Cet été, Laurent Wauquiez avait eu l'habileté de laisser monter au front les parlementaires LR lors de l'affaire Benalla. Et les Français, à qui Emmanuel Macron et Édouard Philippe avaient réussi à faire croire que les LR étaient soit inexistants soit ralliés à leur panache, avaient découvert étonnés qu'il faudrait compter avec les compétences et l'expérience d'un Guillaume Larrivé et d'un Philippe Bas face à une majorité LREM déboussolée et un Président Macron-coup de menton pour mener une opposition ferme et crédible et, demain, l'alternance. Comme disent les communicants, il a bien géré la séquence quand Emmanuel Macron, lui, pour le première fois, ratait la sienne.

Mais, avec la rentrée, tous l'attendaient sur la ligne et la gestion difficile de sa famille où son leadership est contesté par ses rivaux, qui semblent se ranger derrière Valérie Pécresse (Xavier Bertrand lui a envoyé un message vidéo et les juppéistes Bussereau et de Calan avaient fait le déplacement). Et puis, il y avait ce bruit qui courait : Michel Barnier, le commissaire européen, très européiste, pourrait mener la liste LR pour les élections européennes de mai 2019.

Ce dimanche 26 août, Laurent Wauquiez a donc réaffirmé une ligne identitaire et a joué à fond le rôle de l'opposition frontale à Emmanuel Macron. Comment en être surpris ? Au moment où la question migratoire devient le sujet majeur en Europe et provoque partout une recomposition politique, il n'avait aucun intérêt à se recentrer. Et à l'heure où le pouvoir macronien a vacillé et perdu de sa superbe, à la fois sur son illusoire transparence (affaires Benalla, Kohler, Nyssen) et sur ses résultats économiques - décevants, voire inquiétants -, il n'avait plus aucune concession à lui faire. Les électeurs LR qui étaient attentistes ou favorables au nouveau pouvoir avaient eu besoin d'un an pour se rendre à l'évidence. Laurent Wauquiez peut légitimement apparaître comme le chef isolé qui avait eu raison avant tout le monde. Dans ces conditions, aucune concession à faire non plus aux Libres ! de Pécresse.

Ce 26 août, sur ce mont Mézenc, qu'il cherche à inscrire dans l'imaginaire des Français comme son Solutré, entouré de sa mère, maire du Chambon-sur-Lignon, de son épouse et de ses enfants, il a donc affiché la couleur : "L’immigration de masse est une menace culturelle pour la civilisation européenne. Les Français refusent de devenir étrangers dans leur propre pays. Nous ne devons plus laisser ces bateaux accoster dans les ports européens." Une ligne claire. Une ligne Salvini.

Désormais, les électeur LR, mais aussi ceux de Nicolas Dupont-Aignan et du Rassemblement national, attendent la suite et que cette ligne claire soit suivie d'actes politiques cohérents. La crédibilité de Laurent Wauquiez, qui n'est pour le moment guère assurée, dépendra des décisions qu'il prendra, pour les prochains scrutins, dans le choix des hommes et des alliances.

Pour les municipales de 2020, s'il laissait les maires LR nouer des alliances avec LREM comme cela se profile, l'électorat de droite au sens large ne s'y retrouverait pas et lui demanderait des comptes.

De même, on ne peut parler de "civilisation européenne menacée" par la crise migratoire et choisir Michel Barnier comme tête de liste pour les européennes de 2019, alors que ces élections, pour la première fois depuis leur institution il y a quarante ans, auront un enjeu national et européen considérable. L'occasion est unique pour réclamer "une refondation totale de la politique migratoire européenne" et montrer enfin aux électeurs de droite que le chef de LR en a fini avec les accommodements et les reniements qui minent ce parti depuis... quarante ans.

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26 août 2018 à 22:09

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