Ils ont été reconnus coupables de pillage dans au moins sept églises d’Île-de-France. Quatre ressortissants roumains ont été condamnés à des peines de un à trois ans de prison ferme, ce lundi 27 mars. Une condamnation qui intervient dans un contexte d’explosion de vols, profanations et dégradations commis contre et dans les lieux de culte catholique.

Plus que des pilleurs de troncs

Les quatre individus ont donc été condamnés pour avoir pillé sept églises. Celles de Vitry (Val-de-Marne), Saint-Germain-des-Prés à Paris (VIe), Saint-Cloud, Gournay, Bondy et Romainville. Deux autres à Grenoble et près de Lyon ont été aussi victimes de l’action de cette bande. Mais hélas, leur action ne se limitait pas aux troncs.

« Ils ont cassé l’ostensoir, volé un calice et l’ordinateur de l’église », précise le curé de l’église de Bondy au Parisien, le père Petitfils. Les cambrioleurs ont aussi profané le tabernacle et dérobé le « corps du Christ. Des centaines d’hosties. Un bien inestimable », se désole le prêtre. Et c’est tout le nœud du problème.

Pas de « délit de profanation »

La condamnation de ces immigrés roumains intervient quelques jours avant celle de l’incendiaire de la cathédrale de Nantes. Une peine légère dans tous les cas de figure, qui s’explique par une donnée importante : la loi française ne reconnaît pas de délit de profanation, hormis dans les lieux de sépulture. Une question prégnante demeure : comment la Justice peut-elle saisir l’étendue du préjudice ? Lorsqu’il s’agit d’un tag, de quelque mobilier brisé ou d’un cambriolage, la Justice engage des poursuites pour dégradations ou pour vol. Mais s’il s’agit d’une profanation ? On le rappelle, la Justice ne reconnaît ni ce délit ni celui de blasphème. Si une hostie consacrée est volée, le juge ne pourra estimer le préjudice que sur la valeur marchande de l’hostie (quelques centimes d’euros) alors que, pour les catholiques, le crime est bien plus grave que le vol d’un tableau de maître. Dans la République, qui ne reconnaît aucun culte, il y a pour les croyants une impossibilité de fait à se voir rendre justice.

Des attaques quotidiennes

Aucune région, aucun diocèse n’est à l’abri de ce genre d’attaques devenues quotidiennes. C’est en tout cas le sentiment d’Albéric Dumont. « Je suis ces sujets depuis 2015, c’était un phénomène déjà présent. Mais aujourd’hui, je ne m’intéresse plus aux dégradations légères. » Désintérêt ? Plutôt submersion ! L’ancien cadre de la Manif pour tous, aujourd’hui à la tête d’une entreprise de sécurité spécialisée des lieux de culte, poursuit : « J’ai mis en place une veille sur les cas graves de profanation, si j’élargissais mes critères à ces délits, ce serait plusieurs fois par jour ! »

 « L’Église n’aime pas faire de vagues sur ces sujets », déplorait, en 2019, l’ex-députée devenue sénatrice Valérie Boyer, dans les pages du Monde. À tel point que la police est parfois obligée de sensibiliser le clergé qui, par peur de jeter de l’huile sur le feu, est bien souvent silencieux.

Gerald Darmanin avait annoncé le déblocage de quatre millions d’euros pour « sécuriser » les lieux de culte. Une goutte d’eau dans un océan de délits et d’actes commis dans un pays qui, faute de sacré, n’a plus grand-chose à profaner, hormis ses églises qui « servent de cible », pour paraphraser Rémi Brague.

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30 mars 2023 à 19:30

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20 commentaires

  1. Vous avez évidemment parfaitement raison : pour un chrétien, catholique au moins, la profanation du Corps du Christ est épouvantable. La République ne sait pas gérer cet aspect et c’est bien dommage.
    Toutefois, si la profanation était érigée en crime, comme la République reconnaît toutes les religions sans faire de différence, la fait de maltraiter un exemplaire du Coran – par exemple, pris tout à fait au hasard, bien sûr – serait également traité comme tel. Et cela paraîtrait aux chrétiens complètement démesuré, voire incompréhensible.

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