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Alexandre Mendel est un journaliste de terrain. Et quand le semblant de campagne électorale américaine a commencé à vaguement intéresser les analystes français, quand il a vu et entendu la machine médiatique occidentale pro-Biden se mettre poussivement en branle, il est parti faire ce que bien peu de journalistes français ont fait : se coller à la réalité du terrain. 245 jours et 28.000 miles plus tard, Mendel nous livre un reportage passionnant, contrasté, haut en couleur, sur l’Amérique trumpienne. Parti trumpiste - il ne s’en cache guère, et cela ne discrédite en rien le travail titanesque d’information et d’analyse que constitue ce reportage hors normes -, Mendel est revenu de son périple assez désenchanté, un brin amer… Il n’en reste pas moins que, pour qui veut comprendre les enjeux de cette élection « la plus folle de l’histoire », cet ouvrage est indispensable.

L’auteur nous entraîne dans l’Amérique profonde, celle-là même qu’en 2016 Trump, par une intuition géniale, a su séduire par un discours qui tranchait singulièrement avec celui de ses prédécesseurs : son MAGA, Make America Great Again, n’était rien moins que le constat d’une Amérique fragilisée, en perte de vitesse, embourbée dans des guerres extérieures que beaucoup d’Américains jugeaient inutiles, à laquelle il promettait de recréer un lien, une identité dans un contexte de faillite du multiculturalisme. Car, écrit Mendel, « il n’y a pas un trumpiste qui ne soit effrayé à l’idée de perdre son identité, qu’il rattache celle-ci à ses origines européennes, sa religion, ou aux immenses libertés que lui confère la Constitution. L’Amérique invincible n’existait pas, il fallait casser le mythe qui n’était que le cache-misère des fractures américaines, et reconstruire une Amérique puissante, ou au moins décente, avec un socle commun, et une économie florissante. »

Il fallait donc permettre à cette Amérique de plus en plus fracturée, abaissée par la cancel culture, ensauvagée par une insécurité ravageuse - il rappelle judicieusement que les vingt villes les plus dangereuses des États-Unis, parmi lesquelles figurent Baltimore, Chicago ou encore San Francisco, la ville de Nancy Pelosi, sont toutes gouvernées par des maires démocrates -, de relever la tête. Cette Amérique où la moitié de la population ignore et méprise l’autre moitié, celle des ploucs, des rednecks, des déplorables de Hillary Clinton qui en sont pourtant la masse productive et qui constituent l’électorat de Trump.

Et l’insolente réussite économique de la présidence Trump, le taux de chômage historiquement bas, les succès diplomatiques et l’abandon de la doctrine va-t-en-guerre des néo-cons régnant sur les présidences Clinton et Obama auraient dû assurer à Donald Trump sa réélection.

Puis il y eut l’irruption du « virus chinois ». Et là, Mendel porte un jugement sévère sur la communication désastreuse de Trump, mais surtout sur ce rendez-vous manqué avec l’Histoire. Certes, la gestion de ce virus inconnu a permis fort opportunément à l’opposition démocrate de faire de Donald Trump le bouc émissaire de toutes les carences de l’Amérique. En toute mauvaise foi. « Donald Trump n’est pas le responsable unique de ce fiasco qui tient davantage à l’organisation politique du pays qu’aux provocations, à la naïveté ou aux dérapages verbaux » du président. En effet, « l’Amérique n’a pas réagi d’un seul bloc à l’apparition du virus. Et pour cause : il y a eu cinquante solutions différentes (soit le nombre d’États américains) multipliées par soixante autres solutions (le nombre moyen de comtés par État), multipliées par autant de villes que comptent ces comtés. » Une multiplicité de « stratégies » qui n’en étaient pas, dans un pays où la liberté de circulation et la liberté de travail priment évidemment sur le droit à la santé, une invention du progressisme qui n’a pas grand-chose à voir avec le self-made-man à l’américaine…

Dans cet ouvrage paru à l’automne dernier, l’auteur explique que ce qui est en train de se passer – la contestation par Trump des résultats devant les cours suprêmes - était prévisible. Selon lui, l’épidémie du Covid-19 et la révolte des Black Lives Matter sur laquelle la gauche a surfé abondamment, cristallisant et creusant les divisions internes à la société américaine, laissent présager d’une Amérique encore plus fracturée, au bord de l'implosion.

Quel que soit le vainqueur.

 

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04 janvier 2021 à 18:49

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