Macron à Saint-Martin : entre selfies vulgaires et conseils paternalistes, tout sonne faux …

Quand vous devenez professeur et que vous allez donc avoir, face à vous, des jeunes lycéens qui n'ont parfois que quelques années de moins que vous, on vous donne toujours de judicieux conseils : savoir se tenir à distance, ne pas laisser la familiarité s'installer, éviter que la jeunesse que vous partagez avec vos élèves ne nuise à votre travail, votre fonction, votre image. Ce n'est pas toujours facile mais, professeur aujourd'hui expérimenté, je suis toujours admiratif de la réussite de nos jeunes collègues.

Et puis, le temps passant, il y a un autre facteur qui vous confère cette juste position par rapport aux élèves : vous devenez parents et vous regardez et comprenez vos élèves différemment. À la fois plus proches, plus compréhensifs et plus justement exigeants, et donc plus à même de leur donner le conseil ou la réprimande d'un père ou d'une mère. Ils le sentent, ils aiment cela, parfois aussi parce que, malheureusement trop souvent, le père ou la mère, pour des tas de raisons et à des degrés divers, sont défaillants à la maison.

Ainsi se construit une identité de professeur.

Mais pour un président de la République ? Et a fortiori pour un jeune président de la République ? Que les sondages décrivent comme arrogant et loin du peuple ? Qui donne les conseils ? Sibeth, la responsable de la com' ? Ou Brigitte Macron ? Pas forcément la mieux placée pour donner des conseils de distance par rapport à ses jeunes élèves, me direz-vous...

La réponse nous a, une nouvelle fois, été donnée par la visite d'Emmanuel Macron à Saint-Martin, dans une séquence dont il semble raffoler. Parti en bras de chemise à la rencontre de la population, il dialogue avec une famille et se retrouve à faire des selfies vulgaires avec des jeunes torses nus, un peu copain-canaille, puis sermonne l'un d'eux, un ancien braqueur : « Les bêtises, c'est fini, hein ? Ta mère mérite mieux que ça ! », avec moult embrassades. Macron jouant le rôle du père...

La séquence laisse perplexe et met, en fait, mal à l'aise. On a l'impression que notre Président ne trouve jamais le ton juste.

Elle en rappelle d'autres, celle de la fête de la Musique de l'Élysée, notamment, des clichés avec Alexandre Benalla, où la proximité du jeune Président en chemise blanche avec des personnes issues de la diversité est systématiquement recherchée. C'est un plan de com' assumé. Admettons.

Mais, visiblement, personne n'a indiqué à notre jeune Président comment se tenir. Et, finalement, tout sonne faux, aussi bien son côté « pote de djeuns » que ses conseils paternalistes. Car notre Président a tout de même passé 40 ans, un âge où le copinage avec ses élèves ou ses concitoyens adolescents n'est plus possible. Et le problème, c'est qu'à quarante ans, il n'a jamais été père, jamais été confronté à ses propres enfants qui pourraient avoir l'âge de ces jeunes. Alors, ses conseils paternalistes sonnent faux. Aussi bien pour les vrais pères que nous sommes que pour les jeunes à qui il les prodigue, car son jeunisme de l'instant d'avant ou d'après les décrédibilise. Il n'y a pas d'« en même temps » possible en ce domaine. Contrairement à ce que veut nous faire croire sa com'. Il n'est ni jeune ni père, et il veut jouer aux deux...

Oui, ce Président sonne faux.

Frédéric Sirgant
Frédéric Sirgant
Chroniqueur à BV, professeur d'Histoire

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