Priez, les gens !

prière

Le pape veut féminiser l’Église : en un mot, la protestantiser. Aussi bien le synode amazonien, sous des airs folkloriques, était-il un laboratoire : un think tank ecclésial. Est-ce dans ce même esprit que le Vatican a approuvé la proposition de la Conférence des évêques de France d’introduire le novlangue dans les missels ? Pas question, comme on a pu le lire, ici et là, de semer les textes liturgiques des fameux points médians de l’écriture inclusive. Pour l'instant, en tout cas... Par prudence, vertu cardinale ? Mais on progresse…

Bientôt, donc, on dira pieusement : « Je supplie la Vierge Marie, les anges et tous les saints (et les saintes ? Quant aux anges, c’est bien connu, ils n’ont pas de sexe) et vous aussi, mes sœurs et frères, de prier pour moi… » Sauf qu’il y a un hic : que fait-on des sans genre fixe que cette distinction binaire discrimine ? Mieux vaudrait adopter le tour mélenchonien : « Prions, les gens, au moment d’offrir le sacrifice de toute l’Église. »

Pour justifier cet aggiornamento, on s’appuie sur le texte latin. En bonne sourcière, l’auteur du présent article est allée vérifier. Une seule fois, le texte canonique distingue les genres. C’est dans le Mémento : la prière des défunts. « Souvenez-vous aussi, Seigneur […] de vos serviteurs et de vos servantes… », où il est précisé que le prêtre nomme ici les défunts pour qui il célèbre. Partout ailleurs, le latin et le français utilisent un masculin. Et le latin ne dit jamais : « Orate fratres et sorores. » Alors, affirmer que cette « féminisation » est « fidèle » au latin n’est pas exact.

On sait que le masculin français, dans la langue, a une valeur non marquée, générique, « extensive », c’est-à-dire qu’il a la capacité, à lui seul, de représenter les éléments relevant de l’un et l’autre genre. Quand l’Église dit « les fidèles », elle n’entend aucunement distinguer les hommes des femmes. C’est cette valeur extensive du masculin que la poussée féministe veut bannir, partout, afin d’introduire, partout, la discrimination par le sexe.

Un peu de provocation pour finir. Au train où vont les choses, pourquoi ne pas remplacer la fin du Je vous salue Marie par « Priez pour nous, pauvres pécheurs et pécheresses » ? Et faut-il s’attendre à l’inscription prochaine, au calendrier liturgique, de la fête de sainte Greta, patronne de la Terre, notre sœur à toutes et à tous ?

Marie-Hélène Verdier
Marie-Hélène Verdier
Agrégée de Lettres Classiques

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