La preuve par Villejuif : le terrorisme et sa drôle de guerre
L’expression n’est certes pas heureuse, mais nous sommes en « guerre » contre le terrorisme, quoiqu’il puisse s’agir d’une drôle de guerre, telle qu’en témoigne la récente arrestation de trois possibles apprentis djihadistes à Villejuif, en Île-de-France.
Hormis celui traditionnellement pratiqué par les États, qui est un tout autre sujet, l’actuel terrorisme frappant l’Europe relève du conflit asymétrique, puisque arme du faible contre le fort. Sans encore négliger le fait voulant qu’à l’inverse de ses illustres devanciers qui bénéficiaient de puissants soutiens et relais étatiques, le terrorisme de Daech relève plus de l’ubérisation, façon auto-entrepreneur, voire de l’improvisation la plus totale. Pour tout arranger, ces terroristes ne revendiquent rien, que ce soit en matière politique, religieuse ou territoriale. Pas de rançons non plus et encore moins d’avions avec le plein pour on ne sait quelle destination exotique ou de libération exigée d’éventuels camarades emprisonnés.
Le cas du trio de Villejuif est, à ce titre, hautement emblématique. Un plombier en intervention dans un petit immeuble qui aperçoit sur une terrasse des produits chimiques en vrac. Regardant de plus près à travers la baie vitrée, il repère fer à souder et réchaud ; bref, le parfait matériel du petit chimiste. Un simple coup de téléphone à la maréchaussée et deux des locataires de l’appartement se retrouvent menottes aux poignets, tandis qu’un troisième comparse est arrêté dans la foulée. Leur atelier de fortune servait à fabriquer du TATP, explosif artisanal – et surtout très instable – ayant servi aux attentats du Stade de France, de Bruxelles et de Manchester.
Pour différents qu’ils soient, les profils de ces néo-terroristes présentent néanmoins nombre de points communs. Une radication islamiste express, sur Internet ou en prison, nombre d’entre eux étant forts d’un lourd passé judiciaire, une famille éclatée d’où des fratries servant souvent d’ultime refuge, des troubles psychiatriques fréquents, un bagage intellectuel des plus sommaires et même parfois des gens sans histoire et raisonnablement cultivés. Ces trois-là appartiennent-ils à cette dernière catégorie ? Si l’un est sans profession, les deux autres sont respectivement agent hospitalier et… antiquaire.
Selon Gérard Collomb, ministre de l’Intérieur, les prévenus nient « tout lien avec le terrorisme » et assurent aux policiers qu’ils comptaient se servir de ces explosifs pour faire sauter des distributeurs de billets. Ce qui est assez peu plausible, la seule manière de faire exploser de telles machines consistant à y introduire du gaz sous pression avant mise à feu. S’ils disent la vérité, on ne saurait donc que leur conseiller de changer de métier…
Ou alors ils mentent, l’analyse de leurs téléphones ayant permis d’apprendre qu’ils étaient en communication fréquente avec la Syrie, qu’ils ont acheté un appareil photo à la FNAC avant d’aller visiter la tour Eiffel par deux fois. Dans les deux cas de figure, c’est peu de dire que nous n’avons pas affaire à des professionnels aguerris.
D’une certaine manière, un tel terrorisme est autrement plus inquiétant que celui du siècle dernier où exécutants et donneurs d’ordres étaient parfaitement identifiés, où l’on ne frappait pas au petit bonheur la chance et où il était toujours possible de négocier en amont avant d’éviter le drame.
Aujourd’hui, le terrorisme est à la portée du premier branquignol venu, mais un branquignol peut faire autrement plus de dégâts qu’un spécialiste de la subversion…
Bref, même en matière de terrorisme, tout fout le camp !
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