féminisme bourgeois visant à en finir avec le "patriarcat" fantasmatique du mâle blanc hétérosexuel et de basse extraction sociale), Français de souche contre Français de papiers (tout pour les immigrés clandestins et rien pour les "souchiens"), Emmanuel Macron, même entendant "redonner aux classes populaires et aux classes moyennes des perspectives, une capacité à construire le progrès", paraît bien loin des objectifs affichés.

"Si je ne réussis pas, ce sera un, ou une, populiste qui me succédera", assurait-il en substance. Pour une fois, il était lucide.

Nicolas Gauthier
Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

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