[Humeur] Sandrine Rousseau : la paresse, voilà la solution !

Sandrine Rousseau

Elle ne s’arrête donc jamais. Sandrine Rousseau est la stakhanoviste des plateaux télé et radio. Suivre les déclarations de cette authentique madone des matinales, ça devient un boulot à plein temps. Pratiquement du H24 qui impose de faire les trois-huit avec des équipes dédiées, dimanche et jours de fête compris. Cela dit, sur le front de la lutte contre le chômage, dans le petit monde des chroniqueurs, c’est plutôt une bonne nouvelle, d’autant qu’on n’entend presque plus Marlène Schiappa.

En fait, Rousseau nous oblige à faire tout le contraire de ce que Sandrine prône. Car Sandrine Rousseau prône. C’est le propre des curés, des télévangélistes et autres porteurs d’espérance en tout genre. Décidée à ne pas s’en laisser imposer par ce mâle blanc de plus de cinquante ans qu’est le communiste Fabien Roussel, la députée de Paris n’en démord pas : le travail, pardon « la valeur travail », c’est mal. Elle n’a pas dit ça comme ça, mais c’est tout comme. Forcément, c’est mal car, selon elle, le travail est « une valeur de droite ». Donc, pas question de lâcher un pouce de terrain à l’autre coco avec ses histoires de « bonne paie » et autres ringardises qui nous ramènent au temps de la bête humaine, de la sueur sur le front et ailleurs. Roussel, lui, veut mettre fin à la « gauche des allocations et des minima sociaux », Rousseau, elle, réclame « le droit à la paresse ». « On a un droit à la paresse, on a un droit à la transition des métiers, on a le droit aussi de faire des pauses dans sa vie, et surtout, il nous faut retrouver du temps, le sens du partage et la semaine de quatre jours », a-t-elle prêché, jeudi 15 septembre, sur le plateau de franceinfo.

Il faut reconnaître une chose : le travail des autres ne m’a jamais fatigué et, après tout, si quelqu’un pouvait me faire mon lit, déposer la pâte à dentifrice sur ma brosse à dent, comme on le fait depuis des décennies pour le prince Charles – pardon, le roi Charles III -, je me dis qu’au fond, la paresse, c’est plutôt bath. Cela dit, Sandrine Rousseau n’a rien inventé. Elle ne fait que recycler, chose normale pour une écolo de haute école : en 1883, Paul Lafargue (1842-1911), à la ville gendre de Karl Marx, publia un essai intitulé Le Droit à la paresse dans lequel il s’étonnait de cet amour porté par la classe ouvrière pour le travail, qualifiant d’ailleurs cet amour d’« étrange folie ». Ainsi, Lafargue écrivait : « Pour qu’il parvienne à la conscience de sa force, il faut que le prolétariat foule aux pieds les préjugés de la morale chrétienne, économique, libre penseuse ; il faut qu’il retourne à ses instincts naturels, qu’il proclame les Droits de la paresse, mille et mille fois plus sacrés que les phtisiques Droits de l’homme concoctés par les avocats métaphysiques de la révolution bourgeoise ; qu’il se contraigne à ne travailler que trois heures par jour, à fainéanter et bombancer le reste de la journée et de la nuit. » Tout cela est bien joli, mais on en revient toujours à la même question hautement existentielle, voire philosophique : qui ferait mon lit, dans tout ça ?

Au fait, j'y pense, il ne faudrait surtout pas que Sandrine Rousseau s’applique à elle-même ce droit à la paresse qui nous mettrait au chômage technique.

Georges Michel
Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

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