Sandrine Rousseau et Éric Zemmour : deux dynamiteurs d’une campagne trop sage
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Une campagne de présidentielles ne se déroule jamais comme prévu. Celle-ci n’échappera pas à la règle, tant les Français s’interrogent, remettent en cause les discours répétés depuis des décennies en dépit des échecs et détestent les schémas tracés d’avance. À droite, Éric Zemmour que personne n’attendait n’est plus qu’à quelques points des candidats LR, socialistes ou Front de gauche. À gauche, c’est Sandrine Rousseau, enseignante chercheuse en économie de 49 ans, qui crée la surprise en arrivant à deux points du candidat naturel du parti, Yannick Jadot. Primesautière et gaffeuse, Sandrine Rousseau incarne et revendique une « radicalité » qui pourrait séduire les Verts et bien plus largement à gauche de l’échiquier politique.
Ces deux dynamiteurs de la campagne présidentielle incarnent les deux pôles du débat. D’un côté, un conservatisme patriote, attaché aux valeurs qui ont fait la France, de l’autre, l’aventure d’une révolution tous azimuts. D’un côté, l’obsession des piliers de la civilisation qui a porté la vieille Europe au sommet, de l’autre, le procès sans cesse renouvelé de cet héritage. D’un côté, la défense d’un peuple enraciné, de l’autre, celle d’une nature sans frontière idéalisée et fantasmée et d’un féminisme agressif qui rejette les vieilleries d’une Histoire avec laquelle il faut rompre.
Tous deux revendiquent leur radicalité, ont leurs inconditionnels et galvanisent une partie de la jeunesse. Tous deux caressent un rêve élyséen encore lointain. Mais voilà, l’un entend restaurer quand l’autre promet de détruire. Sandrine Rousseau démontre ce que cette forme d’écologie doit au marxisme. Les titres de ses livres parlent d’eux-mêmes : Du balai. Essai sur le ménage à domicile et le retour de la domesticité, Manuel de survie à destination des femmes en politique ou encore Oui, l’écologie, c’est social. Le mariage du rouge et du vert : « L’objectif de ce livre est de montrer en quoi le projet écologiste est profondément social et générateur de plus d’égalité dans la société », explique le résumé de l’ouvrage. Dans Reporterre, Sandrine Rousseau fixe clairement l’objectif de ce que serait sa politique : « Un revenu d’existence, une réduction du temps de travail et un prix élevé du carbone », soit un peu plus d’assistanat dans un pays gangrené par ce cancer et un bel alourdissement des charges sur les entreprises dans un des pays les plus imposés du monde. Que les Français ne comptent pas mettre de côté pour les jours difficiles si jamais Sandrine Rousseau l’emportait : « Il nous faut un taux d’imposition marginal important, du temps de Mitterrand il était de 80 % », explique-t-elle.
Sur les migrants ? « Nous devons arrêter d’humilier ces personnes comme on le fait actuellement, où la seule politique est de mettre des coups de canif dans les tentes où vivent ces personnes, poursuit notre généreuse écolo. […] Il faut sortir de ça. Il faut qu’on les intègre. Et on met en place un fonds de développement — ce qui était le projet initial de l’Europe, avec une taxe sur les transactions financières. ». Le salut par les taxes. Facile. Bien sûr, Sandrine Rousseau dénonce les « violences policières », veut « interdire les pratiques discriminantes et violentes comme le contrôle au faciès », entend favoriser le confort des salariés, surtout des salariées : « Si vous mettez en place un congé paternité égal au congé maternité, ça oblige les hommes à prendre en charge le foyer pendant la même durée. […] Je suis favorable à ce qu’un congé soit accordé en cas de fausse couche, je suis favorable à ce qu’on ait des salles de repos pendant les règles sur les lieux de travail. Qu’on prenne en compte l’intégralité du corps des femmes, que ce corps de femme s’impose dans l’entreprise et ne s’excuse pas d’être un corps de femme. ».
Parmi ces errances, Boulevard Voltaire, toujours bienveillant, a trouvé, en cherchant bien, deux points positifs.
Sur le rétablissement des frontières, par exemple : « Les entreprises étrangères ne peuvent pas émettre du carbone en Chine, arriver en Europe en faisant patte blanche et en affirmant que leurs produits sont moins chers, tranche Sandrine Rousseau. Il y a tout un travail à faire sur nos frontières, et assumer le fait qu’on doit sortir du libre-échange. Ce n’est plus l’heure du libre-échange aujourd’hui. ». Deuxième espoir, sa future fonction : « La priorité, c’est la sortie du présidentialisme, assure-t-elle, la diminution des pouvoirs du président de la République — et de la présidente de la République en l’occurrence, puisque ce sera moi. » La future Présidente entend limiter ses pouvoirs. Ouf !