Éric Zemmour était, ce mercredi, l'invité de BFM TV pour défendre son programme face à la rédaction de la chaîne. Fait assez remarquable, il a pu développer son propos, notamment sur l'éducation - ou plutôt, pour reprendre sa propre distinction, sur l'instruction. Il a également parfaitement assumé d'avoir un programme économique peu étoffé, ce qui est habile et lui permet de consolider sa position régalienne.

On aura appris peu de chose, en somme, tant les axes principaux du programme d'Éric Zemmour sont désormais connus, tandis que certains - la CSG - demeureront à jamais assez cryptiques, en tout cas pour les gens simples comme moi.

En fin de compte, la nouvelle la plus importante ne vient pas de cet entretien sérieux, que l'on croirait tout droit sorti du JDD ou presque. La vraie nouvelle, le scoop Closer que voulaient (et qu'ont obtenu) les journalistes de BFM, c'est l'officialisation par le candidat de sa relation avec Sarah Knafo (« ma collaboratrice, ma compagne »). Cette fascination des journalistes dits sérieux pour la vie privée des candidats à l'élection présidentielle est proprement surprenante, quoique pas très neuve.

On n'imaginait pas Tante Yvonne bronzer topless à Brégançon. Certes. Pas plus qu'on imaginait le général de Gaulle lutinant des femmes de ménage au Sofitel™. On ne posait donc aucune question, puisque leur couple n'en appelait aucune.

Claude Pompidou, dite « Bibiche », avait de l'allure, de la culture, et elle était, en quelque sorte, moderne pour l'époque. Il y avait un angle pour la calomnie. Une campagne immonde (l'affaire Marković) l'avait d'ailleurs traînée dans la boue. Son mari, amoureux de sa femme avec une constance proprement émouvante, ne s'en était jamais vraiment remis.

Giscard, malgré une Anne-Aymone, née Sauvage de Brantes, élégante quoique assez austère, aimait séduire et voulait tout faire comme Kennedy. Mais Kennedy était beau, bronzé et, outre son très vif succès, souffrait d'une addiction au sexe qui le rendait vulnérable à toutes les starlettes ambitieuses. Giscard, lui, était vieux depuis ses vingt ans, ressemblait à un vautour et s'était fait gauler comme un notaire de province en rentrant à l'Élysée à l'heure du laitier.

Passons sur Mitterrand, portraituré post mortem en sphinx florentin, grand séducteur de la IVe République. Tout a déjà été dit sur lui. Fille cachée, maîtresses partout, châteaux secrets, conseiller qui se suicide au Palais. Un mélange entre les Borgia et les derniers Valois. Un chic discutable.

On n'a rien demandé à Jacques Chirac, malgré un palmarès, dit-on, impressionnant : « Les filles, ça galopait », confiait, en 2001, Madame Chirac, née Chodron de Courcel. Un psychanalyste dirait peut-être qu'il a, toute sa vie, été avec les femmes le jeune homme fringant qui, à dix-huit ans, s'était encanaillé dans un bordel du Maghreb. Aventures rapides, presque juste pour l'hygiène, comme chantait Renaud dans « Mon beauf ». Bernadette a porté ses cornes avec beaucoup de majesté et de retenue. La plus solide, c'était elle.

Sarkozy, lui, s'est prêté de mauvaise grâce au déballage (« Allez-y, faites votre joli métier...»), lui qui avait pourtant tenu à soigneusement scénariser sa vie familiale, quand tout allait bien, dans les magazines people. Ensuite, il y avait eu le célèbre « avec Carla, c'est du sérieux », énième coup de couteau dans la dignité du portrait présidentiel.

François Hollande ? Il n'avait pas eu de questions sur l'épisode du scooter de la rue du Cirque. Bourreau des cœurs, à en croire la rumeur, il était resté sur la réserve (la sienne, pas celle du scooter). Premier Président à ne pas avoir de première dame lors des visites officielles, il avait brisé un tabou. Un peu moins Point de vue, un peu plus La Nouvelle République. Le genre préfectoral. Un Président normal.

Macron ? Passé le poids des âges et le choc des générations, l'opinion publique s'est concentrée sur son autoritarisme sourcilleux et ses aphorismes méprisants. La question de sa vie privée a été rapidement évacuée. Trop insolite pour intéresser réellement les gens qui fument des clopes, roulent au diesel, se marient et ont des enfants.

Parmi les prétendants de 2022, seul Éric Zemmour semble déchaîner les rumeurs. Valérie Pécresse ? Mariée, trois enfants, une vie bourgeoise en banlieue ouest. Marine Le Pen ? Divorcée, trois enfants, des chats, en coloc. Réaliste, proche des gens mais pas très « paillettes ». Reste donc la relation entre le « polémiste d'extrême droite », comme disent les journaux, et sa conseillère. Audacieux, romanesque, sulfureux, médiéval : on est dans Les rois maudits. Ou même dans sa copie américaine, Game of Thrones.

Ne croyez-vous pas qu'on s'en moque un peu ? La police des braguettes aurait-elle voulu renverser Louis XIV pour des raisons morales ? Vaut-il mieux sauver la France ou s'assurer qu'elle soit gouvernée par un mari fidèle ? Remercions BFM pour sa curiosité « à la hauteur des enjeux » et laissons ces questions à votre sagacité.

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13 janvier 2022 à 21:34

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70 commentaires

  1. Bonne prestation de « Z » dans l’ensemble d’une prestation longue de 3 heures; rares sont ceux qui tiendraient la route.
    Une mention particulière à Bruce Toussaint qui a su faire preuve d’une certaine forme de retenue, accompagnée d’un humanisme qu’on ne lui connaissait pas.
    Par contre, carton rouge à cette pauvre Apolline de Malherbe qui n’est vraiment pas à la hauteur dans ce genre de débat.

    1. Nous avons trouvé Natacha Polony bien terne. Pas le brio habituel. Face à Zemmour elle n’a pas fait le poids, et plus cela avançait, plus elle s’en rendait compte… Je pense que Zemmour a, en plus de toutes ses qualités, un pouvoir fascinant, comme pouvait l’être De Gaulle.

  2. Maintenant que c’est clair pour tout le monde ! bravo a bfm d’avoir eu un scoop qui n’en était pas un tout le monde s’en fiche de savoir qui couche avec qui. si tous nos problemes étaient là…..comme d’habitude mr Zemmour a été brillant c’est ce que je retiens tout comme il a été excellent dans les 4 vérités sur france 2 particulierement sur le ministere de l’instruction publique.Mr Z n’est plus en rodage pas sur que mr JT de tf1 soit aussi condescendant lors de sa prochaine entrevue avec Z

  3. Il ne s’agit pas de politique de la braguette, il s’agit plutôt d’apprécier le choix d’un homme d’un vieux pour qui seule une femme jeune n’a d’intérêt. Je l’aurait préféré avec une personne plus proche de son âge

    1. Cela parait plus normal lorsque c’est l’homme qui est le plus âgé.
      Souvenez-vous de Charli Chaplin et Oona qui avaient 36 ans d’écart

  4. Il a été excellent, ne s’en est pas fait raconter et même ses interlocuteurs ont mis un bémol à leurs impolitesses et agressivité habituelles; seul le jeune plouc Benjamin Duhamel a montré le niveau de son intelligence dû sans doute au fait qu’il se croit fils de Jupiter…..

  5. Je n’en connais aucun(e) des candidat(e)s qui auraient pu répondre aussi bien, aussi fin, aussi politique mais pédagogique, pas politicienne, avec autant de brio, et le sourire là dessus à désarmer les plus durs journalistes de la pensée unique, largement subventionnés….Zemmour mérite grandement d’être le prochain locataire de l’Elysée. Même ceux qui sont contre, sont ils sûr que leur « poulain ou pouliche » les contentera ? !

  6. quand les feux de la passion sont éteints et que rien a part des enfants ne relie un couple quoi de plus naturel que de recréer la magie d’etre ensemble Eric et Sarah ne sont pas les premiers en politique a changer de partenaire c’était vrai pour Giscard ,pour Chirac , Sarkozy ou flamby pourquoi ca serait plus anormal pour Eric et Sarah la différence d’age? notre première dame n’est elle pas une cougar qui a séduit un élève? sans que ca ne choque personne?

    1. La cougar n’est pas présidente. En revanche Zemmour avec une jeunette n’est pas très glorieux et pas très valorisant pour les femmes en général.

  7. La clémence envers les frasques et turpitudes diverses des élus est à géométrie variable.

    Merci pour ce billet sarcastique à souhait pour dénoncer ce journalisme idéologique si prompt à empiéter sur la vie privée d’un candidat qui dérange et qu’on veut abattre.

    Mitterrand, sa double vie, les écoutes téléphoniques et autres dérives semblent avoir été bien mieux admises.

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