"Même s’il pleut l’été s’ra chaud, dans les t-shirts dans les maillots…" On se souvient de ce chef-d’œuvre de la chanson française, chanté par Éric Charden dans les années finissantes du giscardisme flamboyant. "Où vais-je aller… Dans quel été je vais plonger ?" En Grande-Bretagne, à Londres plus précisément, la question se pose un peu dans les mêmes thermes pour certains de nos frères, sœurs et autres en humanité. Dans quel étang je vais plonger ?

Dans le parc de Hampstead Heath, nous rapporte Le Monde, s’étalent langoureusement plusieurs étangs dont l’eau fraîche et joyeuse, ou plutôt boueuse, est particulièrement appréciée des Londoniens durant l’été. Jusque-là, la nature semblait avoir bien fait les choses, si l’on peut dire. Trois étangs : un pour les dames, un pour les messieurs, un ouvert à la mixité sexuelle. Jusque-là, rien de très original. Et puis voilà que, fin mai, nous relate le journal vespéral de référence, des femmes déboulent dans l’étang réservé aux hommes, affublées de fausses barbes. Une ruse de « siouxe » pour mater les bonshommes, comme une sorte de juste retour des choses après des siècles à se faire évaluer des pieds à la tête au bord de la plage par des troupeaux de mâles ventripotents et velus ? Pas du tout. Une protestation, car les femmes transgenres sont autorisées à venir dans l’étang réservé aux femmes. Pas très bonnes copines, les filles. La meneuse de la troupe explique les raisons de cette colère : "L’étang des femmes est un endroit où les femmes viennent nager avec leurs filles dans un environnement sans hommes. Elles doivent pouvoir se baigner seins nus sans se trouver aux prises avec une personne dotée d’un pénis."

Les édiles grands-bretons n’avaient pas pensé à tout. Faudra-t-il creuser un nouvel étang réservé aux transgenres ou bien - plus économique mais plus difficile à gérer - envisager des horaires différenciés en veillant bien, alors, à ce que ces créneaux tournent pour que tout ce beau monde puisse bénéficier alternativement des heures ensoleillées ? On ne nous le dit pas. Du reste, les choses risquent de sacrément se compliquer, pour ne pas dire se complexifier, si la jurisprudence du désormais célébrissime Arnaud Gauthier-Fawas fait école : « Je ne sais pas ce qui vous fait dire que je suis un homme mais je ne suis pas un homme ». Cela promet des après-midis enchanté.es pour les faunes et satyres du jardin public qui voudraient conduire une expédition punitive dans l’étang aux femmes.

C’est drôle, tout de même : en mai 68, les étudiantes réclamaient le droit que les étudiants puissent leur rendre visite dans leur chambre. La légende prétend même que tout partit de là. Comme quoi, ça s’en va et ça revient, comme chantait le tout aussi regretté qu’Éric Charden, Claude François.

Il ne manquerait plus que l’on rajoute une petite couche religieuse là-dessus et le tableau des horaires serait complet. Une armée d’informaticiens et de gardiens de square, hommes, femmes, transgenres, non binaires, voilé.es, non voilé.es, etc., dans toutes les combinaisons possibles, seraient bien à la peine. Autrement plus difficile que de gérer le conflit, désormais obsolète, de la carpe et du lapin. Finalement, un été pluvieux réglerait peut-être le problème dans les t-shirts et les maillots.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 09/01/2020 à 20:05.

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09 juillet 2018 à 15:58

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