Loi Fin de vie : bientôt l’euthanasie des personnes handicapées ?

« Bien-être, bien vivre et bien mourir nous paraissent indissociables à l’idée de fraternité », déclarait, tranquillement, le représentant du grand maître de la Grande Loge de France, le 25 avril, en commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie.
« Fraternité » oblige, donc, mais aussi au nom de la non-discrimination, sacro-saint principe de notre société inclusive, les personnes porteuses de handicap… ne doivent pas être exclues de l’aide à mourir ! Ainsi nos bienveillants députés ont-ils balayé d’un revers de main cet amendement d’Annie Vidal, députée (Renaissance) de Seine-Maritime, qui demandait simplement « de renforcer la protection légale des personnes porteuses de handicap mental en les excluant explicitement du champ d'application de l'aide à mourir, afin de prévenir tout abus potentiel et de garantir que leur vulnérabilité soit dûment prise en compte ».
Cynisme absolu
Le rejet de cet amendement n’est pas sans effrayer les parents concernés. « C’est d’un cynisme absolu ! commente Chantal Dang, maman d’une enfant trisomique. Ils sont discriminés de fait, par le dépistage anténatal pour leur accès à la vie, et là, on nous parle de non-discrimination pour leur donner accès à la mort ? » nous confie, en colère, celle qui témoignait, il y a quelques semaines, devant l’ONU pour la Journée mondiale de la trisomie 21. Et Chantal Dang de s’inquiéter des dérives, « l’Histoire a montré qu’elles existaient », citant cette « mort miséricordieuse » que les nazis accordaient aux malades déclarés incurables.
Dans une tribune du FigaroVox, elle cosigne avec plus de 70 parents de personnes porteuses de handicap mental un appel à un sursaut d’humanité : « Le critère d'"affection grave et incurable", mentionné dans le projet de loi actuel, n'est-il pas littéralement le même que celui qui permet, aujourd'hui, l'avortement "thérapeutique" des enfants porteurs de trisomie 21 jusqu'à la veille de leur naissance ? » Pour elle, comme pour tous ces parents, il ne fait aucun doute que les personnes handicapées seront gentiment poussées vers la sortie.
Véronique Bourgninaud, Chargée de plaidoyer « vulnérabilité et handicap » à la Fondation, a également pris la parole ce matin à la table ronde avec des associations sur la fin de vie.
Mère de deux enfants handicapés, et fille d’un père tétraplégique, elle témoigne des pressions… pic.twitter.com/9U08gBteXa
— Fondation Jérôme Lejeune (@FondLejeune) April 25, 2024
Déification de la liberté comme finalité de la vie
Autre signataire de cette tribune, Véronique Bourgninaud, auteur du livre Contre la détestation de l'Homme par l'Homme (Artège). Mère de deux enfants handicapés et fille d’un homme tétraplégique, elle connaît le sujet. C’est en qualité de chargée de plaidoyer « vulnérabilité et handicap » à la fondation Lejeune qu’elle a été auditionnée elle aussi, le 25 avril par cette même commission précitée. « J’ai le sentiment que les députés étaient totalement acquis au projet de loi. » Décrivant « un nominalisme extrêmement hypocrite et mensonger », elle nous évoque ce « déni total sur le sens des mots. On m’a expliqué que ce projet de loi ne consistait pas à tuer, que tuer était un geste violent, que là, ce n’était pas le cas, ce serait un geste républicain. »
.@StphaneLenorma1 propose d'abandonner l'expression "aide à mourir", au profit de "l'interruption volontaire de l'énergie vitale". Une proposition qui serait "moins douloureuse à entendre", selon lui.#DirectAN #FinDeVie pic.twitter.com/jKvW8MXhgl
— LCP (@LCP) June 4, 2024
Dénonçant « la déification de la liberté comme finalité de la vie humaine [qui] fausse tout le dialogue », elle s’inquiète pour ses enfants, cibles de ce projet de loi, lorsque l’État ne remplit plus son rôle de protecteur des personnes. « J’ai compris, à leurs propos, que la liberté vaut plus que la vie. À partir de là, le rôle de la République, c’est de garantir la liberté, et si la personne veut mourir, libre à elle, le rôle de la République, c’est d’ouvrir toutes les possibilités à tout le monde et d’accompagner les personnes jusqu’au bout », résume-t-elle. Ce à quoi elle a répondu que « pour être libre, il faut être vivant et, donc, cela montre bien qu’il y a une priorité des valeurs de vie sur les valeurs de la liberté. C’est du bon sens, et cela assoit la dignité. »
« Nos enfants sont-ils des êtres humains ou pas ? »
Dignité bien malmenée pour que ces parents en soient à rappeler que leurs enfants appartiennent à l’espèce humaine. Terrible constat et sinistre paradoxe d’une société qui prône à longueur de journée la défense des minorités. « Mes enfants sont une proie, si l’on raisonne en termes d’efficacité, c’est sûr qu’ils ne remplissent pas le ratio coût/bénéfice. Ils sont d’autant plus menacés que les caisses des finances publiques sont vides », prévient Véronique Bourgninaud. « Dans quel monde vivent-ils ? » se demande Chantal Dang, au sujet de ces députés qui « manipulent des concepts idéologiques et déshumanisants. Nos enfants sont-ils des êtres humains ou pas ? Quand va-t-on réaliser que le traitement du handicap mental est monstrueux ? »
« Au Boomeristan, on veut mourir comme on a vécu : si je veux, quand je veux. Leur viatique est idéologique », écrivait, récemment, Gabrielle Cluzel. Même constat pour Véronique Bourgninaud, cette loi « est faite par des gens bien portants qui veulent maîtriser leur mort et qui n’entendent pas que les personnes malades et vulnérables demandent seulement d’être aimées et accompagnées ». Si elle se réjouit des initiatives heureuses, à l’instar des Cafés joyeux ou du film Un p'tit truc en plus, qui permettent de « regarder ces personnes avec tendresse », elle rappelle qu’en réalité, bon nombre des personnes handicapées ne parlent pas et dépendent entièrement de leur famille. Qui les protègera, demain, de la malveillance si, le 18 juin prochain, ce projet de loi autorise l’aide à mourir par un proche ?

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38 commentaires
Vous savez jusqu’où a dérivé le modèle belge et d’autres? Le bilan est monstrueux, toutes ces données viennent de statistiques officielles, qui sont certainement en dessous de la sombre réalité :
– banalisation des actes euthanasiques dans les pays où c’est légalisé ( entre 4 et 5 % du nombre total de décès en Belgique et aux Pays- Bas, proportion qui connaît une augmentation anormalement rapide) ;
– maintien d’un grand nombre de cas non déclarés (un sur trois en Belgique et un seul cas sur plus de 14 000 transmis à la justice
depuis la légalisation ! ) ;
– élargissement des populations concernées (pas seulement les malades âgés, mais désormais aussi les enfants mineurs) ;
– accès à l’euthanasie non seulement en raison de souffrances insupportables, mais aussi de » fatigue de vivre »
– absence de vérification des conditions objectives par les autorités pourtant mentionnées dans les textes législatifs ;
– disparition de la condition du libre choix conscient et éclairé (!!) : des malades d’Alzheimer, des prisonniers, des personnes atteintes de dépression peuvent être concernés ;
-installation et entretien du flou entre » laisser mourir » et » faire mourir » : confusion entre euthanasie et soins palliatifs alors qu’ils sont parfaitement antinomiques !
-atteintes objectives à la liberté de conscience des soignants
Tout cela, alors que la liste des problèmes s’accumulent pour les français, notamment l’insécurité, la baisse du pouvoir d’achat, la limitation des liberté individuelles en particulier sur internet, de choc des cultures en aggravation constante causé par une faillite de plus en plus criante de l’assimilation de certaines communautés immigrées, les pertes de souveraineté politique économique et industrielle, l’écrasante dette de 3 000 milliards d’euros de la France etc.Je pourrais continuer encore longtemps.
Malgré tout cela, ce qui intéresse depuis plusieurs mois notre président, c’est ni plus ni moins et sans langue de bois, la légalisation de l’euthanasie, en s’inspirant…du modèle belge !! Il est même question dans le projet du gouvernement de pouvoir
faire appel à un tiers et non seulement à un des malheureux médecins qui, comme ses collègues, constate avec désespoir que sa noble mission est de plus en plus défigurée ! Il s’agit d’une révolution brutale de notre code pénal, il y aura donc d’un côté les bons et les mauvais criminels, les crimes acceptables car transformés en » soins » comme c’est déjà le cas dans certains pays et ceux qui sont passibles de la cour d’assises.
Il y aura les bons et les mauvais suicides,car je rappelle que la France continue à réaliser des campagnes de prévention CONTRE le suicide. De plus, la NON assistance à personne en danger est toujours contraire à la loi et entraîne jusqu’à 5 ans de prison, il faudrait que l’on m’explique comment on va faire cohabiter cette loi avec un nouveau » droit au suicide assisté « … Pour manipuler à ce point leurs peuples, certains Etats deviennent schizophrènes ou affichent un mépris royal face aux facultés intellectuelles de leurs concitoyens…