Mort de Louis de Funès : quarante ans déjà !

Louis_de_Funès,_Les_Bons_Vivants,_1965

On n'a même pas l'impression qu'il soit mort car, au fond, Louis de Funès n'a jamais quitté la télévision. Quarante ans après sa mort, le 27 janvier 1983, ce Français archétypal refuse de quitter les mémoires. Bienheureuse et familière présence des comédies populaires (et paresse des programmateurs aussi, qui rediffusent La Grande Vadrouille chaque année).

Louis de Funès de Galarza, qui a désormais, si je sais compter, cinq générations de spectateurs, avait commencé comme pianiste de bar. On le vit d'ailleurs (chez les Carpentier, je crois) improviser au piano sur « When the Saints Go Marchin In ». Il avait ensuite fait l'acteur, mais il n'était, à l'évidence, pas fait pour les rôles de jeune homme. Révélé sur le tard, il était devenu l'icône que l'on connaît, avec un personnage récurrent de tyranneau survolté, servile avec les puissants, odieux avec les petits, roublard et combinard. Il incarnait à la perfection, avec des mimiques géniales et une voix imitée par tous les chansonniers depuis soixante ans, ce que les Français adorent détester.

Ses personnages sont désormais mythiques : inoubliable Don Salluste dans La Folie des grandeurs (très librement inspiré de Ruy Blas), génial Harpagon dans une adaptation filmée, insupportable Victor Pivert dans le très politiquement correct Rabbi Jacob, hymne à la tolérance et au métissage, Louis de Funès fut souvent un père et un époux de commedia dell'arte (comme dans Hibernatus) ou un enquêteur tenace et bondissant (comme dans la série des Fantômas), quand il ne fut pas les deux à la fois (comme dans la série du Gendarme de Saint-Tropez). Partout, il imposa son style, qui pourra sembler un peu daté aux plus snobs, mais qui n'a pas beaucoup perdu de sa puissance comique.

Ce qui a changé, c'est le paysage et ce sont les personnages. Sortons du simple « c'était mieux avant », qui est pourtant évident dans bien des domaines : le personnage qu'il incarnait, typique des Trente Glorieuses, n'existe plus. On aimait s'en moquer mais, à force, il a muté. Aujourd'hui, Victor Pivert voterait Macron, travaillerait dans la tech, porterait des Stan Smith et chasserait les complotistes.

Le paysage, lui, est méconnaissable. La campagne est semée d'éoliennes, Saint-Tropez n'a plus rien d'un village, les grandes rues sont pleines de trottinettes... Le monde des comédies familiales est mort, fixé sur la pellicule à tout jamais. Il en ressort une poignante nostalgie, parce qu'alors, on rigolait bien.

Au fond, regarder un film de Louis de Funès, c'est retrouver un vieil ami. Il va nous faire les mêmes blagues, on va même le lui demander : c'est d'ailleurs pour ça qu'on se retrouve. On va évoquer le bon temps, quand les filles se promenaient en maillot de bain vichy sur le port de Saint-Tropez, quand on faisait des films à costume avec Yves Montand juste pour rigoler, quand on sautait sur les chaises avec ces c... d'Allemands.

Allez, viens, Louis, on va rigoler comme autrefois, et puis, tu sais, tu nous feras tes grimaces, elles faisaient pleurer tout le monde de rire, et puis les « Ma biche », et les « ooh », « plaf ! », « Là ! », « Ma cassette ! »...

Merci l'artiste !

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Arnaud Florac
Chroniqueur à BV

Vos commentaires

24 commentaires

  1. Un de ses films par semaine pour remonter le moral ferait le plus grand bien. Actuellement c’est : « Y a rien à la télé ce soir ».

  2. Louis de Funès a été le plus grand acteur comique de tous les temps et, à ce jour, il n’a jamais été égalé. En fait, il n’y a plus d’acteurs comiques, les acteurs souvent subsidiés de notre septième art, qui ne survit que grâce aux subventions d’Etat, ces acteurs sont devenus invisibles car plus personne ne va les voir dans les salles. Le cinéma français n’existe plus et ne fait même plus partie, selon des chiffres récents, des 10 premiers films visionnés dans les salles. En regardant un film français récent en streaming, pour la première fois de ma vie, j’ai actionné…les sous-titres (français donc) car les acteurs articulaient tellement peu qu’on ne comprenait pas la moitié de leur verbiage!
    Merci Louis de Funès, pour tout le rire et la bonne humeur que vous nous avez offerts.

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