Jean-Michel Blanquer s’attaque aux adversaires de la laïcité : conviction ou opportunisme ?

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Jean-Michel Blanquer semble se démarquer de l'exécutif, quand il s'agit de défendre la laïcité. Lundi soir, lors de la présentation, par les Éditions Seramis, de #JeSuisMila #JeSuisCharlie #NousSommesLaRépublique, un ouvrage préfacé par Zineb El Rhazoui, où « 50 personnalités s’expriment sur la laïcité et la liberté d’expression », il s'est singularisé en prenant des positions qui rompent avec la tiédeur habituelle du gouvernement sur ce sujet.

Le Point nous rapporte quelques-uns de ses propos : « Nos adversaires sont organisés. Malgré leur faiblesse intellectuelle, ils ne cessent de gagner du terrain, dans les milieux culturels, dans les milieux universitaires, dans les milieux médiatiques. Nous devons nous aussi nous organiser face aux adversaires de la laïcité. L'heure n'est plus à la défensive, comme si nous étions minoritaires, mais à l'offensive », a-t-il notamment déclaré, ajoutant qu'il n'avait « aucun respect pour les positions d'en face ».

Notre ministre a également reconnu, toujours selon Le Point, que les adversaires de la laïcité sont très nombreux à l'échelle mondiale. Qu'il s'agisse du Qatar et de son argent comme de certaines universités américaines qui défendent la pensée « décoloniale ». Il a dénoncé des programmes subventionnés par l'Union européenne alors qu'ils font la promotion d'« idées communautaristes ». On ne peut qu'approuver ces propos, qui détonnent quelque peu dans le concert uniforme que donnent les membres du gouvernement, où l'on cherche en vain quelques paroles ou actes fermes et conséquents.

On peut, légitimement, se demander quelles raisons l'ont conduit à tenir ce discours. Première hypothèse : il le pense vraiment et tient à rappeler sa position. Avait-il le feu vert d'Emmanuel Macron ou s'est-il exprimé spontanément, en toute liberté ? On ne peut exclure que, tout en restant sincère, il ait eu un objectif plus politique : celui de plaire à une partie de la droite et de la gauche, authentiquement républicaine, sensible aux questions de laïcité et hostile aux manifestations du communautarisme. Enfin, peut-être a-t-il, dans l'atmosphère ambiante de fin de règne, choisi cette occasion pour affirmer sa singularité.

Toutes ces hypothèses sont possibles et s'entremêlent sans doute. On peut regretter, bien sûr, qu'il ne commence pas par faire le ménage dans sa propre maison et qu'il ne remette pas davantage en question la politique présidentielle dans ce domaine. Quand Emmanuel Macron déclare, comme candidat, que « la colonisation est un crime contre l'humanité », quand, devenu Président, il suit les sentiers battus de la bien-pensance, préférant le terme de « séparatisme » à celui de « communautarisme », il entretient une ambiguïté dont profitent les propagateurs des thèses communautaristes, voire décolonialistes.

Chacun jugera si Jean-Michel Blanquer joue un jeu politicien ou s'il exprime tout haut ses convictions profondes. Dans ce dernier cas, il doit savoir que le mariage de la carpe et du lapin n'est jamais durable : il ne saurait rester longtemps au gouvernement, sous peine d'être contraint de manger son chapeau.

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Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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