On applaudit, mais les agressions contre les soignants se multiplient !

infirmière

Depuis qu’on tourne en rond en cherchant l’air, on entend de drôles de choses… Des vétérinaires, par exemple, qui appellent à la raison : ne lavez pas vos animaux à l’eau de Javel ! Non, même pas les pattes, ça leur brûle les coussinets ! Ou bien cet urgentiste qui voit arriver des braves gens tordus de douleur après s’être rincé la bouche avec la même javel. Et non, Madame, pas la peine de prendre une douche chaque fois que vous revenez des courses, etc.

Côté urgences, d’ailleurs, on lance maintenant des appels surréalistes : où sont passés les AVC, les infarctus, les cancers ? « Ils meurent à la maison », nous a-t-on dit, hier ; préfèrent ça plutôt que d’attraper le Covid. Revenez, les gens, on vous attend !

Voilà ce qui arrive quand on alimente la psychose à longueur de journée. Considérant le déboussolement de nos têtes pensantes, notre ami Georges Michel se demandait, hier, si nous ne sommes pas déjà dans la maison de fous. C’est oui, assurément. Nous y sommes. À un point qui ne manque pas d’inquiéter, quand on voit ce que la peur décoince, je parle ici des « bas instincts » de la nature humaine. C’est « le vernis civilisationnel » qui se fissure, comme disait un ami, d’autant que la couche est bien mince.

Ainsi voit-on se multiplier les courriers – en attendant les tirs à la carabine ? – contre les personnels soignants. Foin des applaudissements et autres concerts de casseroles et de vuvuzelas à 20 heures pétantes, les lettres anonymes fleurissent sur les paillassons… déposées peut-être par les mêmes qui applaudissent aux fenêtres. Rapportant le cas d’une infirmière menacée par courrier, Le Parisien écrit : « Les soignants sont aussi la cible de nombreuses menaces et d'incivilités : voitures cassées, caducées volés, matériels dérobés dans les cabinets, lettres d'insultes et menaces. »

On notera, au passage, quelques constantes de cette prose comminatoire. Toujours anonyme, elle compte généralement dix fautes grossières par phrase et actionne ces bons vieux ressorts bien français que sont la jalousie et l’envie, comme celle-ci reçue par une infirmière de Rive-de-Gier, dans la Loire : « Merci d’essayer de pensé à quitté le bâtiment, vous êtes un danger pour tous le monde et tous les locataires se plaignent dans votre dos. De plus vous paraissez très arrogante et vous vous prenez pour ce que vous n’êtes pas. » Etc.

L’Ordre national des infirmiers est inquiet de ces bouffées de violence de plus en plus fréquentes sur tout le territoire. Sur une enquête menée en avril auprès de 70.000 infirmier(e)s, 12 % ont déclaré avoir subi des pressions, menaces ou injures, et 6 % une agression visant à leur dérober du matériel.

À Paris, les personnels de l’hôpital Lariboisière, dans le Xe arrondissement, sont désormais escortés par des agents de sécurité. Il est vrai que le quartier est l’un des plus chauds, entre la salle de shoot toute proche, la gare du Nord et la station de métro de Barbès-Rochechouart. « Avec le confinement, il y a beaucoup moins de monde de fait dans la rue. On nous voit passer chaque jour par le même chemin, on sait où on va, on sait qui on est. Ceux qui ont décidé de s'en prendre à nous savent très bien où nous trouver », dit un soignant à LCI.

On évoque un peu partout des « demandes d'argent un peu trop insistantes avec des gestes menaçants, tentatives de vol, insultes »... Les rues sont désertes, c’est plus facile.

Ailleurs, comme à Toulon par exemple, les SDF et autres punks à chien concentrés en centre-ville sont infiniment plus pressants. Dans la nuit de Pâques, deux restaurants et un glacier ont été incendiés sur le port, deux autres restaurants sur la place un peu plus haut… C’est beaucoup trop pour être un hasard.

Marie Delarue
Marie Delarue
Journaliste à BV, artiste

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