C’est à Roubaix, ville du Nord qui est régulièrement le théâtre de violences urbaines, qu’Emmanuel Macron a choisi de clôturer le « Beauvau de la sécurité ». Après de longs mois de palabres interminables régulièrement perturbées par la crise sanitaire, c’est le chef de l’État lui-même qui a mis les mains dans le cambouis pour annoncer les différentes réformes et mesures envisagées à l’issue de ces travaux.

Sur la forme, c’est un Macron déjà candidat à sa réélection qui a harangué un parterre de policiers et de gendarmes, aux ordres comme il se doit. Mais c’est aussi aux Français qu’il s’est adressé, tentant de les convaincre que la France avait bien un chef.

Sur le fond, les réformes fracassantes qui étaient annoncées ont, en réalité, tourné au grand flop. Bien sûr, il y aura de l’argent. Toujours plus d’argent que l’on sortira de la poche d’un contribuables déjà exsangue pour rattraper un retard considérable en matériels, en travaux d’entretien ou en construction de nouveaux commissariats et casernes de gendarmerie. Et puis il y a eu toute une série d’annonces, dont certaines reviennent comme un véritable leitmotiv depuis des décennies sans que jamais le moindre début de commencement de mise en œuvre n’ait été réalisé. Il en est ainsi du recrutement et des délais inacceptables d’entrée en école de police : deux ans aujourd’hui. Macron a simplement oublié de dire que la cause principale en était la fermeture, au cours de ces dernières années, de nombreuses écoles de police. Sur la formation initiale des gardiens de la paix, qui ne fera que retrouver sa durée normale. Sur la formation continue qui, même augmentée de 50 %, s’avérera insuffisante pour une professionnalisation efficace des effectifs. Sur le renforcement de la chaîne hiérarchique à laquelle devrait répondre la création d’une académie de police à Montpellier, mais dont les policiers savent déjà qu’il ne s’agit là que d’un gadget.

Il y a également eu toutes ces déclarations concernant la procédure pénale et la désaffection que connaît la police judiciaire. Confiée à Dupond-Moretti, la simplification procédurale risque fort de se faire attendre. Entre les exigences droits-de-l’hommistes des juridictions internationales et les intérêts corporatistes d’avocats qui s’accommodent très bien du labyrinthe procédural actuel, source de nombreux vices de procédures et de remises en liberté de délinquants, il y a fort à parier que, là encore, le service sera minimum.

Reprise de vieilles revendications corporatistes, comme la création de directions départementales de police, de tartes à la crème, tel l’accueil du public et les cycles horaires de travail ou bien, encore, de la prise de plainte en ligne qui ne fera que submerger un peu plus les services de police et de gendarmerie et, donc, augmenter encore les classements sans suites ou les vaines recherches : nous sommes bien loin de la grande réforme pourtant indispensable pour la police et attendue par de nombreux policiers.

Car c’est bien d’une réforme sur le fond qu'a besoin la police nationale. Tout d’abord en développant des filières professionnelles, en particulier dans les domaines techniques que sont la police judiciaire, le renseignement ou le maintien de l’ordre. En décentralisant, ensuite, son organisation au niveau des zones de défense et des régions, même si le département et la circonscription doivent rester les dimensions opérationnelles pertinentes. Enfin, en restructurant complètement la chaîne hiérarchique en créant un véritable corps de gradés dont la nécessité se fait cruellement sentir, et en fusionnant les corps d’officiers et de commissaires.

En conclusion, on retiendra de ce discours déjà électoral un grand manque d’ambition pour la police nationale. Fort heureusement, la campagne pour l’élection présidentielle à venir sera l’occasion, à d’autres candidats, de faire des propositions sur la sécurité. D’ores et déjà, je peux vous annoncer qu’elles auront une tout autre dimension.

 

 

 

 

 

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15 septembre 2021 à 16:15

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