Pour saluer Claude Sarraute

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La journaliste Claude Sarraute vient de nous quitter à l’âge vénérable de 96 ans. L’occasion de revenir sur la presse du siècle dernier ; celle que les moins de vingt ans (et même de quarante) n’ont pas connue.

La défunte était l’une des signatures les plus en vue du Monde. « Sur le vif », son billet quotidien, fait alors les délices du Tout-Paris. On peine à le croire aujourd’hui, mais on pouvait alors rigoler à la lecture de ce journal pas encore transformé par Edwy Plenel – le Saint-Just à moustaches qu’on sait – en tribunal permanent, avant d’aller sévir à Mediapart.

Claude Sarraute, même si fille de Nathalie Sarraute, la mère – ou marâtre, c’est au choix – de ce « nouveau roman », vite devenu vieillot avant même d’avoir été « nouveau », ne manquait ni d’humour ni de panache. Ainsi n’hésite-t-elle pas à défendre, sur le plateau de Laurent Ruquier, le même Minute devant un Gérard Miller parfaitement déchaîné. Là encore, c’était au siècle dernier. Les pamphlets anti-mitterrandiens de Jean Montaldo font alors fureur dans les librairies. Seulement voilà, l’auteur est un ancien de… Minute. D’où les cris d’orfraie du psychanalyste au passé maoïste pour lequel le pendant droitier du Canard enchaîné participe d’un nazisme éternellement renaissant.

Et la vieille dame indigne de lui rappeler, en substance : « Mon petit bonhomme, si vous connaissiez mieux l’histoire de la presse française, vous sauriez que Minute a été fondé par Jean-François Devay, un ancien résistant, et que les principaux actionnaires en furent, entre autres, Fernand Raynaud et Juliette Gréco. » D’ailleurs, poursuit-elle, « tous les journalistes que nous connaissons ont tous plus ou moins écrit à Minute, de manière officielle ou non… » Ambiance.

La preuve en est que Philippe Couderc, ancien critique gastronomique du Nouvel Observateur, occupait, avant, les mêmes fonctions à Minute. À l’époque, un tel transfert ne posait pas de problème. Les temps ont changé ; c’est le moins qu’on puisse prétendre.

Toujours à propos de cet hebdomadaire qui ne fut pas toujours pestiféré, Jean Bourdier, son directeur-adjoint et chroniqueur littéraire, confiait jadis à l’auteur de ces lignes : « Claude Sarraute ? Une chouette fille ! Elle ne déteste pas les blagues de corps de garde et lève le coude comme un homme. À droite, dans le genre déluré, il y a Geneviève Dormann et Claude Sarraute à gauche. »

Il est vrai que jamais cette grande dame ne se prit au sérieux. Sa mère est éditée dans La Pléiade ? Elle préfère écrire ce qu’elle nomme malicieusement des « livres de plage ». L’Académie française ? Elle n’y songe même pas, préférant faire les belles heures des « Grosses Têtes » en compagnie de sa bande de copains. Là, elle déploie régulièrement des merveilles ; parfois canaille, mais toujours érudite.

Elle se risque même au théâtre en 2004, dans la pièce de boulevard écrite par son complice Laurent Ruquier, La Presse est unanime. Là, elle y incarne une… journaliste du Monde, la très vacharde Geneviève Trouparent. L’occasion de vérifier que lorsque Gérard Miller n’est pas en génuflexion devant la figure tutélaire du Grand Timonier, il peut aussi faire preuve d’humour, puisque jouant ici le rôle d’un critique cinématographique, plus que réactionnaire, du Figaro.

Bref, Claude Sarraute fit, sa longue vie durant, de la légèreté une sorte de mode de vie ; à rebours de tant de ses confrères qui, se voulant graves, ne sont généralement que lourds. On a connu pire bréviaire. Chapeau bas, madame !

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Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

Vos commentaires

6 commentaires

  1. Comme l’on connaît ses saints, on les honorent… La susdite Sarraute dans l’un de ses billets du Monde prônait et encensait la prostitution mondaine ! Une pré-wokiste en quelque sorte.

  2. L’exemple typique de la « fille de » de gauche qui a vécu en millionnaire grâce aux subventions publiques.
    Tout cela aurait été excusable si elle n’avait pas été une infatigable donneuse de leçons de la gauche caviar faussement altruiste et objectivement fieleuse.

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