Ce sont les Français les plus modestes, contraints de s’entasser matin et soir dans les transports en commun, entre grèves, pannes et retards, qui vont être contents. En effet, la SNCF vient-elle d’annoncer le lancement d’un TGV aux couleurs arc-en-ciel qui, du 5 juin au 7 juillet, arpentera le chemin de fer.

À l’origine de cette initiative, l’association GARE !, dont le site Internet nous annonce : « GARE ! est un espace associatif mis en place au sein du groupe SNCF, afin de permettre aux lesbiennes, gays, bi-e-s et trans d’être reconnu-e-s avec dignité dans leur intégrité d’êtres humains et de se faire respecter en tant que tels. »

Pour le clampin dont les impôts et les Pass Navigo, le plus souvent hors de prix, permettent de financer le bidule, il y avait à l’évidence péril en la demeure… On ajoutera encore que ce TGV « new generation » honorera la bastonnade de Stonewall, laquelle remonte désormais à un demi-siècle.

Bref, toujours en proie au même complexe du « Vieux Monde » vis-à-vis de son « nouvel » homologue, nous transformons les véritables tragédies en palinodies, un peu comme nos « yéyés » français imitaient servilement les « rockers » américains. Car Stonewall fut une horreur : des travestis qui ne demandaient rien à personne, dans un bar dans lequel personne n’était obligé d’entrer, furent tabassés par la flicaille américaine. Rien de similaire en France, pays de vieille civilisation, où l’on a toujours su faire « avec » une homosexualité vieille comme le monde. L’exhibitionnisme ambiant et ces Gay Pride venus des USA ont bousculé ce fragile mais sain équilibre.

Du coup, l’infortuné Loïc Leuliette, chargé du service de presse de la SNCF et interrogé par le magazine Têtu, jadis porté financièrement à bout de bras par le mécène Pierre Bergé (un peu connaisseur en la matière), finit par lâcher le morceau : « Cette initiative n’a rien de surprenant, compte tenu de l’ancrage historique de la société ferroviaire dans la lutte pour le respect des diversités et notamment LGBTQ+. »

Là, c’est l’Annapurna qu’on gravit en espadrilles.

C’est qu’on se disait, même si on l’avait un peu oublié : la SNCF a toujours été en pointe dans la lutte contre « l’homophobie ». La Bête humaine, de Jean Renoir, film tourné en 1938 avec Jean Gabin dans le rôle de chauffeur de locomotive à vapeur (mais pas à voile, hormis distraction de notre part), que cherchait-il ? Sa part de féminité, pardi !

Pareillement, il est évident, que dans La Bataille du rail de Jean Clément, filmée en 1946, les cheminots résistants, communistes ou non, se battaient contre les armées allemandes à grands coups de rainbow flag…

Aujourd’hui, cette même CGT doit encore se battre sur un autre front, tout aussi crucial pour le triomphe de la classe ouvrière : le port de la jupe pour les hôtesses dans les wagons de première classe de nos TGV, « gay-friendly » ou non, mais que les plus modestes de nos compatriotes, évoqués en début de ces lignes, ne pourront jamais s’offrir - jupe d’hôtesse ou pas.

Ainsi, le CHSCT, Comité d’hygiène et de sécurité, souhaiterait que ces dames servent de manière « sexuée » pour les clients s’étant acquitté de leurs billets au prix de l’or fin. Ce à quoi la CGT rétorque qu’il s’agirait d’une « conception sexuée de l’accueil » et d’un « chantage à l’emploi ». Et cette centrale syndicale de dénoncer ensuite « l’assignation systématique du seul mot “hôtesse” plutôt que de l’associer à son homonyme masculin “hôte” ». Nous sommes décidément loin de cette « préférence nationale » que la CGT fit voter, en plein milieu de ces sombres années 30.

Le plus simple consisterait peut-être à mettre tout ce joli petit monde d'accord en rendant obligatoire le port du string, juste histoire de respecter les convenances et de ne vexer personne.

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07 juin 2019 à 19:09

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