Les Français implorent le père Noël, mais les caisses sont vides

Après les gilets jaunes, après les personnels de santé, voilà les stylos rouges, un groupe d’enseignants qui réclament une augmentation franche de leurs salaires et une diminution des effectifs des élèves. S’y ajoutent les policiers, qui ne sont pas satisfaits des mesures obtenues par leurs syndicats. La France croule donc sous les revendications et elles sont toutes, je pense, légitimes et elles mériteraient toutes, sans exception, d’obtenir satisfaction. Ces demandes fusent, car le gouvernement a en partie cédé aux gilets jaunes et aux policiers. Du coup, beaucoup, qui jusqu’alors faisaient contre mauvaise fortune bon cœur, exigent eux aussi « un petit quelque chose » et se sentent frustrés, alors que si M. Macron n’avait rien concédé, ils ne réclameraient rien.

Hélas ! Les caisses de l’État sont désespérément vides ! Les dix milliards dépensés pour conjurer la crise des gilets jaunes seront empruntés aux banques alors que notre dette dépasse les 100 % du PIB. L’Europe fronce les sourcils et ne tolérera pas un nouveau dérapage. Malgré la sympathie que l’on peut éprouver pour les demandes des fonctionnaires, force est de constater qu’ils croient au père Noël et qu’ils s’imaginent qu’il y a, quelque part, de l’argent caché. Or, il n’en est rien. Même si on rétablissait l’impôt sur la fortune, on ne récupérerait (en 2020) que trois milliards (la différence entre l’ISF et le nouvel impôt sur la fortune immobilière).

Bien sûr, on peut imaginer des mesures extrêmes, du type saisie de 20 % des fortunes au-dessus de deux millions d’euros et dernière tranche d’impôt à 85 %, mais combien cela rapporterait-il ? Les riches s’empresseraient de fuir et les dégâts économiques dépasseraient vite les avantages. En outre, le Conseil constitutionnel veille : pour lui, le total des impôts d’un contribuable ne peut dépasser 65 % de ses revenus et, d’une certaine façon, il a raison. Au-delà, cela ressemble plus à du vol qu’à de la justice sociale. Reste la fraude, souvent estimée à quatre-vingts milliards, mais ce chiffre n’a aucun fondement. Il est donné au doigt levé et d’une manière polémique. Rien ne dit qu’il ne s’agit pas, en fait, de vingt milliards seulement (ce qui serait déjà considérable !).

Comment les récupérer ? Bercy fait ce qu’il peut et, s’il a réussi à mettre la main sur quinze milliards supplémentaires, il a atteint les limites de son action, sauf à rompre les relations économiques avec tous les paradis fiscaux, ce qui est impossible car certains appartiennent à l’Union européenne. On va taxer, en 2019, les GAFA (Amazon, Google, Airbnb) qui, par d’habiles montages fiscaux, échappent à l’impôt. On récoltera cinq cents millions d’euros - une paille par rapport aux besoins ! La seule façon de dégager des marges serait de faire des économies et de mieux gérer notre budget. Le CICE est-il efficace ? N’aurait-on pas pu créer autant d’emplois (320.000) en ne dépensant que cinq milliards au lieu de vingt ? Mais pour, enfin, être bien gouverné, il faudrait virer M. Macron.

Vu le contexte, même si le gouvernement le voulait, il est incapable d’augmenter tous les fonctionnaires (et il n’y a pas de raison de privilégier certains d’entre eux). Leur donner à chacun cent euros de plus par mois coûterait près de douze milliards, soit 0,5 % de déficit. En outre, il faudrait augmenter, également, les pensions des retraités ! Impossible : le père Noël est fauché !

Christian de Moliner
Christian de Moliner
Professeur agrégé et écrivain

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