Si seulement c’était un poisson d’avril ! Et pourtant non, le Daily Mail a sorti l’affaire le 30 mars, ce n’est donc pas un « April fools’ » de mauvais goût. Au Nebraska, une femme de 61 ans a donné naissance à une petite fille. L’origine des gamètes ? Son fils pour le sperme, la sœur de l’époux de son fils pour l’ovule. Cette petite fille aura donc une mère/grand-mère qui l’a portée et mère/tante qui lui a donné son patrimoine génétique. Outre ses deux « pères » gay. Soit quatre parents en tout… Si, d’aventure, cette tante a d’autres enfants, ils seront cousins et en même temps demi-frères ou sœurs de cette petite fille. Bonjour les réunions de famille !

Commençons par le positif. Il faut reconnaître que ce cas de figure est un cas de « gestation pour autrui » qui échappe à la marchandisation. Une sœur peut subir une ponction ovarienne pour son frère dans une démarche généreuse. Une mère peut subir une grossesse, même à un âge canonique, pour son fils, elle l’a déjà fait. L’altruisme au sein des familles, ça existe, témoin le nombre de personnes qui donnent un rein à leur frère ou sœur qui en ont besoin. Il n’y a, sans doute, pas eu dans ce cas de contrat léonin aux clauses plus abusives les unes que les autres, d’avocat et d’intermédiaire rémunéré grassement. Il est vraisemblable que cette grand-mère porteuse n’a pas été enfermée dans une sorte de prison plus ou moins glauque pendant sa grossesse, et c’est tant mieux. Je ne brandirai pas ici l’anathème « esclavage ».

La filiation de cette fille apparaît, en outre, beaucoup moins bricolée que dans le cas d’une autre GPA. De l’un de ses deux « pères », elle tient le sperme, de la famille de l’autre « père », elle tient indirectement l’ovule. Elle ne sera pas confrontée à l’anonymat, à cette recherche des origines qui mobilise tant d’enfants nés d’un don de gamètes, à la frustration de ne pas voir cette recherche aboutir.

La bien-pensance progressiste tentera sans doute de nous vendre un prototype de « GPA éthique », même si son occurrence devrait rester rarissime. C’est dans l’air du temps, et il faut bien changer d’histoire, celle de Marc-Olivier Fogiel pourrait lasser après un tel acharnement médiatique. Avec, dans l’idée, de faire admettre un point extrême du curseur, puis de bouger le curseur. Cela marche très bien, l’avortement en est un exemple.

Il existe pourtant des esprits chagrins comme moi qui ne peuvent applaudir. La démarche de ces quatre personnes et celle de tous les médecins qui ont participé à cette conception et cette naissance n’est en rien éthique. Ce bébé avec deux « mères » qui sera élevé par ses deux « pères » ou supposés tels, c’est quelque part la sacralisation d’un désir d’enfant au point d’oublier les limites de la nature et, il faut bien le dire, d’un ordre social structuré qui s’appelle la famille et où les fonctions sont définies.

Il est évident que faire courir à sa mère les risques d’une grossesse tardive relève de l’inconscience. Le corps dispose de sa propre horloge, ne trafiquons pas les aiguilles.

Un esprit soupçonneux pourrait aussi y voir la volonté de réaliser une sorte d’exploit, bien dans la mentalité américaine.

Le désir de ce couple d’hommes d’avoir un enfant qui leur soit aussi proche que possible est réalisé grâce à la générosité, ou l’instrumentalisation, de leurs deux parentes. Cette petite fille devra grandir dans ce « gloubi-boulga » familial aux repères chamboulés. Sa conception et sa naissance se font au mépris de tout principe de précaution. Quels seront les impacts psychologiques dans le futur, chez elle et chez les autres ? Il serait vain de risquer une prophétie, mais je lui souhaite bonne chance.

6971 vues

02 avril 2019 à 16:01

La possibilité d'ajouter de nouveaux commentaires a été désactivée.